La Vallée des chevaux
qu’elle avait
reconnu le son familier et hennit à nouveau.
— Est-ce que c’est ton nom ? demanda Ayla en souriant.
A nouveau, la pouliche remua la tête, puis elle fit un saut de
côté et revint vers Ayla.
— Si c’est le cas, tous les petits chevaux doivent porter
le même nom, remarqua Ayla en éclatant de rire.
Elle recommença à hennir et à nouveau la petite pouliche lui
répondit. Cela lui rappela le jeu auquel elle jouait avec Durc qui, lui, était
capable de répéter tous les sons que sa mère émettait. Creb avait expliqué à
Ayla que lorsque Iza l’avait recueillie, elle s’exprimait à l’aide d’une gamme
de sons nettement plus étendue que celle utilisée par le Clan. Et elle avait
été heureuse de découvrir que son fils pouvait reproduire ces sons.
Ayla reprit sa cueillette, toujours suivie par la jeune
pouliche. Elle ramassait du blé épeautre et une variété de seigle semblable à
celle qui poussait près de la caverne du Clan. Tout en récoltant des grains,
elle réfléchissait au nom qu’elle pourrait donner au petit cheval. Je n’ai
encore jamais donné de nom à qui que ce soit, pensa-t-elle. Que diraient les
membres du Clan s’ils savaient ça ? Et s’ils apprenaient que je vis avec
cette jeune pouliche ? Elle jeta un coup d’œil à l’animal qui était en
train de gambader non loin de là. Je suis tellement heureuse qu’elle vive
maintenant avec moi ! se dit-elle, la gorge serrée par l’émotion. Je me
sentais si seule avant. Je ne sais pas ce que je ferais si elle venait à me
quitter.
Quand Ayla s’immobilisa et leva la tête, le soleil était en
train de décliner. Le ciel était vide, immense, sans aucun nuage et d’un bleu
qui semblait immuable. A l’ouest pourtant, il commençait à rougir. Pour évaluer
le temps qui la séparait de la tombée de la nuit, Ayla observa la distance que
le soleil devait encore parcourir avant de disparaître derrière le sommet de la
falaise. Elle décida qu’il était temps de rentrer.
La jeune pouliche avait remarqué qu’elle s’était arrêtée et elle
s’approcha aussitôt en hennissant joyeusement.
— Allons boire, proposa Ayla en posant sa main sur
l’encolure du cheval et en l’entraînant vers la rivière.
Tel un kaléidoscope qui aurait reflété les couleurs changeantes
des différentes saisons, la végétation qui poussait au bord de la rivière avait
enrichi sa palette de toutes les teintes automnales : au vert sombre des
pins et des sapins s’ajoutaient maintenant des ors lumineux, des bruns,
quelques touches de jaune pâle et de rouge feu. Sans ce brillant
échantillonnage de couleurs qui tranchait sur le beige monotone des steppes, on
se serait cru au cœur de l’été, car il faisait encore très chaud dans la vallée
protégée du vent par les falaises. Mais ce n’était qu’une illusion :
l’hiver n’était pas loin.
— Il faudra aussi que je ramasse de l’herbe, rappela Ayla à
sa jeune compagne. La dernière fois que j’ai changé ta litière, tu en as mangé
une partie.
Lorsque la jeune pouliche se rendit compte de la direction que
prenait Ayla, elle se mit à trotter un peu en avant.
— Whinney ! Whinney ! appela Ayla en reproduisant
presque parfaitement le hennissement du jeune animal.
Tournant la tête, la pouliche regarda du côté d’Ayla et revint
vers elle.
Ayla lui frotta la tête et lui gratta les flancs. La jeune
pouliche était en train de perdre son pelage hirsute de bébé et ses longs poils
d’hiver poussaient. Cela la démangeait et elle appréciait qu’Ayla lui gratte
les flancs.
— J’ai l’impression que ce nom te plaît, dit-elle, et qu’il
te va parfaitement. Nous allons faire une cérémonie pour t’attribuer un nom. Je
ne pourrai pas te porter dans mes bras et Creb ne sera pas là pour tracer à
l’ocre rouge le signe de ton totem. J’ai l’impression que c’est moi qui vais
faire office de mog-ur.
Un mog-ur femme... On aura tout vu ! songea-t-elle en
souriant.
En arrivant en vue du piège, elle fit un large détour pour
l’éviter. Bien qu’elle l’eût rempli de terre, la jeune pouliche reniflait et
grattait le sol avec ses sabots, chaque fois qu’elle s’en approchait, comme si
elle sentait une odeur qui l’inquiétait ou qui lui rappelait quelque chose.
Chassée par le feu et le bruit qu’avait faits Ayla, la petite troupe de chevaux
n’était jamais revenue.
Ayla emmena donc la pouliche boire un peu plus près
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