La ville qui n'aimait pas son roi
d’Aumont,
M. d’O et les secrétaires d’État. Mais il avait encore quelques gentilshommes, en particulier M. de Montigny qui gardait la
porte des appartements royaux avec une dizaine d’archers. Ce fut lui qui lui donna les dernières nouvelles. Le colonel Alphonse
Corse d’Ornano venait de partir pour Lyon afin de saisir le duc de Mayenne. Le jeune fils de Guise était enfermé avec sa mère
et M. de Richelieu avait fait conduire Brissac et Boisdauphin dans la tour du Foix, une vieille fortification du château primitif
où Catherine de Médicis avait installé son observatoire. Il n’y avait pas eu de violence, mais Bellegarde n’était pas encore
revenu avec le duc de Nemours.
— Savez-vous quelque chose pour le cardinal de Bourbon?
Montigny balança un instant de la tête. Il avait observé l’attachement entre Bourbon et Poulain, qu’une fois le roi avait
appelé M. de Dunois. D’autre part, il avait remarqué que le roi traitait le prévôt comme un familier, bien qu’il n’ait aucune
charge de gentilhomme. Finalement, il se dit qu’il pouvait répondre sans trahir de secret.
— Larchant vient de l’enfermer dans la salle basse de la tour du Moulin.
— Le cardinal est malade, comment est-il installé?
— Je l’ignore, monsieur Poulain. Il vous faudrait demander à Larchant.
Larchant fut introuvable jusqu’à midi et les gardes de la tour du Moulin avaient ordre d’interdire l’entrée à tout visiteur,
même à la reine mère.
Nicolas se rendit donc aux cuisines, car il avait faim malgré son inquiétude. Les grandes tables étaient toutes occupées, les conversations étaient joyeuses et les rires dominaient. Il se joignit à un groupe de gentilshommes et d’écuyers de la maison du roi. Qu’allait-il se passer maintenant? On allait pendre tous les prisonniers, plaisantaient les uns, ce serait un grand spectacle! Le roi allait marcher sur Paris avec les gardes françaises, assuraient d’autres. La ville serait ensuite mise au pillage trois jours, se réjouissaient-ils.
Nicolas s’inquiétait surtout pour son père. Il se promit de se jeter au pied du roi s’il était condamné à mort.
Le repas fini, il retourna dans la salle du conseil toujours pleine de monde. Vers midi, le marquis d’O entra, venant des
appartements du roi. Sa Majesté tiendrait conseil dans quelques minutes et ferait part de ses décisions, annonça-t-il en donnant
la liste de ceux qui étaient conviés. À son étonnement, Nicolas entendit son nom au milieu de ceux du duc de Retz, de son
frère l’archevêque, de Rambouillet, de Bellegarde, de Larchant, de Montigny et de quelques autres. Après une nouvelle attente,
le roi entra suivi des secrétaires d’État, de Montpezat – fier de sa nouvelle importance d’assassin – et des ordinaires qui avaient massacré le duc de Guise.
Nicolas trouva le roi changé. Son visage était toujours lisse de sentiment mais il lui parut plus dur, plus volontaire. Peu
maquillé, il avait gardé ses boucles d’oreilles mais portait un habit de soie noir, comme s’il était en deuil. Depuis la mort
de Guise, Poulain avait eu le temps de songer à son comportement et il avait perçu combien Henri III était aguerri dans l’art
de la feinte et dans la façon de déguiser ses passions.
Ce fut M. d’Aumont qui expliqua le pourquoi de ce parlementement (on ne pouvait parler de conseil tant l’assistance était nombreuse). Le roi souhaitait connaître les avis des uns et des
autres concernant les châtiments des prisonniers. D’Aumont laissa la parole à chacun, à tour de rôle.Les plus intransigeants voulaient la mort pour tous; les politiques et les secrétaires d’État plaidèrent la clémence, seul Guise étant coupable à leurs yeux. Beaucoup demandèrent des grâces individuelles pour des parents et des amis. Le baron de Luz, un neveu de l’archevêque de Lyon, demanda à genoux le pardon pour son oncle qui pourtant avait conseillé bien des rébellions contre le roi. Nicolas Poulain, interrogé, plaida pour le cardinal de Bourbon, mais il vit au bref sourire d’Henri III que celui-ci ne pousserait pas plus loin sa vengeance.
Même le fils du duc de Guise, le jeune prince de Joinville, eut la vie sauve alors que beaucoup pensaient qu’il serait exécuté.
Le roi décida que les prisonniers seraient enfermés à Amboise, à Chinon et à Tours, forteresses d’où ils ne pourraient s’évader.
Il annonça
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