La Vallée des chevaux
une infusion d’écorce de
saule, se dit-il. Comme tout le monde, il savait qu’on utilisait l’écorce de
saule chaque fois qu’on avait mal à la tête ou pour soulager d’autres douleurs
mineures. L’écorce de saule était-elle efficace en cas de blessure grave ?
Il l’ignorait mais ne perdrait rien à essayer.
Il mit de l’eau à chauffer au-dessus du feu, revint vers la
tente pour jeter un coup d’œil à Thonolan et ressortit à nouveau. Comme l’eau
tardait à bouillir, il ajouta une énorme brassée de bois et faillit mettre le
feu au cadre sur lequel était posé le récipient.
Je n’ai pas d’écorce de saule ! se dit-il soudain. Après
avoir jeté un nouveau coup d’œil à son frère, il se précipita vers la rivière,
s’approcha d’un arbre dont les longues branches traînaient à la surface de
l’eau, y préleva l’écorce dont il avait besoin et revint en courant vers la
tente.
En son absence, l’eau s’était mise à bouillir, débordait et
risquait d’éteindre le feu. Jondalar prit un bol pour prélever un peu de
liquide, puis il mit les écorces de bouleau dans le récipient et ajouta du
petit bois sur le feu. Passant la tête dans l’ouverture de la tente, il vit
alors que la tunique qu’il avait posée sur la blessure de Thonolan était
maintenant imbibée de sang. Complètement terrifié, il fouilla à l’intérieur du
sac de son frère et, comme il n’arrivait pas à trouver ce qu’il cherchait, vida
carrément le contenu du sac sur le sol.
Il saisit la tunique d’été de son frère et retourna auprès de
lui. Thonolan n’avait toujours pas ouvert les yeux, mais il gémissait. Jondalar
songea à l’infusion en train de bouillir. Il se précipita dehors et vida ce qui
restait d’infusion dans un bol en espérant que le mélange ne serait pas trop
fort. Après avoir posé le bol dans un coin, il s’approcha de son frère et
retira la tunique qu’il avait placée sur la blessure. Il recula,
épouvanté : la peau sur laquelle Thonolan était couché était, elle aussi,
couverte de sang !
Il est en train de se vider de tout son sang ! se dit-il.
Oh, Grande Doni ! Il a absolument besoin d’un zelandoni. Que faire ?
Il faut que j’aille chercher de l’aide ! Mais où ? Où trouver un
zelandoni ? Je ne peux pas traverser la Sœur, même à la nage. Et je ne
peux pas non plus le laisser seul. Il risque d’être dévoré par des hyènes ou
des loups attirés par l’odeur du sang.
Et cette tunique ! songea-t-il encore. Elle aussi, elle va
les attirer ! Il roula la peau en boule et alla la jeter dehors. Qu’est-ce
que je suis en train de faire ? se demanda-t-il aussitôt. C’est encore
pire ! Il ramassa la tunique et regarda autour de lui dans l’espoir de
découvrir un endroit où il pourrait la déposer, le plus loin possible de leur
camp.
Il était insensé de croire que cette tunique ensanglantée
attirerait les carnassiers et que, du coup, ceux-ci laisseraient Thonolan
tranquille. Mais Jondalar était sous le choc et fou de chagrin à la pensée
qu’il ne pouvait rien faire pour sauver son frère. Plutôt que de l’admettre, il
préférait se raccrocher à cette idée saugrenue.
Voulant à tout prix se débarrasser de la tunique, il courut vers
la colline au sommet de laquelle poussaient les jeunes aulnes et accrocha le
vêtement ensanglanté à la cime d’un des arbres. Puis il revint vers la tente et
se pencha vers Thonolan.
Son frère gémissait toujours. Au bout d’un moment, il remua la
tête et ouvrit les yeux. En apercevant Jondalar, agenouillé auprès de lui, il
eut un pâle sourire.
— Encore une fois, c’est toi qui avais raison, Grand Frère,
dit-il. Jamais nous n’aurions dû laisser ce rhinocéros derrière nous.
— Je préférerais mille fois m’être trompé, Thonolan !
Comment te sens-tu ?
— Tu veux que je te réponde franchement ? Je souffre.
A ton avis, c’est grave ?
Thonolan voulut se relever, mais il en était incapable et
grimaça de douleur.
— Ne bouge pas, lui conseilla son frère. Je vais te faire
boire un peu d’écorce de saule.
Jondalar souleva la tête de son frère et approcha le bol de ses
lèvres. Thonolan réussit à avaler quelques gorgées puis il laissa retomber sa
tête sur la fourrure. Non seulement il souffrait, mais il commençait à avoir
peur.
— Dis-moi la vérité, Jondalar, exigea-t-il. Est-ce
grave ?
— Ce n’est pas beau à voir, admit
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