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L'affaire du pourpoint

L'affaire du pourpoint

Titel: L'affaire du pourpoint Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Fiona Buckley
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les Cecil avaient trouvé un foyer pour ma fille et supposaient qu’une amitié de longue date unissait nos familles. Il y eut aussi des regards amers, car quelques-unes des dames de la Chambre privée jugeaient malséant qu’une simple dame de la salle du trône eût ses entrées chez le secrétaire d’État.
    Élisabeth, qui savait quel dessein motivait cette invitation, me souhaita un agréable après-midi. Je m’adressai alors à Kat Ashley :
    — Madame… Dame Ashley… Il y a une question, une… question très personnelle… et très pressante… sur laquelle j’ai besoin de consulter Sa Majesté. Puis-je solliciter un entretien privé ?
    Je rencontrai le regard d’Élisabeth et tentai d’exprimer par le mien l’importance de cette requête. Je tenais à ce que cette entrevue ait lieu avant le dîner chez les Cecil. Si tout se passait bien, je n’aurais plus à y aller.
    — Nous verrons, répondit Kat Ashley d’un air sévère, mais Élisabeth comprit mon message silencieux et esquissa un signe de tête.
    — Nous vous enverrons chercher, me dit-elle.

CHAPITRE III

Jackdaw
     
    Plus tard ce jour-là, Kat Ashley me conduisit dans les appartements privés de la reine. Élisabeth était à son bureau, où elle s’asseyait souvent pour examiner le courrier et les rapports, ou pour lire les ouvrages d’histoire, de philosophie et de théorie politique dont elle était friande. Sur sa demande, Kat nous laissa. J’exécutai ma plus profonde révérence et formulai ma requête. Pendant que j’attendais, le silence se prolongea et mon cœur devint lourd.
    Le temps avait changé. La pluie battait contre les hautes fenêtres à vitraux en forme de losanges, derrière la tête rousse d’Élisabeth, et le ciel était si sombre qu’elle avait besoin pour lire de plusieurs chandelles sur sa table de travail. Malgré le feu dans la cheminée, elle portait un châle.
    — Ainsi, dit-elle enfin, vous voulez déserter, dame Blanchard.
    — Pas exactement, Votre Majesté. Cela me peine de vous quitter, mais… je veux vivre aux côtés de mon mari.
    — Bien qu’il soit un ennemi de notre personne et de ce royaume ? riposta-t-elle de but en blanc.
    Matthew ne se considérait pas comme tel, puisque, à son sens, rétablir l’ancienne religion et Marie Stuart en Angleterre constituait le geste le plus généreux qu’il pût accomplir envers le pays natal de sa mère. Bien entendu, je ne tentai pas de justifier ses motifs devant la reine. L’amour non plus ne pouvait passer pour un argument, mais eût ressemblé à un aveu de faiblesse. Je finis par me retrancher derrière une simple vérité :
    — Madame, il est mon époux. J’ai juré devant Dieu.
    Élisabeth semblait lasse. Elle avait ôté ses bijoux et sa tenue de cérémonie argent et blanc ; le châle était drapé sur une robe ample, en soie gris cendré. Toute sa malice s’était dissipée. Son visage pointu, grave et fermé, paraissait plus vieux que son âge.
    — Et si je disais non ? me demanda-t-elle.
    Je ne répondis pas aussitôt, et ses yeux, brun doré sous les arcs fins de ses sourcils, se firent pénétrants. Élisabeth pouvait se montrer redoutable. On se rappelait alors de qui elle était la fille. Ce matin-là, j’avais vu en elle un chat joueur, mais c’était la sous-estimer. Si elle évoquait un félin, c’était une lionne, née d’un lion parmi les Tudors.
    — Je vous ai posé une question, Ursula, reprit-elle enfin. Quelle est votre réponse ?
    — Votre Majesté, je ne souhaite vous déplaire en aucune façon, mais… Je vous supplie de me libérer de ma charge et de m’autoriser à emmener ma fille dans la vallée de la Loire, pour y rejoindre mon époux.
    La pluie tambourinait contre les carreaux. Le vent se levait. J’avais regardé des cartes de France et je savais que la vallée de la Loire s’étendait beaucoup plus au sud que l’Angleterre. Le climat y serait doux, les hivers moins rudes.
    La reine remarqua, pensive :
    — Votre premier mari, Gerald Blanchard, secondait Sir Thomas Gresham aux Pays-Bas. Sous couvert de tractations financières, il était engagé dans… Dirons-nous des activités secrètes ? J’imagine que c’est auprès de lui que vous avez acquis les talents qui se sont avérés si précieux pour nous. Ai-je raison ?
    — Oui, madame.
    — Quand je dis « précieux », je pèse mes mots. Vos services ont été très utiles, Ursula, et je répugne à m’en

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