Labyrinthe
ce qu'il vît l'état dans lequel il l'avait mise, et qu'il apprît qu'il avait été floué.
Reposant sa tasse, Authié retroussa ses manches. La seule option qui lui était offerte consistait à rencontrer François-Baptiste en tête à tête, pour lui dire qu'il livrerait le manuscrit et O'Donnell à Marie-Cécile à temps pour la cérémonie prévue au pic de Soularac.
Il déplorait le fait de n'avoir pas retrouvé l'anneau, malgré sa conviction que Jeanne Giraud l'avait remis à Audric Baillard, et que ce dernier viendrait de son propre gré à la grotte de Soularac. Dans son esprit, il ne faisait aucun doute que le vieil homme se trouvait quelque part, en train d'observer le déroulement des événements.
Alice Tanner représentait le nœud gordien de toute l'affaire. Le disque dont O'Donnell avait parlé occupait une bonne part de ses pensées, essentiellement parce qu'il en ignorait la signification. En outre, Tanner s'était révélée incroyablement futée pour se mettre hors d'atteinte. Elle avait échappé à Domingo et Braissard au cimetière. La veille, les deux ex-policiers avaient perdu la trace de sa voiture pendant plusieurs heures avant de découvrir qu'elle se trouvait dans un dépôt de Hertz, à Blagnac.
Les doigts fuselés d'Authié se refermèrent autour de son crucifix. À minuit, la messe serait dite. Les hérétiques seraient éradiqués ainsi que leurs écrits.
Au loin, les cloches de la cathédrale en appelaient à la foi des ouailles du vendredi. Authié consulta sa montre-bracelet : il voulait se rendre à confesse. En état de grâce parce que absous de ses péchés, il s'agenouillerait devant l'autel pour communier. Dès lors, il serait prêt, corps et âme, pour accomplir les desseins de Dieu.
Will perçut que la voiture ralentissait pour s'engager sur un chemin de ferme. Le conducteur progressait prudemment, serpentait pour éviter ornières et fondrières. À chaque cahot, Will sentait ses mandibules battre contre son crâne, alors que le véhicule bringuebalant tressautait vers le sommet de la colline.
Ils finirent par s'arrêter. Et mettre au point mort.
Au moment où les passagers débarquèrent, la voiture oscilla. Il entendit vaguement le claquement des portières, semblable à des coups de feu, suivi du verrouillage central. Ses mains liées derrière le dos et non devant lui rendaient la tâche difficile, cependant il se contorsionna les bras pour desserrer ses entraves. Il ne fit que de minces progrès. La nausée le reprenait. Il avait aux épaules une barre douloureuse provoquée par l'inconfort prolongé de sa position.
Contre toute attente, le coffre s'ouvrit. Le cœur battant, Will se tint immobile, alors que l'on défaisait les attaches du conteneur en plastique. L'un de ses ravisseurs le saisit sous les bras, l'autre sous les genoux. Tiré hors de sa boîte, il fut posé sur le sol sans ménagement.
Malgré son état semi-comateux, Will eut conscience de se trouver à des lieues de toute civilisation. Le soleil était brûlant et la vivacité de l'air évoquait de grands espaces et l'absence de toute habitation. Un grand silence régnait. Pas de voitures. Pas âme qui vive. Will cligna des yeux, tenta de fixer son regard, mais la lumière, trop éblouissante, ne laissait place qu'à une grande tache blanche.
L'aiguille hypodermique s'enfonça dans son bras et la drogue familière circula dans ses veines. Les hommes le mirent rudement sur ses pieds et entreprirent de le hisser en haut de la colline. La pente était raide, il entendait leur souffle laborieux, sentant leur transpiration tandis qu'ils luttaient dans la chaleur.
Il perçut le raclement de ses pieds sur les pierres et les graviers, leur trébuchement sur des marches creusées dans le raidillon, la molle caresse d'une surface herbeuse.
Alors qu'il sombrait dans une quasi-inconscience, il comprit que le sifflement qui emplissait sa tête n'était autre que le soupir fantomatique du vent.
66
Le commissaire divisionnaire de la police judiciaire des Hautes-Pyrénées fit irruption dans le bureau de l'inspecteur Noubel et claqua la porte derrière lui.
« J'espère que vos raisons sont valables, Noubel.
— Merci d'être venu, monsieur. Je n'aurais pas interrompu votre déjeuner si notre affaire avait pu attendre.
— Avez-vous identifié les meurtriers de Biau ? grommela le divisionnaire.
— Il s'agit de Cyrille Braissard et de Javier Domingo, affirma Noubel avec un geste en
Weitere Kostenlose Bücher