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Labyrinthe

Labyrinthe

Titel: Labyrinthe Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Kate Mosse
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s'étendaient aussi loin que le regard pouvait porter. À leur droite, des vignobles, certains entretenus, d'autres laissés à l'abandon derrière d'infranchissables haies. À gauche s'étendait une mer de tiges émeraude des champs d'orges, qui seraient d'or au temps des moissons. Des manants, le visage obscurci sous de grands chapeaux de paille étaient déjà à leur rude labeur, moissonnant les derniers blés de la saison, dans le balancement pendulaire de leurs faux captant les premiers rayons du soleil.
    Au-delà de la rive, bordées de chênes et de saules, se déployaient les profondes et silencieuses forêts survolées par les grands aigles. Le cerf, l'ours et le lynx y abondaient, ainsi que loups et renards au cœur de l'hiver. Surplombant les basses-terres et les halliers, verdoyaient les sombres étendues sylvestres de la Montagne Noire où le sanglier était roi.
    Avec le ressort et l'optimisme propres à la jeunesse, le vicomte Trencavel se montrait d'une humeur joyeuse, échangeant de plaisantes anecdotes ou écoutant la narration d'exploits passés. Il palabrait avec ses hommes, quant à savoir, du lévrier ou du mastiff, lequel était meilleur chasseur, ergotait sur le prix d'une bonne reproductrice, cancanait à propos de qui avait gagé quoi aux fléchettes ou aux dés.
    Nul n'évoquait l'objet de leur expédition, non plus ce qu'il adviendrait si le vicomte échouait dans sa tentative de conciliation auprès de son oncle.
    Un cri rauque monté de l'arrière-garde incita Pelletier à se retourner, pour voir Guilhem du Mas chevauchant de front avec Alzeau de Preixan et Thierry Cazanon, chevaliers de Carcassonne et adoubés comme lui durant les fêtes de Pentecôte.
    Conscient de l'opprobre muet que lui adressait l'intendant, Guilhem redressa la tête et, se rengorgeant, soutint insolemment le regard qui le scrutait. Les deux hommes s'affrontèrent quelques instants ainsi, puis le jeune homme se détourna, avec un hochement de tête de connivence affectée. Pelletier sentit son sang bouillir dans ses veines, d'autant qu'il ne pouvait que constater son impuissance.
     
    Le vicomte et son arroi traversèrent les plaines durant de longues heures. Les conversations retombèrent et s'éteignirent complètement, alors qu'à l'exaltation qui les accompagnait au départ de Carcassonne succédait un silence lourd d'appréhension.
    Le soleil montait toujours plus haut dans le ciel. En raison de leur robe de laine noire, les prélats souffraient le plus de la chaleur. L'évêque avait le front ruisselant de sueur, et le visage boursouflé de Jehan Congost avait tourné au rouge marbré qui n'était pas sans rappeler la couleur des digitales. Les criquets stridulaient dans les herbes brûlées ; les moustiques piquaient les poignets et les mains, et les mouches n'avaient de cesse de harceler les chevaux.
    Le vicomte attendit que le soleil fût au zénith pour conduire sa troupe à l'écart du chemin et décider enfin une pause. L'on choisit une clairière non loin d'un cours d'eau, où les bêtes pouvaient paître et s'abreuver en toute sérénité. Les écuyers dessellèrent les montures et rafraîchirent les capes en les humectant à l'aide de feuilles de saule trempées dans l'eau. Des feuilles de patience et des cataplasmes de moutarde furent appliqués sur les coupures et les morsures d'insectes.
    Retirant leurs bottes et leurs armures, les chevaliers se lavèrent le visage et les mains rendus poisseux par la sueur et la poussière. Un petit groupe de servants fut délégué auprès des fermes voisines pour faire provision de pain, de saucisses de fromages de chèvre et d'olives, ainsi que de vin du cru.
    Alors que se répandait la nouvelle du passage du vicomte, l'on vit affluer autour du campement improvisé fermiers et manants, vieillards et jeunes filles, tisserands et brasseurs, tous porteurs de victuailles en l'honneur de leur seigneur et maître : volailles, poissons, paniers de prunes et de cerises.
    Pelletier s'en trouvait fort rebroussé. Tant de sollicitude les retardait, leur faisait perdre un temps précieux. Leur restait à parcourir encore un long chemin avant de voir les ombres s'étirer et d'établir le campement pour la nuit. Sauf qu'à l'exemple de ses parents, Raymond-Roger se plaisait à côtoyer ses sujets, et aurait tout à plein refusé de les renvoyer.
    « C'est pour cela qu'il nous faut ravaler notre orgueil et tenter de nous raccommoder avec mon oncle, décréta-t-il

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