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La vengeance d'isabeau

La vengeance d'isabeau

Titel: La vengeance d'isabeau Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Mireille Calmel
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soutenir la Réforme menacée par ses détracteurs, de plus en plus nombreux dans l’entourage du roi. Croquemitaine avait eu beau le raisonner, rien n’y faisait. Il allait jusqu’à distribuer la nuit des pamphlets contre l’Église. Il en semait au seuil des maisons, des boutiques, des ateliers, escorté de Solène, sa jeune sœur, et d’une bande d’autres garçons de son âge que Marie connaissait bien. Ils étaient leurs compagnons de jeux. Bertille s’en arrachait les cheveux, tremblant chaque nuit qu’ils soient arrêtés par le guet. Mais Constant n’écoutait rien ni personne. À part Calvin. Et Calvin se souciait peu d’autre chose que de sa propre gloire au travers de ses idées.
    Marie en conclut qu’il se perdait dans cette tâche pour ne pas penser à elle. Mais elle n’y pouvait rien. Elle ne pouvait plus le rejoindre quand bien même elle l’aurait voulu. Et elle ne voulait pas quitter Vollore.
    —  Épouse-moi !
    Elle s’éveilla sur ces mots. Jean était courbé au-dessus de ses lèvres. Les jumeaux avaient une semaine. Elle percevait leur souffle régulier dans les berceaux proches de son lit. Au-dehors la nuit était belle, piquetée d’étoiles. Elle secoua la tête mais il s’empara de sa bouche une nouvelle fois, comme s’il voulait refouler au plus profond d’elle cette résistance stupide. Marie se laissa emporter, gorgée encore de sommeil, puis il la quitta. Elle le regarda fuir sans remords puis se rendormit, se demandant à peine si elle avait rêvé.
     
    Noël passa sur les vagissements des jumeaux. Ils prirent le nom de Chazeron sur le livre d’heures de Marie, ce qu’Etienne de la Faye, l’annotier du Moutier, consigna sans discuter. Jean grinça des dents, mais choisit d’attendre. Tant que Marie ne le chassait pas, il pouvait espérer la fléchir. Mais il se sentait peu fier d’évoluer ainsi entre elle et Isabeau, sans malice pourtant. De part et d’autre les choses étaient claires. Il les aimait toutes deux, pour des raisons différentes, mais il n’y pouvait rien.
    L’année 1532 venait de tourner bride lorsqu’Isabeau accoucha de la « chose ». Par un après-midi pluvieux et maussade. Elle hurla longuement. Effrayés, les jumeaux ne tardèrent pas à pleurer de manière stridente, amenant sur le château une atmosphère de fin du monde.
    Marie voulait assister Albérie, mais Philippus s’y opposa. Comme toutes les jeunes femmes en relevailles, elle était fragile et déprimée. Il ne tenait pas à ajouter à ces humeurs la vision d’un enfantement monstrueux. De fait, il s’en félicita, car il dut ouvrir ce ventre que la nature ne forçait pas et sortir l’enfant par la chirurgie. Car au-delà de la « chose », il y avait l’enfant.
    Ils étaient accolés l’un à l’autre par une jambe et un bras. Prolongement d’une même chair pour un masque à deux visages. L’un était rond et poupin, l’autre n’était que poils et difformité. Siamois. Philippus n’avait jamais vu pareille étrangeté. Et fut heureux qu’Isabeau soit endormie.
    Un instant, ils ne surent que faire devant cette naissance, puis Albérie saisit la jambe double. D’une main ferme, elle la suspendit en l’air et donna une tape dans le dos des nourrissons. Ils crièrent ensemble tandis que Philippus s’activait à recoudre le bas-ventre d’Isabeau.
    —  Si les fièvres ne la gagnent pas, elle s’en sortira, affirma-t-il en achevant le bandage.
    —  Que faisons-nous de « ça » ?
    Le doigt tendu d’Albérie marquait son dégoût.
    —  Il convient de les séparer, je crois.
    —  En finir serait préférable !
    —  Seule Isabeau sait ce qu’il doit en être. Elle choisira. Ils sont double, Albérie. Je ne veux pas qu’elle les découvre ainsi.
    Il s’activa seul. Albérie ne broncha pas. Sur le visage doux du garçonnet, elle reconnaissait à s’y méprendre les traits de Loraline. À cause de cette ressemblance, elle savait déjà quel serait le choix de sa sœur. Isabeau s’éveilla tard dans la nuit, tourmentée par la fièvre et le cauchemar. Ils se relayèrent à son chevet puis au matin la température retomba et elle demanda à voir.
    Mais ce qu’elle vit tout d’abord, ce fut Ma. Ma qui s’était faufilée dans la pièce derrière Philippus. Ma qui s’était approchée de la table où les langes se trouvaient. Ma qui, d’une langue râpeuse, léchait le visage du garçonnet.
    —  Montrez-le-moi, demanda Isabeau,

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