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La Violente Amour

La Violente Amour

Titel: La Violente Amour Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Robert Merle
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ce qu’on me voulait apprendre), ce soir est donc une
exception ?
    — Nenni,
Monsieur le Baron, dit Guimbagnette d’un air mignard et minaudant, sa voix
montant fort dans l’aigu sur le « nenni ». Le roi en a décidé ainsi,
depuis qu’il s’est mis en campagne.
    — Ha !
dis-je, feignant intérêt et surprise à ce point d’étiquette, n’est-ce pas
étrange et inaccoutumé ?
    — Ce
serait étrange et inaccoutumé, Monsieur le Baron, dit Guimbagnette (qui
m’aimait chaque minute davantage de ce que je l’écoutais si attentivement), si
on en ignorait la raison.
    — Que
vous savez, je gage, Monsieur, dis-je avec un petit salut de la tête.
    — Que je
sais, dit Guimbagnette avec un air d’immense conséquence et poussant en avant
avec un soupir d’aise, tandis qu’il marchait à mes côtés, son énorme
bedondaine. Appétez-vous, Monsieur le Baron, à l’ouïr ?
    — Assurément.
    — C’est
que Sa Majesté soupe le soir avec le maréchal de Biron qu’il appelle « mon
père », et à qui il répète tous les jours qu’il a été le premier à lui
apprendre le métier de la guerre.
    — Je
croyais, dis-je en levant le sourcil, que ce fut le maréchal de Tavannes, le
premier mentor de Sa Majesté.
    — Vous
n’errez pas, Monsieur le Baron, dit Guimbagnette, le regard luisant de
gausserie et les lèvres comprimées comme s’il s’empêchait de s’esbouffer. Ce
fut, en effet, Tavannes le premier maître ès guerre du roi, quand il n’était
encore que le duc d’Anjou. Mais, ajouta-t-il en levant le petit doigt de sa
main senestre, et m’envisageant de côté d’un air mutin, mais, Monsieur le Baron…
Mais, reprit-il avec une nouvelle œillade et un battement de cil, Monsieur le
maréchal de Tavannes est mort, et Monsieur le maréchal de Biron est vif. C’est
là l’affaire…
    Après quoi, il
éclata d’un rire tant aigu, fusant et féminin que vous eussiez cru ouïr dans sa
voix tout un couvent de folles nonnettes.
    Dès que j’eus
soupé en ma chambre (Miroul, se mettant prestement à ma dextre à table pour ne
laisser à Saint-Ange que mon côté senestre, ce dont l’écuyer ne s’aperçut même
pas, étant comme à son ordinaire, sauf au combat, fort rêveux et songeard), je
descendis aux communs m’acertainer que mes gens pansaient bien mes montures. Et
à peine eus-je mis le pied en l’écurie, laquelle en sa longueur était de droite
à gauche à mi-hauteur partitionnée, pour que les chevaux puissent s’envisager
l’un l’autre, mais sans se pouvoir mordre ni botter, j’ouïs, caressant ma
jument, sans même les voir, et sans qu’ils me vissent, que Poussevent et
Pissebœuf labouraient fort, et de l’étrille et de la brosse, et Pissebœuf, en
outre, de la langue, étant fort bien fendu de gueule, comme on a vu.
    — Poussevent,
dit-il, tâche à ne pas jouer aux dés ce soir, ni à la prime : que tu dois
t’ensommeiller comme poule en poulailler et tes forces refaire drues pour
demain.
    — Qu’est-cela ?
dit Poussevent. Et pourquoi donc ?
    — Pour ce
que demain, niquedouille, nous rentrons en Paris sans coup férir, ni bailler
estoc, ni tirer mousquet. Je le tiens d’un sergent : D’aucuns guillaumes
qui sont dedans vont nous déclore l’huis de la porte de Bucci tant est que nous
allons pénétrer dans la bonne ville aussi doucement qu’oiseau dans l’air,
anguille dans l’eau, ou homme dans femme…
    — Voilà
qui va bien, dit Poussevent pour qui toute parole de Pissebœuf était d’Évangile,
ne se trouvant pas même loin de s’apenser que si Pissebœuf l’appelait
« niquedouille » ou « sottard », c’est qu’il y avait ses
raisons.
    — J’ai
ouï dire, poursuivit Pissebœuf, que les Parisiens, à envisager du haut de leurs
murailles notre tant formidable armée, chient dans leurs chausses, la puanteur
étant telle, et si grande, que leurs dames les chassent du logis et mettent des
draps blancs aux lits pour nous y accueillir.
    — Voilà
qui est bien aimable, dit Poussevent d’un ton quelque peu déçu, mais où est la
conquête alors ? Deux ou trois petits forcements plairaient mieux à mon
appétit.
    — Ha çà,
Poussevent ! dit Pissebœuf, avec une neuve vertu, es-tu chrétien, ou
turc ? En outre, si le roi ne veut pas de sac, il n’a rien dit quant à la
picorée. Et j’ai quelque pensement qu’en leur mettant le cotel sur la
bedondaine, les marchands du Pont Saint-Michel nous vendront la soie et

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