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Lacrimae

Titel: Lacrimae Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Andrea H. Japp
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lèvres et répondit d’un ton léger :
    — À l’instar de tous. Et puis… les êtres de ma… condition ont intérêt à connaître bien leurs chasseurs. Et ?
    — J’en suis venu à la conclusion que vous aviez un lien, direct ou non, avec ces meurtres. Je… N’ayant nulle certitude, j’ai tu ces déductions au seigneur bailli par crainte de… représailles contre vous. Je ne pourrai garder le silence très longtemps.
    Igraine soupira en attrapant une dernière miette de pain prise dans la laine de sa housse.
    — Un lien ? Tout est lié.
    L’exaspération gagna le mire.
    — Je connais votre goût pour les énigmes. Toutefois, le temps nous presse et il ne nous est pas favorable. La vérité, madame ?
    — Je vais porter votre perceptible agacement au comble, messire. Tout est énigme, la vie, la mort et ce qui se tient entre et au-delà. La vérité ? Laquelle ?
    Druon la fixa, peu amène, se demandant pour quelle raison il tenait tant à ce qu’elle soit épargnée. Assez avec ses logogriphes et ses devinettes. La voix tendue de rage, il déclara :
    — Trois hommes ont été poignardés, court donc un assassin. C’est une vérité ! Deux de ces hommes ont de toute évidence fait l’objet d’une vengeance, que je pense liée à une certaine Mabyn. Le dernier était une pauvre âme qui n’avait jamais porté tort à personne. Deuxième vérité. Aussi, ne comptez pas me noyer dans des raisonnements spécieux mais fallacieux. Vous feriez preuve de mépris pour mon esprit que vous connaissez pourtant.
    La voix enfantine bouda :
    — Votre pardon. Oh, je perçois votre ire envers moi. Cela me désole. Je… Je sens ce que vous tentez de faire… Me protéger. Je vous en suis d’autant plus reconnaissante qu’il me fut toujours demandé l’inverse : protéger.
    — Avez-vous…
    — Non, jamais. (Un rire brisa net son sérieux.) Si j’avais occis ces hommes, j’aurais fait preuve de bien plus de subtilité, au point que vous auriez toujours cru – en dépit de votre excellence – qu’ils avaient trépassé de belle mort naturelle.
    — L’auteur ? Car vous le connaissez, j’en mettrais ma main au feu.

    La mage baissa le visage et ses longs cheveux très frisés, aussi bruns que les ailes de son freux, balayèrent ses genoux.
    — Comprenez… Mabyn ne tenait point à persister plus longtemps céans. Car ne doutez pas qu’elle connaissait son destin. L’auteur de ces meurtres ignorait sa détermination à… partir, et je ne lui cherche pas d’excuses. Trop alourdi par son humanité, il y a vu une odieuse injustice, une affreuse machination, avec Mabyn en victime, alors qu’elle en fut sans doute l’auteur. La haine a englouti son cœur. Il a frappé.
    — Pourquoi ai-je la déplaisante sensation de n’entendre qu’à moitié ce que vous dites ? observa Druon.
    — Parce que nos repères divergent. Les vôtres appartiennent au monde réel, prétendu tel. Les miens sont issus des signes. Ils sont fluctuants.
    — Qui était-elle ? Cette Mabyn ?
    — Je ne sais trop. L’une des représentantes de ma race, encore plus affaiblie que moi par votre monde. Ou plutôt, ce que vous avez fait de notre monde. Mabyn m’a partiellement élevée et transmis son savoir.
    — Pourtant, vous ne semblez pas…
    — Affectée par son supplice ? le coupa Igraine. Oh ! si, tous les supplices me répugnent. Comme vous, celui de votre père. Cela étant, si Mabyn n’est plus ici, elle est ailleurs.
    — J’aimerais tant…
    — Comprendre ? Mire, cher mire… détrompez-vous, vous n’en n’avez pas véritablement envie. Il vous faudrait alors renoncer à ce qui constitue votre force, votre implacable intelligence, et j’y verrais grand dommage pour vous, ceux que vous sauvâtes et ceux qui auront besoin de votre science et de votre lucidité. Jehan Fauvel nous avait un peu cernés. Sans doute y parviendrez-vous, plus loin dans votre histoire.
    Le cœur de Druon s’était emballé. D’une voix heurtée, il demanda :
    — Vous connaissiez mon père ?
    — De… réputation.
    Il sut qu’elle mentait mais qu’il était inutile de tenter de lui extirper la vérité. Elle continua :
    — Pourquoi ne pas poursuivre votre admirable route pour l’instant ? Le moment venu… Une autre se dessinera peut-être devant vous. (Elle biaisa.) Mais revenons-en à votre urgence : le seigneur bailli. Borée le crapuleux 2 , le scélérat et le parjure a été occis après

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