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La ville qui n'aimait pas son roi

La ville qui n'aimait pas son roi

Titel: La ville qui n'aimait pas son roi Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Jean (d) Aillon
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monde là-haut à cette heure. Prenons un passage plus discret.
    Il s’approcha des gentilshommes qui cessèrent leur conversation pour les regarder avec arrogance.
    — Nous allons chez Sa Majesté, Saint-Malin, dit Cubsac à l’un d’eux qui avait la même allure de brigand que lui.
    — Je vous accompagne. Sarriac, Saint-Pol, passez devant!
    Olivier devina qu’il s’agissait des quarante-cinq. Ces gardes du corps gentilshommes de la chambre que l’on qualifiait d’ ordinaires , car ils étaient toujours près du roi, par opposition aux gentilshommes par quartier qui servaient par trimestre.
    Le petit groupe traversa la salle jusqu’à la pièce suivante que l’on appelait le tribunal. Là, au fond d’une abside construite
     dans l’épaisseur du mur de façade, Cubsac ouvrit une porte de chêne. Deux des quarante-cinq s’engagèrent devant eux dans un
     petit passage jusqu’à une minuscule salle bâtie dans le mur, puis ils empruntèrent un étroit escalier à vis. On y voyait à
     peine. La flamme vacillante de mèches dans des coupes de terre cuitepleines d’huile fixées au mur par des anneaux était le seul éclairage.
    Ils débouchèrent dans un autre passage avec des ouvertures étroites dont les portes étaient ouvertes. D’un côté, Olivier aperçut une grande chambre éclairée par une cheminée et un lustre aux bougies de cire avec un lit qui trônait au milieu; sans doute la chambre de parade du roi. Les quarante-cinq les firent passer dans une autre chambre lambrissée où se dressait, sur une estrade, un lit à colonnes drapé de damas et de velours. Le parquet était marqueté et le plafond splendidement peint. Sur des fauteuils, devant une large cheminée au manteau orné de figures d’animaux, deux hommes conversaient.
    Bien que ses cheveux et sa barbe en pointe aient grisé depuis leur dernière rencontre, et que les plis soient plus nombreux
     et plus profonds aux commissures des lèvres et autour des yeux, Olivier reconnut immédiatement le visage féroce du marquis
     d’O. Le favori du roi, l’archilarron comme l’appelaient ses ennemis, arborait un pourpoint de soie noire brodé de perles avec
     un col droit très évasé. Sur sa poitrine brillait la chaîne d’or des chevaliers du Saint-Esprit.
    Le second homme, en noir aussi, paraissait minuscule dans son fauteuil. Un toquet agrémenté d’une broche ne cachait pas son
     front dégarni ni la calvitie de ses tempes. Son teint était gris, malgré une épaisse couche de poudre rouge sur les joues.
     Des plis profonds marquaient le tour de son nez et de sa bouche. À ses oreilles pendaient de lourdes perles et ses mains d’ivoire,
     dont l’une portait plusieurs bagues serties de grosses pierres multicolores, tenaient un curieux chapelet dont les perles
     étaient des têtes de mort. Il ne portait pas d’épée, contrairement à monsieur d’O, mais une dague de côté finement ciselée.
     Malgré sa maigreur, son air maladif, sa barbe clairsemée et les inquiétants mouvements convulsifs qu’il ne pouvait maîtriser,
     il restait empreint de majesté.
    Olivier croisa son regard, et se sentit fouillé au plus profond de lui-même. Ému malgré lui, et bien qu’il eût haï ceroi, il fit un pas et tomba à genoux, imité par Cassandre et Caudebec.
    Henri III sourit à peine pour cacher sa dentition clairsemée. Le marquis d’O, en revanche, se leva aussitôt qu’il reconnut
     les visiteurs. Les yeux fulminant de colère, la main sur la poignée de son épée, il lança avec une rage à peine contenue :
    — Sire, ces gens-là sont des imposteurs! Cette femme est la fille de M. de Mornay et non Mlle de Saint-Pol que vous attendez! Cubsac, pourquoi les as-tu conduits ici?
    Cubsac devint blême et les trois hommes qui les avaient escortés s’approchèrent, menaçants.
    Le roi leur fit signe de sortir et ils obéirent, comme à regret. Quand ils furent dehors, Henri III s’adressa à O d’un ton
     las et monocorde.
    — Rassure-toi, ami O, Mme de Saint-Pol est bien Mlle de Mornay. Mon cousin Henri m’avait prévenu. Mais vous, messieurs, qui êtes-vous? Et comment se fait-il que tu les connaisses, marquis? demanda-t-il en plissant les yeux.
    — L’un se nomme Hauteville, sire. C’est un bourgeois de Paris, répondit O, toujours courroucé. Son père, contrôleur des tailles, a été assassiné par la Ligue alors qu’il mettait au jour cette affaire de fraude que vous m’avez confiée, il y a trois

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