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La Sibylle De La Révolution

La Sibylle De La Révolution

Titel: La Sibylle De La Révolution Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Nicolas Bouchard
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le
fouet  – à la mort pouvait ainsi se comporter de manière aussi candide et
enfantine ?
    Ce vieux renard de Vadier avait
certainement une raison pour l’avoir choisi. Il avait toujours une raison pour
tout. Elle la devinait mais n’en était pas sûre. Ses visions concernant les prochaines
semaines étaient inhabituellement imprécises. Il en allait ainsi souvent lorsque
les événements à venir la concernaient directement. Par contre, certaines
choses apparaissaient avec évidence, notamment quant à ce Sénart. De toute
manière, quoi qu’elle fasse, cela allait se produire, il était donc vain
d’attendre ou d’espérer y échapper, alors autant s’y préparer dans les meilleures
conditions.
    — Citoyenne, commença-t-il
avec ce ton qu’il voulait ferme et qui ne faisait que le rendre plus enfantin
encore, le Comité de sûreté générale te somme de collaborer avec les forces
révolutionnaires qui travaillent à éclairer la Nation et à renverser les
ennemis de la Révolution qui conspirent à sa perte. Tu as ordre de
m’accompagner et de me communiquer tous les renseignements qui pourront
contribuer à mon enquête.
    — Très bien, citoyen. Où allons-nous ?
    Elle avait dit ces derniers
mots sur un ton badin, comme s’il l’avait invitée à une promenade. Le
désappointement qui se lut sur son visage faillit la faire éclater de rire.
    — Mais, bafouilla-t-il, je
croyais que vous saviez où étaient ces gens que nous devons retrouver…
    — Ce sont eux qui nous
retrouveront, lui répondit-elle du tac au tac. Le mieux que nous ayons à faire,
c’est nous promener dans les rues de Paris en attendant qu’ils nous contactent.
    Il fronça les sourcils :
    — Je crois que tu te moques de
moi !
    Elle lui renvoya une petite
moue :
    — Disons que certains quartiers
sont plus adaptés que d’autres. Allons, viens et sortons d’ici. Voilà plus de
six mois que je croupis dans cette cellule.
     
    Ils sortirent de la Petite
Force. Là, Sénart renvoya ses deux porteurs d’ordres avec mission de l’attendre
à l’Hôtel de Brionne, chemin qu’ils parsèmeraient sans nul doute de nombreux arrêts
dans quelques tavernes douteuses. Silencieux, ils empruntèrent la rue du
Roi-de-Sicile. Bien entendu, Marie-Adélaïde avait déjà vécu cette scène mais la
fin en était floue. Le soir tombait et les honnêtes gens, pour peu qu’il en
reste encore à Paris qui ne soient pas emprisonnés ou décapités, laissaient
place à une foule interlope. On y rencontrait beaucoup de ces agitateurs, ces
révolutionnaires braillards qui acclamaient chaque fois qu’on raccourcissait un
soi-disant noble, qui se précipitaient pour le pillage chaque fois que l’un
d’entre eux était arrêté, qui allaient boire le produit de leurs rapines dans
les tavernes. Les femmes d’ailleurs n’étaient pas en reste. Nombreuses étaient
celles qui subsistaient en vendant des cocardes tricolores ou, à défaut, leurs
charmes. Paris sous le règne des Comités n’était pas une ville sûre. Chaque
secteur disposait d’une « force armée », en fait autant de milices
plus promptes à provoquer les désordres qu’à les réprimer. Les
approvisionnements étaient de plus en plus délicats. Entre la guerre à l’Est et
ces révoltes paysannes qui n’en finissaient pas à l’Ouest, la dureté des commissaires
dans les provinces qui se comportaient comme des procurateurs romains et
accaparaient le blé pour leur compte ou celui de leurs amis agioteurs, bientôt
le peuple mourrait de faim. Et lorsqu’il se rendrait compte que les ennemis de
la Révolution n’y étaient pas pour grand-chose, sa réaction serait terrible.
    Encore adolescente, en arrivant
à Paris avant la fin tragique de la monarchie, elle avait longuement discuté
avec des hommes sages comme Court de Gébelin, Savalette de Lange ou encore
celui qui se faisait appeler le Philosophe inconnu. Pour eux, l’expression du
peuple ne pouvait qu’être bonne et lui rendre le pouvoir que les rois lui
volaient depuis des siècles ne pouvait que contribuer à la concorde et à la
fraternité universelle. Si seulement ils avaient pu voir juste ! Toute
raison semblait avoir quitté le pouvoir en place. Même Robespierre qui, en
1789, lançait de vigoureux plaidoyers contre la peine de mort s’était
transformé en bourreau sanguinaire. Et elle savait pourquoi.
    « La peur, ma petite
Marie-Adélaïde, la peur de mourir, de perdre ce qu’on a ou ce qu’on

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