La Vallée des chevaux
qui
mettaient ces abominations au monde étaient intouchables.
Ayla était-elle vraiment impure ? Souillée ?
Répugnante ? Un monstre ? Elle, si honnête et si droite ! Et qui
connaissait l’art de guérir. Si sage, si courageuse, si gentille et si belle.
Est-ce qu’une femme d’une telle beauté pouvait être impure ?
Je suis certain qu’elle ne comprendrait même pas ce que ce mot
veut dire, songea Jondalar. Mais que penseront d’elle ceux qui ne la
connaissent pas ? Comment vont-ils réagir quand elle leur dira qu’elle a
été élevée par des Têtes Plates ? Quand elle leur parlera de son...
fils ? Que va penser Zelandoni ? Ou Marthona ? Car elle ne leur
cachera pas la vérité. Elle ne les laissera pas dire du mal de son fils et elle
leur tiendra tête. Je pense qu’elle est capable de tenir tête à n’importe qui.
Même à Zelandoni. Elle a le pouvoir de guérir et elle sait charmer les
animaux : elle aurait très bien pu devenir une zelandoni... Mais si Ayla
n’est pas un esprit malfaisant, pensa-t-il soudain, alors, tout ce qu’on dit
des Têtes Plates est faux !
Perdu dans ses pensées, Jondalar ne faisait pas attention à ce
qui se passait autour de lui et, quand il sentit un museau dans le creux de sa
main, il sursauta, tout étonné, puis caressa le poulain. Whinney était en train
de brouter non loin de là. Quand Jondalar cessa de le caresser, le poulain
bondit rejoindre sa mère. Jondalar reprit à pas lents le chemin de la
caverne : il n’était nullement pressé de se retrouver en face d’Ayla.
Mais Ayla n’était pas remontée à la caverne. Elle avait
contourné la saillie rocheuse et l’avait regardé descendre en courant la
vallée. Que lui arrivait-il ? Elle aussi, elle éprouvait parfois le besoin
de courir. Mais qu’est-ce qui l’avait poussé à s’éloigner tout d’un coup ?
Était-ce elle ? Après avoir posé la main sur la terre qui recouvrait la
fosse à rôtir pour en vérifier la température, elle se dirigea vers le gros
rocher. Jondalar, toujours perdu dans ses pensées, fut surpris de voir qu’elle
l’attendait là, entourée par les deux chevaux.
— Je m’excuse, Ayla. Je n’aurais pas dû courir comme ça.
— Moi aussi, il m’arrive d’avoir besoin de courir. Hier,
j’ai laissé Whinney courir à ma place. Elle va plus loin que moi.
— Je m’excuse pour ça aussi...
Ayla hocha la tête en se disant qu’il s’agissait là encore de
politesse. Cela ne signifiait pas grand-chose. Elle s’approcha de Whinney, et
la jument posa sa tête sur son épaule. Jondalar l’avait déjà vue agir ainsi
lorsqu’elle était bouleversée : Ayla et la jument se réconfortaient
mutuellement. Lui aussi, d’ailleurs, était en train de caresser le poulain.
Mais même si le poulain aimait les caresses, il était incapable
de rester longtemps en place. Il releva la tête, et s’échappa d’un bond. Il fit
une cabriole, virevolta pour revenir vers Jondalar et lui donna de grands coups
de tête comme s’il lui demandait de venir jouer avec lui. Ayla et Jondalar
éclatèrent de rire, ce qui fit aussitôt baisser la tension.
— Il faudrait que tu lui donnes un nom, rappela Ayla.
— Je ne sais toujours pas comment faire.
— Moi non plus, je ne savais pas. Jusqu’au jour où j’en ai
donné un à Whinney.
— Que s’est-il passé pour ton... fils ? Qui lui a
donné un nom ?
— Durc était le nom d’un jeune homme d’une légende. Creb
savait que c’était ma légende préférée et je pense qu’il a choisi ce nom pour
me faire plaisir.
— Je ne savais pas que ton Clan avait des légendes. Comment
faites-vous pour raconter une histoire alors que vous ne parlez pas ?
— Nous faisons la même chose que vous avec les mots. Dans
certains cas, il est plus facile de s’exprimer par gestes qu’avec des mots.
— C’est bien possible, reconnut Jondalar, en se demandant
quel genre d’histoires les Têtes Plates pouvaient bien raconter – ou
plutôt montrer.
Jamais il n’aurait pensé qu’ils étaient capables d’inventer des
histoires. Ils regardaient le poulain qui, la tête haute et la queue dressée,
galopait joyeusement non loin d’eux. Quel étalon ce sera ! se dit
Jondalar. Il file à une rapidité !
— Rapide ! s’écria-t-il soudain. Si nous l’appelions
Rapide ? Qu’en penses-tu ?
— Rapide ? Oui, je suis d’accord. C’est un nom qui lui
va bien. Mais si nous décidons de
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