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La vengeance d'isabeau

La vengeance d'isabeau

Titel: La vengeance d'isabeau Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Mireille Calmel
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l’ombre était trop dense et lui masquait Constant. Elle savait pourtant qu’il ne pourrait résister longtemps à l’envie de la rejoindre. Elle s’accroupit, gratta le sol qu’elle savait merdeux à cet endroit et ajusta un nouveau tir.
    Au moment où elle recommençait encore, le cri de Constant la tira de son activité :
    —  Les soldats, Marie ! Les soldats !
    Elle aperçut leurs lanternes en même temps qu’eux. Vive comme l’éclair, elle s’éloigna dans la direction opposée, se doutant que Constant avait déjà filé. Elle courut un moment en relevant ses jupes le plus haut qu’elle put, se sentant talonnée par le souffle des chiens qu’ils avaient lâchés sur ses traces. Elle connaissait Paris comme son escarcelle. Elle savait parfaitement où elle allait. Ce n’était pas la première fois qu’elle se faisait courser.
    Elle s’étala pourtant de tout son long sur une jambe avancée en travers de sa route. Une main puissante la happa et la redressa alors que les chiens arrivaient sur elle. Elle se débattit de toutes ses forces, mais la poigne ne se desserra pas dans son dos.
    —  Lâchez-moi, ils vont me dévorer. S’il vous plaît ?
    Le visage que la lanterne lui offrit alors lui fit regretter aussitôt d’avoir osé se plaindre. Les bêtes continuaient d’aboyer, mais n’attaquaient pas. La seule présence de leur maître les en empêchait. Le guet les rejoignit, essoufflé :
    —  C’est notre gibier, messire. Une chance que vous soyez passé par là.
    —  Une chance, dites-vous ?
    Le timbre était glacial, présomptueux et hautain.
    —  Si vous mangiez moins, vous seriez plus alertes !
    Marie se retint de rire. Ce n’était pas le lieu, même si elle trouvait que l’homme avait raison, heureusement pour elle.
    —  Qu’a-t-elle fait ? demanda-t-il encore.
    —  Elle a profané la statue martyre, messire prévôt.
    Le sang de Marie se glaça. Si celui-ci était le suppléant du prévôt objet de la mise en garde de sa tante, elle était dans une fâcheuse posture. Pourvu que Constant ne soit pas trop loin et ait eu l’idée de prévenir les gueux.
    —  Voyez-moi ça !
    François de Chazeron lâcha Marie dans un mouvement ample qui l’envoya s’asseoir brutalement sur le sol puant. Les soldats éclatèrent d’un rire gras. Marie ne savait trop si elle devait en faire autant. Étrangement, elle avait le sentiment que parler ne pourrait que nuire à sa cause.
    —  Que comptez-vous en faire, sergent ?
    —  La conduire au Châtelet et lui trancher les mains !
    Marie se mit à frissonner. C’était là le châtiment des voleurs. Elle se décida à implorer clémence. Elle rampa à quatre pattes jusqu’au prévôt, se dressa à genoux et lui offrit un piteux spectacle tant elle était crottée, décoiffée et noircie de figure. Elle joignit ses petites mains en une prière.
    —  S’il vous plaît, messire. C’était une mauvaise farce poussée par quelque démon et j’en demande pardon à Dieu tout-puissant. J’irai faire pénitence sur l’heure à Sainte-Geneviève si proche, et prierai pour vous autant qu’il vous plaira. Mais comment le pourrai-je si je ne peux joindre les mains pour louer le Seigneur ?
    Le rire des soldats redoubla de violence et Marie sentit une rage sourde battre ses tempes. Elle se força pourtant à la contrition et auréola son visage du sourire le plus angélique qui soit.
    —  Tu as raison, sans aucun doute, affirma François de Chazeron, clouant net l’hilarité de ses hommes. Les mains sont bien nécessaires aux garces de ton espèce. Emmenez-la et amusez-vous d’elle. Ensuite, vous la relâcherez, les cachots sont assez remplis !
    Un grognement d’approbation gagna les trois hommes. Marie hasarda dans un ultime élan de sincérité :
    —  Pitié, messire. Je suis vierge encore.
    —  Tant mieux, ricana François de Chazeron. Ton éducation sera faite cette nuit et je gage même que tu y prendras du plaisir.
    Laissant le sergent lier les poignets de Marie, il s’écarta du groupe, héla les chiens sur ses traces et tourna les talons, satisfait de sa sentence.
    Quelques instants plus tard, Marie, les mains attachées par une corde au pommeau de la selle du sergent, suivait d’un pas rapide le trot des chevaux, des larmes de rage et d’impuissance devant les yeux. Ce n’était pas tant sa police qu’elle aurait mise en pièces en cet instant, mais lui, ce François de Chazeron, ce pourceau immonde et

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