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L'affaire Nicolas le Floch

Titel: L'affaire Nicolas le Floch Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Jean-François Parot
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devinait pour l'instant qu'un amas informe de cuir et de métal.
    — Mes chers confrères, monsieur le commissaire, dit Borda, votre attention. Notre ami ici présent, qui n'est pas un orateur, m'a demandé de vous présenter son invention. Je vais donc le faire comme votre rapporteur. Il s'agit d'une nouvelle machine permettant de rester sous l'eau pendant au moins une heure sans aucune communication avec l'extérieur. Elle est composée d'une sorte de mannequin de cuir, un fourreau conformé exactement comme un homme. Celui qui tente l'immersion s'introduit dedans en chemise ou en camisole par une ouverture pratiquée au col. Ainsi affublé, il reçoit un casque de cuivre...
    Le valet tendit une grosse boule de métal étincelant que les savants considérèrent avec curiosité.
    — ... Qui lui emboîte toute la tête et, par un large collet du même métal, vient s'adapter sur le cuir gras auquel on le fixe par des écrous étroitement vissés. Vous pouvez observer qu'il existe des ouvertures en verre, deux pour les yeux et une troisième au front. Au sommet du casque sont deux tuyaux l'un sur l'autre, avec un conduit de cuir à chacun du diamètre d'une grosse bougie. Ces deux tuyaux, d'environ quatre pieds de long, vont aboutir à une boule de cuivre. Cette boule, m'a-t-on expliqué, possède un ressort destiné à être remonté au moyen d'une clef. L'air qui y est contenu est poussé par le canal intérieur jusqu'à la bouche du plongeur et celui raréfié se porte en haut par le conduit supérieur, où il s'épure dans la boule avant de revenir à la bouche.
    — Mais mon cher, intervint M. Leroy, ces tuyaux en cuir se peuvent écraser ou, sous la pression, se coller. Qu'adviendra-t-il alors du malheureux enfermé dans cette armure ?
    — La chose a été prévue, répondit Borda. Le cuir des tuyaux est soutenu à espaces réguliers par des anneaux de fer qui permettent d'éviter l'inconvénient que vous soulevez à juste titre, mon cher confrère.
    — Mais au fait, demanda l'abbé Bossut en ajustant ses gants, que contient cette boule de cuivre, qui parvienne à épurer l'air carbonique vicié par la respiration ?
    — Je ne saurais vous répondre. Notre ami prétend prouver l'efficacité de sa machine avant que de consentir à révéler le mystère de son invention.
    Il y eut des murmures. L'homme releva la tête comme par défi et, un instant, Nicolas crut qu'il allait se retirer.
    — Et à quoi servira cet appareil ? reprit M. Leroy. Apportera-t-il à notre siècle de raison un progrès méritoire et utile à l'espèce humaine, car c'est cela, et cela seulement, qui parviendra à ouvrir les portes et...
    Borda parla à l'oreille de Nicolas.
    — Dieu nous garde de ce philanthrope bavard ! C'est un brave homme, et heureusement il n'achève jamais son propos.
    Puis, se tournant vers l'assistance, il expliqua :
    — Outre qu'il sera fort utile pour examiner sans cale sèche l'état de la coque de nos vaisseaux, il devrait permettre d'étudier le fond des mers, leur faune et leur flore. Ce ne sont là que quelques-uns des objets qui viennent à l'esprit dans les limites de notre imagination. Nul doute que d'autres perspectives s'offriront, auxquelles notre ami a, lui-même, songé.
    L'homme se crut interpellé et se lança dans un discours d'une voix sourde et pressée.
    — J'ai servi comme forgeron de marine durant vingt ans, déclara-t-il. J'avions dessiné et fabriqué la machine non pour aller godailler sous l'eau à des riens. Loin de moi l'idée de trigauder 52 des messieurs aussi foutrement savants que vous. Je vas vous dire. J'vivions sur une côte près de Cherbourg où les naufrages sont fréquents. Tant et tant de beaux navires qui s'y fracassent. Je me suis dit qu'étions bien bête de laisser perdre les cargaisons, que c'en était désolant de laisser toute cette richesse à l'eau. Ainsi, que si j'avions, par temps clair, moyen d'aller dans les débris pas très loin de la surface, j'récupérerions bien quelque chose. Les temps sont bien durs...
    La canne de M. Leroy frappait le sol d'une main impatiente. Pressentant un éclat, le chevalier de Borda jugea utile d'abréger le discours du bonhomme.
    — Je crois qu'il nous faut passer à l'œuvre, dit-il. Vous savez ce que la police attend de vous et qui, pour une part, justifiera de l'intérêt de votre invention.
    L'homme retira ses souliers et ses culottes. La combinaison de cuir gisait, informe, sur le sol. Aidé par son

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