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La Violente Amour

La Violente Amour

Titel: La Violente Amour Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Robert Merle
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reconnus,
béant, Pierre de L’Étoile, armé en guerre et la face fort résolue.
Cornedebœuf ! je n’eusse pas cru le grand audiencier si vaillant que de
payer de sa personne le moment venu. Car, enfin, il n’y avait pas « ville
gagnée », la garnison espagnole – Wallons, Castillans et
Napolitains – étant forte de quatre mille soldats.
    Je secouai
Tronson qui s’était ensommeillé, étant las de ses tétées, et il descendit sa
grosse masse trébuchante jusqu’au bas du viret, manquant se rompre le col une
ou deux fois.
    — Tronson,
dit Langlois qui me parut être un petit homme sec et décisoire, êtes-vous des
nôtres ?
    — Du bon
du cœur, dit Tronson.
    — Et
ceux-là ?
    — Ceux-là
aussi.
    — Et vos
gens ?
    — Mes
gens feront ce que je dirai, poursuivit Tronson en retrouvant quelque peu sa
piaffe.
    — Alors,
dites-leur de déverrouiller la porte, de la déclore et d’abaisser le
pont-levis.
    — Qui me
commande cela ? dit Tronson, comme effrayé.
    — Moi,
Langlois ; L’Huillier, prévôt des marchands et Brissac, gouverneur de
Paris. Cela vous suffit-il ? Ou dois-je vous rendre tout de gob pendu, ou
prisonnier ?
    — Monsieur
l’échevin, dit Tronson avec un rot, je connais mes maîtres et je leur obéis.
    Ayant dit, il
tira de ses chausses une grosse clé, sans laquelle nous aurions été bien en
peine, en effet, de déverrouiller la massive porte de chêne, étant réduits
alors à la faire sauter au pétard, ce qui eût attiré sur nous la garnison
espagnole. Brandissant ladite clé, mon Tronson se dirigea en se dandinant comme
un dindon vers l’huis, et encore que nous fussions tous plus accoisés que carpe
en rivière, le silence me parut, pour ainsi parler, s’épaissir, quand nous
ouïmes le grincement, allègre à faire peur, du pêne se dégageant de sa gâche.
    — Les
gonds de la porte, dit Langlois, sont-ils huilés ?
    — Oui-da,
dit Tronson, d’ordre de M. de Brissac.
    — Et les
chaînes du pont-levis ?
    — Aussi.
    — Allons,
dit Langlois.
    La nuit eût
été claire sans un brouillard qui venait à nous par nappes et nuages à ras de
terre et par moments se résolvait en une petite pluie fine qui vous mouillait
la face sans la cingler du tout. Je n’ai, à ce jour, qu’à fermer l’œil et en
moi rentrer pour retrouver sur la mienne cette étrange sensation et aussi
l’impression d’attente et d’anxiété que donnait cette trentaine d’hommes en
armes de toutes conditions : ouvriers mécaniques, artisans, marchands ou
bourgeois étoffés comme L’Étoile, tous silencieux et fort résolus à mourir pour
bouter l’Espagnol hors les murs et y admettre leur roi.
    Mus par des
mains que je ne voyais pas, les deux battants de l’huis se rabattirent en un
parfait silence. Au bout de ses chaînes, avec lenteur déroulées, le pont
s’abaissa sur les douves sans noise aucune et Paris s’ouvrit dans la nuit au
roi comme une femme qui s’offre.
    Dans les
minutes qui suivirent, deux groupes portant l’écharpe blanche et comptant
environ chacun une vingtaine d’hommes armés nous vinrent rejoindre, tant est
que nous faisions tous ensemble une bonne soixantaine et tous bien décidés.
    — Tronson,
dit Langlois de son ton sec et décisoire, baille ta lanterne à ce compagnon qui
porte une montre-horloge en sautoir et dis-lui de venir à moi. Dès que j’eus la
lanterne en main, j’obéis et Langlois me toisant, me dit :
    — Comment
te nomme-t-on, compère ?
    — Coulondre,
maître drapier de Châteaudun. Je loge rue des Filles-Dieu dans la paroisse du
même nom.
    — Quelle
heure portes-tu ?
    — Quatre
heures, dis-je, ayant fait tomber un rayon de ma lanterne sur ma
montre-horloge.
    À peine
disais-je, que quatre grands coups sonnèrent à l’église des Filles-Dieu.
    — Allons,
dit Langlois, et il s’engagea d’un pas saccadé et rapide sur le petit
pont-levis, tandis que je marchais à son côté, faisant un pas là où il en
faisait deux et tâchant d’éclairer son chemin, ce qui était malaisé, par ce
qu’on n’y voyait pas à deux toises. Non que la nuit fût noire, mais comme j’ai
dit jà, des paquets de brouillard blanc à ras de terre nous bouchaient la vue à
l’alentour, tant est qu’on voyait à peine à dextre et à senestre les bords du
chemin empierré qui menait à Saint-Denis et que j’avais emprunté, comme le
lecteur s’en ramentoit, dans la nuit glaciale où le chevalier d’Aumale

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