La Traque des Bannis
dans leur direction. Bacari lâcha sa cordelette et repoussa sur le côté le corps affaissé d’Horace, sans oublier de tirer la dague du fourreau du chevalier.
La large lame pointée devant lui, dans la position classique de celui qui s’apprête à se battre au couteau, il s’approcha de Will. Très vite, il examina la situation. Malcolm, toujours endormi, ne présentait pour l’instant aucune menace. Horace était mort – ou inconscient, le Génovésien n’avait pas eu le temps de vérifier. Quoi qu’il en soit, il était incapable de prendre part à ce combat.
Ne restait plus que Will, muni de son seul poignard, Bacari sourit. Il était un combattant chevronné quand il s’agissait de lutter au couteau. L’arme du jeune Rôdeur était certes plus longue que la sienne, mais il était évident qu’il n’était pas rompu à ce type d’activité, à la différence du Génovésien ; celui-ci maîtrisait attaques, coups circulaires et parades depuis des années, des techniques qu’il avait perfectionnées dans les rues dangereuses et surpeuplées de Genovaso.
Bacari s’avança lentement, les yeux braqués sur ceux du Rôdeur. Il y lut une lueur d’hésitation. Will, qui s’était réveillé en sursaut, n’avait pas encore les idées très claires. Son pouls battait trop vite et il n’était pas préparé à combattre. Voilà pourquoi le Génovésien avait attendu plusieurs heures avant d’attaquer Horace.
Le Rôdeur recula. L’assurance qui perçait dans le regard de son adversaire lui fit comprendre qu’il se trouvait face à un expert. L’assassin avait dû s’entraîner à combattre au couteau des années durant, tout comme Will s’était entraîné à l’arc. Et ce dernier avait conscience de ses limites dans ce genre de duel.
Il n’eut pas le temps de s’appesantir sur cette idée : avec une rapidité inouïe, Bacari se jeta soudain en avant en essayant d’attaquer par le haut. Alors que Will tentait de parer le coup de dague, le Génovésien, d’un geste furtif, fit passer son arme dans son autre main et frappavers le bas. Sa lame déchira le gilet du Rôdeur, éraflant la peau ; ce dernier bondit vers l’arrière, hors d’atteinte.
Will sentit un filet de sang couler le long de ses côtes. Il avait su réagir, mais seulement de justesse, car l’incroyable vivacité de Bacari l’avait pris au dépourvu. Il avait l’impression d’être face à un serpent, lequel était capable de changer de direction en un battement de cœur. Le jeune Rôdeur pouvait tenter un lancer. Il se doutait cependant que le Génovésien saurait l’éviter avec aisance.
Bacari s’élança de nouveau, serrant cette fois la dague dans la main gauche, contraignant le Rôdeur à reculer d’un bond. Un mouvement qui donna du temps au Génovésien pour changer son couteau de main et attaquer en se fendant, puis en faisant décrire à sa lame, avec des gestes parfaitement coordonnés, une série déroutante de feintes par le haut et par le bas qui empêchèrent Will de riposter.
Le Rôdeur se rappela la dernière fois où il avait affronté cet homme, deux jours plus tôt, alors qu’il n’avait pu se permettre de le tuer. Dès que cette pensée eut traversé son esprit, une étrange résolution se fit jour en lui.
Bacari, campé devant lui, se tenait prêt à frapper. Puis, passant sa dague d’une main à l’autre, la jetant et la rattrapant comme un jongleur, il entama une succession de mouvements rapides destinés à troubler l’attention de son adversaire, lequel ne pouvait se concentrer sur l’attaque à venir.
Will l’imita, glissant son couteau dans sa main gauche. Aussitôt, Bacari lança son arme dans sa main droite.
— Tu ne te débrouilles pas très bien, constata-t-il en riant.
— Par le passé, j’observais souvent un homme qui se battait ainsi… commença le jeune Rôdeur.
Puis, sans prévenir ni cesser de parler, il lança son grand couteau vers le Génovésien.
C’était une vieille astuce que Halt lui avait enseignée des années plus tôt. Si tu te retrouves face à un adversaire qui t’est supérieur, c’est en usant de tromperie et en essayant de le distraire que tu auras des chances de t’en tirer. Parle-lui, raconte-lui n’importe quoi. Il s’attendra à ce quetu termines ta phrase, tandis que tu en profiteras pour passer à l’action. Peut-être parviendras-tu à le surprendre.
Mais Bacari connaissait lui aussi ce subterfuge, dont il s’était servi bien
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