La Vallée des chevaux
inspiration qu’elle fut
contrainte d’expirer avec force, émettant alors un sifflement digne de ce nom.
Ce son se rapprochait beaucoup plus du chant des oiseaux et l’incita à
continuer. Après bien des essais, elle réussit à émettre un sifflement plus aigu
même s’il manquait encore de volume.
Elle était tellement absorbée par ses efforts qu’elle ne
remarqua pas que Whinney dressait les oreilles chaque fois qu’elle réussissait
à siffler. Étonné par ce son nouveau, le cheval ne savait comment y répondre. Il
finit par s’approcher d’Ayla en dressant les oreilles d’une manière cocasse.
— Cela t’étonne, n’est-ce pas, Whinney, que je puisse
imiter le chant des oiseaux ? Moi aussi, j’avoue que je suis surprise. Je
ne savais pas que j’étais capable de chanter comme eux. Enfin, presque comme
eux... Je suis sûre qu’avec un peu d’entraînement, je finirai par y arriver.
Voyons voir ce que ça donne.
Ayla prit une inspiration, pinça les lèvres, puis laissa
échapper un long sifflement. Whinney remua la tête, hennit et se mit à piaffer.
Quittant le tronc où elle était assise, Ayla s’approcha d’elle et la prit par
le cou.
— Comme tu as grandi, Whinney ! s’étonna-t-elle. Tu as
presque atteint ta taille adulte. Tu dois courir drôlement vite, maintenant.
(Elle donna une claque sur la croupe de la jument.) Allez, Whinney, cours avec
moi ! proposa-t-elle en se mettant elle-même à courir.
Whinney eut vite fait de la distancer et, allongeant le pas, se
mit à galoper. Ayla la suivit pour le plaisir de courir. Elle continua jusqu’à
épuisement et s’arrêta pour reprendre son souffle. Après avoir galopé jusqu’en
bas de la vallée, la jument fit une large boucle et revint vers Ayla au petit
galop. Comme j’aimerais pouvoir courir ainsi ! se disait la jeune femme.
Nous pourrions partir ensemble partout où ça nous chanterait. Je me demande si
je serais plus heureuse si j’étais un cheval ? Au moins, je ne serais pas
toute seule.
Je ne suis pas toute seule, corrigea-t-elle aussitôt. Whinney me
tient compagnie. Je n’ai qu’elle et elle n’a que moi. Malgré tout, j’aimerais
bien pouvoir la suivre quand elle court comme elle le fait.
Elle éclata soudain de rire en voyant que Whinney, qui était
couverte d’écume, se roulait dans l’herbe en agitant ses pattes en l’air et en
poussant des petits gémissements de plaisir. Après s’être ébroué, l’animal
s’éloigna pour aller brouter un peu plus loin.
Quand Ayla, qui avait repris son entraînement, émit un
sifflement perçant, Whinney s’approcha aussitôt au petit galop. La jeune femme
la prit par le cou, tout heureuse qu’elle ait répondu, puis elle se demanda à
nouveau comment elle pourrait faire pour courir avec Whinney.
Et soudain, elle eut une idée.
Jamais cette idée ne lui serait venue à l’esprit si elle n’avait
pas considéré Whinney comme une compagne et une amie avec laquelle elle venait
de vivre pendant tout l’hiver ou si elle avait encore fait partie du Clan. Mais
depuis qu’elle vivait seule, elle faisait confiance à ses impulsions.
Est-ce qu’elle va accepter et me laisser faire ? se
demanda-t-elle en emmenant la pouliche près d’un tronc d’arbre qui se trouvait
sur le sol. Elle grimpa sur le tronc, attrapa Whinney par l’encolure et leva
une de ses jambes. Emmène-moi avec toi quand tu cours, Whinney, songea-t-elle
en se hissant sur le dos de la jument.
Whinney, qui n’avait pas l’habitude de sentir un poids sur son
dos, baissa les oreilles et se mit à piaffer nerveusement. Même si ce poids
l’incommodait, la présence d’Ayla lui était familière et les bras de la jeune
femme autour de son cou finirent par la rassurer. Elle se cabra un peu, puis,
voyant qu’elle ne pouvait se débarrasser de son fardeau, elle partit au galop
vers le bas de la vallée.
Menant une vie sédentaire, n’appartenant pas à une horde qui
l’aurait entraînée dans son sillage, n’ayant jamais eu à échapper à des
prédateurs, Whinney n’avait pas l’habitude de galoper longtemps et lorsqu’elle
arriva au fond de la vallée, elle ralentit l’allure et s’immobilisa. Ses flancs
palpitaient sous l’effort et elle laissa retomber sa tête.
— C’était merveilleux, Whinney ! dit Ayla en
descendant du cheval. Les yeux brillant d’excitation, elle prit le museau de
Whinney et y posa sa joue. Puis elle serra affectueusement la tête de
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