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La Violente Amour

La Violente Amour

Titel: La Violente Amour Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Robert Merle
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Monsieur le Marquis, ajouta-t-il à
mon oreille, je vous dois quelques excusations pour vous avoir traité si
cavalièrement, devant que je connusse votre qualité.
    — Monsieur
l’échevin, dis-je, nous sommes amis d’ores en avant, vous et moi. Comment
pourrais-je oublier jamais que j’ai vécu avec vous ce moment où Vitry a sailli
du brouillard, venant à nous, la torche l’éclairant ?
    On pressa
quelque peu le pas sans encontrer la moindre encombre ni résistance, les
Parisiens commençant à ouvrir leurs verrières et acclamant Vitry que les
prêchaillons avaient pourtant traîné dans la boue depuis la reddition de Meaux.
    Il tombait une
petite bruine et la pique du jour était grisâtre. Au grand châtelet, on trouva
Saint-Luc et le comte de Brissac bras dessus bras dessous, devisant gaîment et
l’ex-mignon Saint-Luc dont le cheveu était resté blond (l’art, se peut,
s’ajoutant à la nature), s’écria, dès qu’il vit M. de Vitry :
    — Sans
coup férir ?
    — Sauf de
la voix, dit Vitry, laquelle a suffi pour disperser quelques Napolitains de
Feria à la porte Saint-Denis.
    — Des
ligueux céans m’ont voulu faire une braverie, dit Saint-Luc avec le zézaiement
du règne précédent. J’en ai tué deux, le reste s’est rendu.
    — Ce
reste, vous l’avez pendu, j’espère ? dit Vitry, pointant son grand nez en
avant.
    — Que
nenni ! Le roi ne le veut ! Lisez plutôt ce billet qu’il fait
distribuer au peuple.
    Lecteur, j’ai
conservé un exemplaire de ces billets qui se donnaient de main en main en Paris
en cette aube et les jours suivants. Le voici :
     
    De par le
roi, Sa Majesté, désirant de réunir tous ses sujets et les faire vivre en bonne
amitié et concorde, notamment les bourgeois et habitants de sa bonne ville de
Paris, veut et entend que toute chose passée et advenue depuis les troubles,
soit oubliée. Défend à ses procureurs, substituts et officiers d’en faire
aucune recherche à l’encontre d’aucune personne que ce soit, même de ceux qu’on
appelle vulgairement les Seize, promettant Sa dite Majesté en foi et
parole de roi, vivre et mourir en la religion catholique, apostolique et
romaine et de conserver tous ses dits sujets et bourgeois en leurs biens,
privilèges, états, dignités, offices et bénéfices. Donné à Senlis le vingtième
mars de 1594 et de notre règne le cinquième.
     
    Henri.
     
    — Étrange
style, dit Vitry. Que veut dire le cinquième ?
    — Le
cinquième an, dit Brissac, dont je ne sais pourquoi en cette aube grise, l’œil
senestre me parut moins bas sur la joue et la loucherie, moins forte.
    — Tudieu,
cela est vrai ! s’écria Vitry de sa voix sonore, cinq ans ! cinq ans
que le roi règne et sans sa capitale ! ajouta-t-il, oubliant qu’il avait
été un de ceux qui lui en avaient interdit l’accès.
    — Il faut
bien avouer, dit le blond Saint-Luc avec son charmant zézaiement, que cette
Paris est une grande coquette. Elle a fait attendre le roi cinq ans au pied de
ses murs avant que de se donner à lui.
    — Mais de
présent, elle va l’aimer, dit Langlois.
    À cet instant,
une estafette nous vint dire que le roi, étant entré dedans Paris, par la porte
Neuve, avait rejoint M. d’O à la porte Saint-Honoré, le prévôt des marchands
L’Huillier devant lui remettre là les clés de la ville. Oyant quoi, Saint-Luc
et Vitry, laissant leur commandement de leur colonne à leurs lieutenants,
décidèrent tout de gob de s’y rendre, imités incontinent par Brissac, Langlois,
La Surie et moi-même. En chemin, Saint-Luc, me désignant, dit à Brissac de sa
voix sotte et gentille :
    — Monsieur
mon frère, ne vous fiez pas à l’habit. Le bourgeois que vous voyez là est le
marquis de Siorac.
    — Mais je
le connais bien, dit Brissac avec un souris.
    Il n’en dit
pas plus, étant homme de peu de mots, sauf quand sa langue était occupée à
bâtir de fausses apparences pour dérober ses intentions.
    Le cœur me
battit quand je vis le roi sur son cheval blanc, en cuirasse mais tête nue,
l’œil vif et la lèvre enjouée, le poil grisonnant jà sur les tempes et ne
paraissant pas sentir la petite bruine qui lui tombait sus. À côté de lui, sur
un beau genet d’Espagne se tenait M. d’O que je n’aimais guère, ne lui
reconnaissant qu’une seule vertu : la fidélité.
    — Sire,
je suis à vos pieds, dit Brissac en baisant la main du roi.
    — Je vous
salue, monsieur le Maréchal de France, dit

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