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La vengeance d'isabeau

La vengeance d'isabeau

Titel: La vengeance d'isabeau Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Mireille Calmel
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elle en aura sûrement. Pour que l’enfant vive, il lui faut une nourrice. Le lait ne vient jamais lorsqu’on intervient contre la nature. Il lui faut aussi le contact de sa mère. Ne les séparez pas et veillez à ce qu’elle ait chaud.
    Avant que la journée fût achevée, une paillasse avait été dressée auprès de la cheminée et les deux miraculées dormaient paisiblement l’une contre l’autre, veillées par l’aïeule qui, les larmes aux yeux, avait béni cent fois les deux médecins. Michel et Philippus se relayèrent jusqu’aux matines afin de réduire la fébrilité. Lorsqu’elle tomba brusquement, ils surent que la femme était sauvée. La fillette était chétive, frêle, mais vivace, et Philippus ne put s’empêcher d’y voir un nouveau signe du destin. N’était-ce point ainsi qu’il avait vu la sienne pour la première et dernière fois, en délivrant sa mère ? Il n’avait pas oublié.
    Comme il rejoignait Michel dans la chambre à l’étage, il se confia à lui, l’émotion vive dans ses mains fatiguées. Michel se borna à hocher la tête en signe d’assentiment.
    Il l’invita à lui raconter son histoire dans les détails, tout en gardant les yeux clos sur les images qu’elle faisait naître. Philippus ne s’arrêta qu’après les dernières révélations de Huc de la Faye. La nuit s’était avancée. Il était épuisé. Dans la lueur faiblissante des chandelles, Michel, allongé sur sa couche, se laissait absorber, dissoudre dans une impalpable succession d’émotions et de couleurs. Des voix se mêlaient à des bruits diffus, à des souffles, un vent glacial le faisait frissonner dans la sensation d’une course effrénée, puis soudain il l’aperçut, dressée sur l’éperon rocheux qui surplombait une mer de cadavres : la louve. La louve grise à la chaînette d’or. Elle tourna vers lui son regard d’émeraude, s’approcha à pénétrer dans son propre regard et fondit son âme à la sienne.
    Alors Michel écarquilla les yeux et hurla.

5
     
     
    —  Viens, allons, ne sois pas gourd, Constant ! S’emporta Marie.
    —  Ta tante l’a interdit, Marie. Si elle l’apprend, elle nous punira.
    —  Et qui le lui dira, sot que tu es ? Allons ! C’est moins amusant sans toi, mais je te préviens que j’irai quand même !
    —  Oh ! Les filles, tempêta Constant en tapant du pied dans une pierre que la chaussée avait oubliée là.
    Il appuya les mains sur ses hanches et se renfrogna. Pour sûr qu’il avait envie de cette farce, mais il était inquiet. Le guet avait été renforcé dans la ville et à cette heure tous dormaient à Paris. Ils auraient bien dû faire de même !
    Marie papillonna autour de lui, gracieuse malgré les vêtements de gueuse qu’elle avait mis pour la circonstance. Ainsi, ils se fondaient mieux dans les recoins des ruelles par cette nuit sans lune, et si par malchance il leur fallait s’aplatir au sol pour n’être point vus, elle ne risquait ni de tacher ni de trouer ses beaux habits.
    —  Si tu m’accompagnes, je te donnerai un baiser, glissa-t-elle en s’approchant de lui à le frôler.
    Constant sentit son cœur battre plus fort, s’en étonna presque, puis repoussa la jouvencelle en lâchant :
    —  Quel bien cela me fera-t-il ?
    —  Grand bien, tu peux m’en croire. À voir comme cela me plaît à moi !
    Aussi vive que l’éclair, elle s’approcha, déposa un baiser léger sur ses lèvres et se recula aussitôt en étouffant un rire. Malgré l’obscurité, elle devinait son trouble et sa gêne.
    —  Alors ? dit-elle d’une voix convaincante et langoureuse.
    —  Alors, rien, grogna Constant, les sens aux aguets.
    Il ne pouvait nier son attirance pour Marie. Ils avaient grandi ensemble, chahuté ensemble, mais son corps exprimait désormais le besoin d’autres jeux, et, s’il était sûr qu’elle éprouvait pour lui les mêmes sentiments, il se fâchait toujours qu’elle s’en moquât.
    —  Tu n’es pas amusant, Constant. Tant pis, annonça-t-elle résolue.
    Elle ramassa du crottin de cheval dans ses mains et s’avança à découvert jusqu’à l’angle de la rue des Deux-Siciles où le roi François venait quelque temps plus tôt de replacer la statue de la Vierge qu’ils avaient mutilée deux ans auparavant.
    Marie visa. La crotte fraîche quitta ses doigts et atterrit en une flaque collante sur le visage de la Sainte Mère. Elle retint un cri de joie et lança un regard en arrière. Mais

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