L'Anneau d'Atlantide
cheveux blancs tombaient de sa coiffure. Son visage recuit par le soleil n’était qu’un lacis de rides entourant une bouche privée de la majeure partie de ses dents mais ses yeux, incroyablement jeunes, incroyablement bleus, reflétaient le ciel.
En l’apercevant, Hakim courut s’agenouiller devant lui en posant à ses pieds le sac qu’il portait. Le vieil homme mit alors ses deux mains sur sa tête avec une grande douceur. Les trois autres s’arrêtèrent à quelques pas, se contentant de regarder :
— Il me semble vous avoir entendu dire que c’était son grand-père ? demanda Aldo à Marie-Angéline.
— Je l’ai cru d’abord, mais en fait il est peut-être celui de tous les orphelins du pays. Hassan – c’est son nom ! – est si âgé que personne ne se souvient de l’avoir connu jeune. Hakim prétend qu’il est là depuis très, très longtemps.
— Vous n’essayez pas de me faire croire qu’il est immortel ? émit Adalbert, caustique.
— Non mais, toujours selon Hakim, lorsqu’il mourra, son corps disparaîtra et un autre, moins vieux, prendra sa place. Il en serait ainsi depuis la nuit des temps. Inutile d’ajouter qu’il est vénéré dans toute la région…
— De quoi vit-il ? intervint Aldo. Il n’y a rien dans le coin que cet acacia.
— Là-bas, sur la rive du Nil, se trouve un village. Ce sont ses habitants qui veillent à ce qu’il ne manque de rien. D’ailleurs il y a un puits derrière ce pan de mur écroulé dont on ne sait ce que ce pouvait être… Maintenant, c’est à moi d’aller le saluer. Il m’accueille habituellement avec bonté et nous avons souvent parlé ensemble. Il dit des choses extraordinaires… Ah, j’allais oublier…
Elle tendit à Adalbert la croix d’orichalque enveloppée d’une étoffe de soie :
— Quand je vous dirai d’approcher, vous le saluerez, respectueusement, puis vous lui montrerez ceci ! En outre c’est l’occasion de passer l’Anneau à votre doigt…
Le vieil homme ayant tourné le regard vers elle en souriant, elle s’avança et s’agenouilla près de lui, offrit ses mains qu’il prit dans les siennes dans un geste plein de chaleur.
— Je me demande, chuchota Adalbert, ce que penseraient ses copines de la messe de six heures à Saint-Augustin si elles pouvaient la voir en ce moment ?
Aldo le dévisagea. L’ancien Adalbert allait-il enfin refaire surface ? C’était tellement inattendu, surtout à cet instant un rien solennel, qu’il aurait pu en pleurer de joie ! Mais déjà, on leur faisait signe d’approcher.
Ils s’inclinèrent tandis que Plan-Crépin les présentait en ajoutant qu’ils étaient ses amis les plus chers. L’aisance dont l’incroyable fille faisait preuve en maniant l’arabe – une acquisition récente pour elle ! – les sidérait. Puis Adalbert découvrit la croix ansée et la présenta à plat sur sa main au vieillard sur lequel elle eut un effet magique : ses yeux s’agrandirent et il posa dessus ses deux paumes un peu tremblantes. Après quoi, il se leva, s’inclina, saisit son bâton et se mit en marche vers les grands rochers en faisant signe aux autres de le suivre. Lentement, il gravit la pente relativement douce mais qui allait en s’accentuant. Ici, plus de sentier. Le vieillard traçait son chemin dans le sable durci mêlé de cailloux sans marquer la moindre hésitation.
On monta ainsi pendant près d’une demi-heure avant d’atteindre le pied de la muraille naturelle, mais Hassan ne s’y arrêta pas, poursuivant sa route en la contournant. Enfin se présenta une faille si étroite qu’il semblait impossible de s’y faufiler. Pourtant, il renouvela son invitation à le suivre et s’y introduisit avec d’autant moins de peine qu’elle s’élargissait presque aussitôt. Pas beaucoup il est vrai, mais suffisamment pour qu’Adalbert, le plus épais des quatre, réussisse à s’y introduire.
C’était en fait une caverne assez obscure dont le sol pierreux s’abaissait graduellement et paraissait plonger dans les entrailles de la terre. Le guide prit alors dans sa robe élimée un briquet et une chandelle qu’il alluma puis, levant le bras, il éclaira quelque chose : l’esquisse d’une croix ansée tracée en creux dans le rocher, et fît signe à Adalbert d’approcher. Déjà celui-ci l’avait sortie de son sac et allumé une torche
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