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L'Amour Et Le Temps

L'Amour Et Le Temps

Titel: L'Amour Et Le Temps Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Robert Margerit
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par les séides d’Orléans, peu importe. Aux yeux d’hommes comme toi et moi, le résultat compte seul. Il me paraît trop exactement conforme au souhait de tes amis Barnave, Du Port et Lameth, pour que leur volonté n’y ait pas influé contre celle de la faction orléaniste. Comme le 14 juillet, le 6 octobre marque une défaite de ces conspirateurs. Tous les patriotes s’en réjouissent. Nul homme pur ne pourrait vouloir d’un Philippe d’Orléans ni des moyens qu’il emploie ou laisse employer par ses agents. Avaient-ils réellement, à en croire les avertissements de Mirabeau, l’intention de violer la Reine et de tuer le Roi ? Ils semblent avoir fait tout le possible à cette fin. Si tel était leur dessein, il n’en est fallu de bien peu qu’il ne réussisse : de l’épaisseur d’une porte et de l’honnêteté des gardes-françaises. Les émeutiers qui assommaient les gardes du corps dans le palais sont parvenus jusqu’à la chambre de Marie-Antoinette surprise au saut du lit, en chemise. Des gardes-françaises incorporés à la garde nationale arrivèrent juste à point pour donner main-forte et faire sauver la Reine à peine vêtue. Il n’y eut d’éventré que son lit. Pendant ce temps, le grand général La Fayette dormait. Mais je brouillonne tout, il faut reprendre de plus haut.
    « Dans l’ordre chronologique, voilà comment les choses se sont passées. D’abord, samedi il y avait eu de l’agitation dans Paris. Un avocat aux conseils du Roi : Georges d’Anton, fort ami, paraît-il, de ton singulier ami Desmoulins et président de l’Assemblée du district des Cordeliers, avait mis celui-ci en effervescence. Le rédacteur de L’Ami du peuple, dont ton petit Camille s’est bien gaussé en disant qu’il se prend pour la trompette du Jugement dernier, ne craignait pas d’imprimer cette adjuration quasi prosopopéique : « Ô morts de la Bastille, levez-vous ! » Au demeurant, tout le monde était indigné par l’injure faite à la cocarde nationale et par ces agapes de Lucullus insultant à la misère, à la faim. Dimanche, des mouvements se produisirent au Palais-Royal et dans les rues. Des femmes : ouvrières en chômage, poissardes, catins probablement soudoyées par les agents d’Orléans, se rassemblèrent en criant qu’elles iraient demander du pain au Roi, qu’elles ramèneraient celui-ci. On clamait : « Mort à la Reine ! Mort aux aristocrates ! » Lundi matin, il y eut du trouble à l’Hôtel de ville où l’abbé Lefèbvre, celui-là même qui a si vaillamment défendu et distribué la poudre, le 14 juillet, fut bel et bien pendu au clocheton. Le peuple n’est pas moins ingrat que les rois. Par bonheur, une femme coupa la corde à temps. Le brave Lefèbvre eut la chance de choir de vingt-cinq pieds dans une salle au-dessous sans se faire aucun mal.
    271« Nous, cependant, nous délibérions non sans âpreté sur la réponse envoyée par le Roi au sujet des articles de la Constitution. Le projet auquel tu as mis la main avait été voté en partie. Pour gagner du temps pendant que continuait la discussion, on avait soumis au Roi les premiers articles. Sa réponse était, comme toujours, dilatoire : des lois constitutives, prétendait-il, doivent être jugées dans leur ensemble. En considération des circonstances alarmantes, il accéderait néanmoins à ces articles, à condition que le pouvoir exécutif lui fût remis tout entier. Sur quoi Robespierre se dresse comme un ressort, et, de sa voix aigre, déclare que la réponse de Sa Majesté est contraire aux principes (toujours ses principes !), qu’il n’appartient pas au Roi de consacrer la Constitution que la nation entend se donner. L’abbé Grégoire approuve. Du Port prend la parole à son tour, mais biaise et revient sur le scandale des banquets en les qualifiant d’orgies insensées dont la prudence s’effraie et dont la misère murmure. Pétion l’appuie. Au milieu des vociférations de la droite, il accuse les gardes du corps d’avoir insulté l’Assemblée. En somme, après l’intervention de Robespierre, on était passé tout à coup de la discussion raisonnable à l’une de ces explosions de passion comme nous en avons déjà tant vu. Les tribunes hurlaient, conspuant les aristocrates. Comme toujours, les plus excités étaient des grands seigneurs. Le comte de Barbentane, le fils de Philippe d’Orléans : le duc de Chartres, réclamaient à qui mieux mieux des

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