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La Violente Amour

La Violente Amour

Titel: La Violente Amour Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Robert Merle
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lettre de M. de Saint-Luc et
sur les intentions du roi, se demandant même si Sa Majesté ne voulait pas
l’entraîner hors les murs pour le capturer. Raison pour quoi il me répondit par
ce tant abrupt nenni en m’opposant son inébranlable fidélité à la Ligue et en
m’arrosant d’eau bénite. En réalité, il n’attendait que de se faire confirmer
par ses propres agents que M. de Saint-Luc désirait en toute bonne foi le voir
pour courre l’encontrer.
    Ce qu’il fit
le 14 mars à trois heures de l’après-midi, saillant de Paris à cheval par
la porte Saint-Denis, suivi de trois avocats qui montaient des courtauds.
Ceux-ci, j’entends les avocats, arrivés au rendez-vous, se mirent en conférence
avec les représentants de M. de Saint-Luc sur le sujet de ce prétendu héritage,
tandis que celui-ci prenait Brissac à part et lui confirmait la promesse que je
lui avais faite sur son maréchalat, lui offrant par ailleurs de la part du roi
des avantages en clicailles dont personne ne sut rien, sinon qu’ils étaient,
comparés à ceux qu’on avait faits à M. de Vitry, ce qu’est la taille de Paris à
l’importance de Meaux.
    Je sus cela
par Rosny mais, lecteur, pour savoir la suite, il fallut que le furet passât
des mains de Rosny en Saint-Denis à celles, en Paris, de Pierre de L’Étoile,
lequel fut véritablement en la capitale, en ces jours tracasseux, mes yeux et
mes oreilles.
    — Mon
Pierre, me dit-il, me visitant en mon logis des Filles-Dieu comme il aimait
faire au moins une fois le jour, sans m’avertir, et que je fusse ou non chez
moi, Brissac se doutait bien que son absence de trois heures hors les murs de
la capitale allait mettre puce au poitrail des ligueux. Aussi, dès qu’il eut
remis sabot et pied sur le pavé de Paris, notre Brissac courut chez le légat et
là, s’abîmant à ses genoux et versant des torrents de larmes, il lui demanda
très humblement pardon du grand péché qu’il avait commis en communiquant avec
un suppôt d’hérétique. Ce qu’il avait fait, dit-il, non sans avoir été
affreusement tourmenté en sa conscience et seulement parce qu’il y allait de
tout son bien. Le légat, touché de ses pleurs et de sa repentance, lui bailla
incontinent l’absolution et encontrant le duc de Feria à sa repue du soir (vous
n’ignorez pas que le légat ne mange qu’une fois le jour et qu’il se fait
ensuite sangler comme un mulet…).
    Lisette,
entrant à ce moment dans la salle portant sur un plateau un flacon et trois
gobelets, L’Étoile s’interrompit, l’œil fiché sur la mignote et suivit tous ses
mouvements (lesquels, à dire le vrai, tandis qu’elle nous servait le vin, me
parurent ronds et gracieux) mais sans que la garcelette levât une seule fois
son bel œil sur L’Étoile, encore qu’elle portât au coin des lèvres un sourire
connivent.
    — Que
disais-je ? dit L’Étoile, dès que Lisette eut assombri la pièce en la
quittant.
    — Quand
vous le laissâtes en plan, dis-je, le légat était à sa repue du soir avec le
duc de Feria.
    — Auquel
il fit de grands éloges de Brissac, louant hautement sa dévotion et son
humilité. « Oui-da, lui répondit le duc de Feria, c’est un fort bon homme
que M. de Brissac et à l’Église très docile. Je l’ai toujours connu comme tel.
Pour lui faire faire tout ce qu’on veut, il n’est que d’employer son confesseur
jésuite, lequel a plus d’autorité sur lui qu’une mère sur son nouveau-né –.C’est
donc, dit le légat avec un sourire, que le comte n’a, se peut, jamais dépassé
tout à plein ses maillots et enfances –.Vramy, je le crois ainsi, dit le
duc de Feria, et pour vous montrer quel grand homme d’affaires c’est que le
comte de Brissac, je vous dirai qu’un jour où l’on tenait conseil en mon logis,
au lieu que de prêter l’oreille à ce qu’on débattait, il s’amusait à attraper
des mouches contre la muraille. » À quoi le prélat et le duc, à ce qu’on
me dit, rirent comme fols.
    — Si
Brissac attrape les mouches, quant à eux, ils les gobent, dit M. de La Surie.
    — Bien
prononcé, Monsieur l’écuyer, dit L’Étoile, sachant bien le plaisir toujours
neuf qu’il donnait à Miroul en l’appelant ainsi.
    — Mon
cher L’Étoile, dis-je en jetant un coup d’œil à ma montre-horloge, finissez
sans hâte votre vin et soyez, je vous prie, le maître en mon logis dans les
heures qui vont suivre. M. de La Surie et moi-même avons pris jour avec

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