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La Violente Amour

La Violente Amour

Titel: La Violente Amour Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Robert Merle
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votre nom au bec,
et votre pensée au cœur. À telle enseigne qu’ici depuis deux mois, je n’avais
qu’à lui conter quelque menu fait de vos maillots et enfances pour que sa belle
face s’éclairât. Je ne vois pas ce qu’on pourrait, de présent, trouver à redire
à ses conduites. Pour moi, elle est telle que je la vis toujours.
    — C’est,
Monsieur mon père, que vous ne l’avez pas connue en ses folies.
    — Toute
femme, dit mon père, et se peut, tout homme aussi, a ses moments de déraison.
Saviez-vous que votre mère, en son ire, avait tenté de poignarder
Alazaïs ?
    — Barberine
me l’a conté.
    Touchant
Angelina j’aurais eu tant à dire et j’étais encore en tel doute rongeant quant
à son identité, que je ne voulus pas en débattre plus avant et je dis :
    — Qu’êtes-vous
apensé, Monsieur mon père, de Quéribus et de son opinion sur le roi ?
    — Les
tortues mises à part, dit mon père, je dirais qu’elles reflètent la générale
opinion de la noblesse catholique à l’égard de Navarre. Succéder au dernier
Valois n’était pas facile, mon Pierre. Henri Troisième a fiché dans la noblesse
une certaine idée du roi, point du tout aisée à éradiquer, et que je résumerais
ainsi ; d’un côtel, le roi se doit d’être le parangon de toutes les
élégances par la vêture, par les manières, par le langage, par le luxe de sa
Cour ; et d’un autre côtel, il doit prodiguer son bien à tous et un
chacun, dépassant tous les souverains de la chrétienté par d’immenses et continuelles
libéralités, lesquelles, souvent, n’ont que peu de rapport avec les services
rendus. Tant est que les nobles, comme des enfants gâtés, n’attendent du
souverain maintenant que de perpétuels présents. Le Béarnais est trop huguenot
pour l’entendre de cette oreille. D’où les deux griefs que vous avez
ouïs : il est chiche-face et en son apparence et conduite, grossier.
    — Grossier ?
Le tenez-vous pour tel ?
    — Cela me
désole à dire, mon fils : il l’est parfois.
    — Par
exemple ?
    — Ces
deux nonnettes de Montmartre et Longchamp… Sachant que l’immense majorité de ce
peuple est catholique, le roi devait-il l’affronter en commettant ce que ledit
peuple tient à sacrilège ?
    Ha !
m’apensai-je, je ne m’en étais pas avisé, mais certes il a raison. Et c’est
fort délicatement senti pour un vieil huguenot qui eût pu, comme tant
d’autres – comme moi-même – se gausser de l’aventure sans en
apercevoir le côté offensant pour nos frères papistes. Je les appelle
« frères », pour ce que je souhaiterais qu’ils deviennent à la parfin
pour nous des Abels plutôt que des Caïns.
    Je demandai
alors à mon père ce qu’il en était de sa goutte.
    — Vous
connaissez, dit-il en riant, l’aphorisme d’Hippocrate : L’enfant mâle
n’a pas la goutte avant le coït ; la femme avant la ménopause ; l’eunuque
ne l’a jamais. Et moi, je tiens que la goutte est une intempérie qu’on se
baille à soi-même par trop de viandes, trop de vin et pas assez
d’exercitations. Mon Pierre, quand j’étais aux armées au siège de Paris, j’ai
glouti et bu plus que de raison et encore que l’exercitation ne m’ait guère
manqué, mon gros orteil dextre s’est mis tout soudain à enfler démesurément au
point de me faire claudiquer comme votre oncle Sauveterre (à ce nom il détourna
la tête et ses yeux bleus se remplirent de larmes). J’ai donc quis du roi mon
congé et suis venu me mettre au vert en votre Chêne Rogneux, remplaçant vin par
tisane et chapon par légumes.
    — Et vous
eûtes bonne curation de vos enflures ?
    — Tout à
plein, la Dieu merci. Je n’aimerais pas devenir goutteux, rogneux et podagreux
comme le pauvre Mayenne…
    À bien le
considérer, il n’en prenait pas le chemin, étant droit comme un i, sans
bedondaine aucune, l’œil clair, et cette gaîté de vivre au fond de l’œil qui
rendait sa compagnie tant aimable qu’on oubliait, à s’entretenir avec lui, sa
face burinée et son poil grison.
    Je lui
souhaitai la bonne nuit et du doigt allai heurter à l’huis d’Angelina, le cœur
me toquant fort de l’appréhension que me donnait l’entretien qu’elle avait quis
de moi. Je la trouvai debout en ses longues robes de nuit, lesquelles étaient
de couleur azur et lui tombaient jusqu’à ses mignonnes pantoufles de velours
bleu, le flot de ses épais cheveux blonds, dénoués, coulant

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