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La Violente Amour

La Violente Amour

Titel: La Violente Amour Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Robert Merle
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ses
troupes – encore que cette nuit-là il ne le pouvait faire, la cavalerie
n’ayant aucune part en cet assaut – il est facile d’un trait de plume de
mettre leurs armées en branle et de causer tant d’inexprimables maux tant à
leurs propres sujets qu’à leurs ennemis. Et à la queue de cette idée, comme sa
suite naturelle, me poignait aussi très vivement le sentiment que tant de
Français naturels allaient cette nuit mourir de ce qu’ayant pris sa capitale au
roi défunt, ils ne la voulaient rendre au roi régnant, ayant eu l’entendement tourneboulé
et rassotté par les prêchaillons et les princes.
    L’escopeterie
commença sur la minuit et se continua deux grosses heures, au bout desquelles
le dessein du roi si heureusement réussit que tous les faubourgs furent pris en
même temps ! Événement de grande conséquence pour ce que les armées du
roi, ayant rétréci prou le périmètre du siège, se trouvaient quasiment sous les
murs de Paris et bloquaient toutes les portes hors lesquelles ne se pouvait
plus entrer ni saillir sans qu’elles l’eussent permis. Ainsi la pauvre Paris se
trouva plus resserrée et contrainte qu’elle ne l’était la veille et les
nécessités du pauvre peuple de deçà, plus grandes encore. Ce qui donna à tous
le sentiment que les princes ne pourraient faillir d’entrer un jour proche en composition
avec le roi.
    Du simple
arquebusier aux capitaines, et des capitaines au roi, cette victoire fut
célébrée dans les faubourgs par des festins où viandes et vins ne furent pas
épargnés. J’y pris part, fort heureux d’un succès qui, à ce que je croyais
alors, mettait la paix à la portée de la main, mais fort triste aussi dans le
pensement que les Français d’en deçà des murs manquassent de tout le pain que
les Français d’au-delà si gaîment gaspillaient. Je me faisais aussi quelque
souci pour Alizon, Franz et sa liebchen pour ce qu’ayant baillé à
Pissebœuf, avant de départir, l’ordre de continuer à les envitailler, je
craignais qu’il eût oublié la consigne.
    En ces agapes,
je pris garde de ne me point mêler à la noblesse qui entourait le roi, mais
demeurai avec les bourgeois, échevins, marchands et prévôts de son entourage
avec qui je jouais mon rollet de drapier sans éveiller, à ce que je crois, la
moindre suspicion, tant bien jetais passé maître en cette comédie ; au
demeurant, parlant fort peu, sous le prétexte d’une intempérie de la gorge, et
m’asseyant modestement avec Miroul en bout de table et dans le coin le plus
sombre.
    Précautions
qui n’empêchèrent point le bouffon Chicot qui musait par là de me reconnaître
et de me venir dire à l’oreille :
    — Tudieu,
la Saignée, ta déguisure est parfaite, mais outre que je t’ai vu en cette
attifure le jour des barricades, je t’ai reconnu à l’œil goulu et glouton dont
tu espinchas cette accorte brunette quand elle te vint verser le vin de son
pichet à ton gobelet. Vertudieu ! Que n’as-tu pu alors lui retourner la
courtoisie, et verser ton gobelet en son pichet ! Eh quoi ! Tu ris,
la Saignée ? Tu es bien le seul à t’esbouffer céans de mes saillies !
Mais viens, fils, viens t’attabler avec moi et ton commis vairon, en ce petit
coin que voilà, où nous serons hors d’oreilles de ces bedondainants bourgeois.
    — Chicot,
dis-je à voix basse, quand nous fûmes assis, ma mission est secrète. Ma
présence, céans, l’est aussi : que pas un mot sur elle, je te prie –
même pour faire un giòco di parole  – ne passe la barrière de tes
dents ! Tu me mettrais à grand péril !
    — Fils,
tant promis, tant tenu. En outre, à qui parlerais-je ce jour ? Mon fils,
tu vois céans un fort triste spectacle : un bouffon désoccupé.
    — Qu’ois-je ?
dis-je en levant le sourcil. Le roi t’a chassé de son sein, te trouvant trop
piquant ?
    — Point
du tout. Mais comment ferais-je s’esbouffer un roi qui se bat du matin au
soir ? Chasse quand il ne se bat pas. Et quand il ne chasse, ni ne se bat,
coquelique d’une poule à l’autre. Un roi, en outre, qui fait tout cela en riant
comme fol, oubliant que le fol, c’est Chicot.
    — Chicot,
dis-je en riant, mais tu me fais rire, moi !
    — Petit
mérite, la Saignée, dit Chicot en branlant le chef, vu que tu es, comme
Navarre, de cette déplorable race qui rit de par naturelle inclination. Ha, mon
bon maître Henri Troisième, lui, quand il marinait interminablement en

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