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Lacrimae

Titel: Lacrimae Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Andrea H. Japp
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une vie d’avarice sans compassion et de minables escroqueries. Ce benêt de Charon ne s’est jamais interrogé sur le bien-fondé d’une exécution et gobait ce qu’on lui racontait, tel un crapaud gobe une mouche, pour peu que son plaignant ait beau pourpoint et fleure bon les eaux de bouche et de cheveux 3 . Ils ont été occis. Bah, la belle affaire ! Leur trépas ne changera pas la vie de grand monde.
    À l’instant même où elle prononça cette dernière phrase, Igraine eut l’intuition qu’elle se trompait gravement, sans toutefois parvenir à définir son erreur.
    L’insolence, parfois indécente, d’Igraine avait toujours mis Druon mal à l’aise, tant il sentait qu’il ne s’agissait pas de galéjades.
    — Madame, ils sont morts…
    Igraine déclara d’un ton irrité, qui avait perdu en légèreté :
    — Oui-da ! À l’instar de tant d’autres avant eux, sans compter ceux qui suivront ! Roupie que tout ceci. Dieux, que d’histoires pour peu ! Nous nous égarons, et je dois prendre bientôt congé…

    Elle se tourna vers lui et son déplaisant regard jaune plongea dans celui de Druon. Arthur le freux sautilla sur son épaule, penchant à son tour la tête vers le mire, l’inclinant de droite puis de gauche, ouvrant large le bec sans que n’en sorte un son.
    Nicol. L’erreur, la faute était Nicol. Elle murmura :
    — Nicol… Nicol que vous jugiez tous simplet quand il savait tant. Nicol que comprenaient les arbres, l’eau, les petites créatures que vous massacrez sans même les voir. Nicol n’aurait jamais dû mourir. Nicol est un impardonnable, irrécupérable péché. Le meurtrier le sait. Un péché qui lui ronge l’âme et la vie. Un péché qui atteste qu’il n’est plus de nous, de moi. Un péché inspiré par la peur, la lâcheté. Impardonnable et irrécupérable, vous dis-je.
    — Il ?
    — Il !
    — Il n’ira pas impuni, dame Igraine. J’en fais le serment. De grâce, son nom et où le trouver. Pour votre propre sauvegarde.

    Elle hocha la tête en signe de dénégation, un sourire attristé flottant sur ses lèvres. La vision s’imposa à nouveau à son esprit : un hurlement. On venait d’enflammer les simulacra . Un hurlement de terreur. Avéla ! Un éclair, un autre. Le miroitement de lames sous le soleil. Soudain, la garde de l’un des couteaux fichés dans l’humus noir, au manche fait de plaquettes de bois serrées d’une cordelette, pleura. Des larmes de sang. Une pluie de larmes de sang.
    Igraine comprit ce qu’elle refusait d’admettre depuis sa transe. Un futur. Avéla périrait si elle n’inclinait pas l’histoire, donc le cours du temps. Il ne s’agissait plus d’une simple histoire de justice humaine qui, au fond, lui importait peu, mais de la survie d’une représentante de sa race. Une représentante importante.
    — Jamais. Jamais je ne le dénoncerai. Il a été de moi, de nous. En revanche, je puis m’attacher à le convaincre de se rendre, d’aller vers sa mort charnelle.
    — Sur votre âme ?
    — Sur quoi, sur qui voulez-vous que j’engage mon âme ? Mes dieux ? Ils sont, pour la plupart, à l’agonie. Le vôtre ? Il ne me sied guère. Que veut-Il au juste ? Qu’exige-t-Il de ses fervents adeptes ? Votre Dieu m’est, le plus souvent, incompréhensible.
    — Vous blasphémez, madame, murmura Druon.
    — Non pas. Je blasphémerais si je niais Son existence. Malheureusement, je la ressens, la supporte chaque jour, contrairement à nombre d’entre vous. Comprenez, mire. Nos dieux étaient au fond plus simples, même s’ils étaient bien plus troubles et exigeants. Donnant donnant. Des offrandes, des efforts et des sacrifices, en échange de protection.

    Elle se redressa d’un fluide mouvement, s’emmitoufla dans les pans de son mantel et conclut :
    — À vous revoir, messire Mire.
    — Un instant, je vous prie. Je… Me suivez-vous, madame ?
    Un sourire gamin 4 étira les lèvres de la mage. Pourtant, il fut certain qu’elle allait à nouveau semer l’une de ses phrases à double entente, lourde d’un sens sur lequel elle refuserait de s’expliquer :
    — Non pas, messire mire. Je vous précède. Et depuis de longues années. À vous revoir. Bientôt.
    Elle disparut derrière un bosquet d’arbres, sans que ses pas ne produisent un bruit. Druon sut qu’il était inutile de la poursuivre. Jamais il ne la retrouverait si elle ne le souhaitait pas.
    Ne lui restait à espérer qu’une

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