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L'abandon de la mésange

L'abandon de la mésange

Titel: L'abandon de la mésange Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Arlette Cousture
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étonnée, regarda Élise en se
demandant si elle devait comprendre qu’elle avait failli à sa tâche de mère.
Mais, devant la détermination qu’elle vit dans le regard d’Élise, elle lui sut
gré de s’ouvrir ainsi à elle. Cette fois, elle lui caressa la joue et écrasa la
larme accrochée à ses cernes.
    – Et si ça fonctionne pas ? Si Côme
veut pas te recevoir ?
    – Maman, je rentre et je fais tout pour
que ça fonctionne, ou je suis pas une Lauzé…
     
    * * *
     
    M. Vandersmissen fut renversé lorsqu’il
vit la porte s’ouvrir et Élise poser ses valises. Voyant qu’il était seul dans
la cuisine, sa bru fronça les sourcils.
    – Côme n’est pas là, mon petit. En fait,
je le croyais avec toi.
    – Avec moi ?
    – J’avais cru comprendre que son
intention était d’aller te chercher.
    – C’était peut-être son intention, mais
il n’en a rien fait.
    – Bienvenue à la maison, mon petit.
    Cachant sa déception, Élise monta à l’étage et
s’installa dans la chambre qu’elle avait occupée l’été de ses dix-huit ans.
Elle rangea ses vêtements au même endroit, s’assit sur le lit, toujours aussi
grinçant, puis redescendit.
    – J’ai l’impression que la maison a bien
besoin de moi. Et vous ?
    M. Vandersmissen fit un large sourire et
déclara que la maison venait de changer de couleur.
    – Jamais vu un mois de novembre émerger
du noir…
    Il ouvrit les bras pour y accueillir sa bru,
qui fut presque heureuse de le voir pleurer. Ils demeurèrent enlacés comme deux
pantins aimantés tandis qu’il lui murmurait que son arrivée ressemblait à une
résurrection et qu’elle lui avouait qu’elle n’en pouvait plus d’être loin d’eux
dans une ville dont le cœur s’était arrêté.
    Le lendemain matin, Côme entra dans la
chambre, s’assit sur le bord du lit et lui lissa les cheveux, épars sur
l’oreiller.
    – Dors-tu, ma douce ? M’aurais-tu
rencontré à trois heures ?
    Élise ne bougea pas. Il ressortit à pas feutrés,
et, dès qu’il eut refermé la porte, elle ouvrit les yeux et sourit avant de se
retourner. « Trois semaines comme ça, mon Élise. Oublie qu’il est beau.
Jusqu’à preuve du contraire, ce n’est qu’un beau salaud. »
    Après deux jours, son beau-père, inquiet, lui
demanda si elle aimait encore son fils, ce à quoi elle répondit :
    – Le bon Dieu le sait et le diable s’en
doute.
    – Espérons donc que ton père et Mimine
ont de bons contacts…
    – Avec lequel des deux ?
    Il éclata de rire et elle l’imita. Il lui
demanda alors de l’appeler Marcel, ce qu’elle refusa, s’en disant incapable.
    – Alors, tu dis « Marcel » et
« vous ». J’y tiens.
    Ce soir-là, Côme arriva au moment où ils
passaient à table et il regarda Élise d’un air incrédule lorsqu’elle offrit à
« Marcel » de lui regarnir l’assiette d’une tranche de jambon.
    – Ça ne se fait pas, Élise. Dans les
familles belges, on voussoie les aînés. N’est-ce pas, papa ?
    – Il y a belle lurette que nous ne sommes
plus une famille belge, mon cher fils.
    Côme sortit sans s’être attablé – Élise
avait sciemment négligé de dresser un troisième couvert –, saisit une
pelle et nettoya l’escalier que décembre avait enduit d’une neige collante.
Élise demeura impassible, sous l’œil interrogateur de Marcel.
    Côme passa presque toute la soirée au salon, à
lire des articles sur les nouvelles tendances des jeunes agriculteurs ignares
qui achetaient de bonnes terres agricoles.
    – Tu te rends compte, papa, qu’ils
lotissent ces terres ? Où allons-nous ?
    – Vers la civilisation des loisirs.
    – C’est toi qui dis ça ?
    – Non. Les savants.
    À chaque réplique des conversations qu’il
avait avec son père, Côme regardait Élise pour deviner ce qu’elle pensait du
propos. Élise ne pensait rien, apparemment sourde. Elle préférait s’affairer
dans la cuisine, récurant les casseroles et les chaudrons noircis par le
veuvage. La maison était triste comme l’était Marcel, et Élise fut désolée
d’apprendre qu’il n’avait pas fleuri les balcons et le terrain.
    Le troisième jour après son arrivée, elle
demanda à son beau-père si elle pouvait peindre sa chambre. Étonné, Marcel
accepta, conscient que, à part de soigner les animaux, il n’y avait pas
beaucoup d’occupations sur une ferme en hiver pour une belle jeune femme de
vingt-sept ans. Ils se procurèrent donc

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