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L'année du volcan

L'année du volcan

Titel: L'année du volcan Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Jean-François Parot
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apaisement utile. Les éléments de l’affaire allaient poursuivre leur lente maturation. Dans le mystère du sommeil, ils se heurteraient, s’assembleraient, se diviseraient et certains, même, s’effaceraient. Au petit matin, ne subsisterait qu’une épure qui n’offrirait encore aucune solution, mais poserait les bases d’une nouvelle réflexion, celle-là plus solidement fondée.
     
    Rue Montmartre, Catherine à son habitude veillait près de son potager. Elle surveillait une bassine de cuivre dans laquelle cuisait à petits bouillons une confiture de groseilles à maquereau qu’elle écumait de temps en temps. Il fallait les choisir petites, vertes encore, avant que les pépins ne soient tropformés La recette provenait de Mme Sanson, cuisinière émérite, et la récolte de quelques buissons du jardin de Noblecourt. Pluton, qui sommeillait aux pieds de Catherine, ouvrit un œil curieux, bâilla, s’étira et se rendormit, rassuré de reconnaître son maître. Mouchette, qui avait fait son esclave du molosse, dormait, béate, entre ses larges pattes.
    Plusieurs coups de canne énergiques ébranlèrent le plafond. Le maître de maison, qui ne dormait pas encore, avait entendu la voiture et le bruit de la porte. Il réclamait la présence de Nicolas, qui monta aussitôt et le trouva dans son fauteuil habituel.
    — Ah ! Mon ami, je suis heureux d’avoir veillé. Je n’aurais pas voulu m’endormir sans vous avoir parlé tant, tout au long de la journée, j’ai regretté les propos, ou plutôt le ton sur lequel j’ai cru devoir vous assener quelques pauvres vérités. Je crois que la crainte d’une attaque de goutte m’avait aigri le caractère. Au fait, je suis désolé si je vous ai peiné.
    — Ma reconnaissance et mon affection envers vous sont bien au-dessus de propos dont l’acuité ne m’a pas échappé. Bourdeau m’a habitué à m’en asséner de plus forts du même acabit ! Trop souvent, le policier avance droit avec des œillères et l’homme privé n’écoute pas suffisamment la rumeur du siècle. Aussi bien demeure-t-il parfois insensible à la marche du temps, même si bien des constatations lui devraient signifier d’y prêter plus d’attention.
    — Me voici un peu rassuré ! J’ai écarté les œillères et le cheval n’a pas bronché.
    Au visage de son vieil ami, Nicolas mesura combien cette affaire l’avait tourmenté. Il prit son parti de ne point revenir sur la leçon de la veille, mais au contraire tenta de distraire le repentant. Il lui conta avec l’art qu’il savait mettre dans ses récits,et qui lui avait valu la faveur du feu roi, le souper chez La Borde et les échanges aigrelets entre Besenval et Cagliostro. Noblecourt demeura un instant silencieux, les yeux fermés dans une attitude que Nicolas connaissait bien pour l’avoir souvent observée. Le magistrat, dont les lèvres bougeaient, semblait déchiffrer à voix basse un message intérieur.
    — Son nom est légion , dit-il, sentencieux.
    — Parlez-vous de Cagliostro ? Le tenez-vous pour le diable ?
    Noblecourt eut un petit rire sec.
    — Nicolas, il ne s’agit pas de cela. Plus exactement, mesurez combien les faux prophètes, ces nouveaux sorciers, ont hérité du vrai diable sa plus redoutable capacité : son pernicieux pouvoir de séduction 14 . Tout est agencé pour lancer dans le public leur réputation. Notre peuple est léger et rien plus que l’extraordinaire le suborne. La réflexion n’y a point sa part.
    Il s’arrêta, hochant la tête.
    — Les dupes qui s’adressent à ces mystificateurs se font abuser. Ils gobent leurs trompeuses paroles. Ces faussaires, je les ai bien connus, jadis. Au début de ma carrière, j’ai eu à suivre le cas d’un Italien. Son nom, je ne l’ai même pas oublié : Francesco Forassassy. Même phénomène que votre Cagliostro, la même allure sans doute. Pour les uns c’était un mage, un grand philosophe, un génie, pour les autres un escroc et un fripon. Il s’introduisit dans beaucoup de milieux à la ville. Comme le serpent du jardin d’Éden, il fascinait ses auditeurs avec des discours sur le mouvement perpétuel. Il prétendait savoir faire de l’or…
    — Comme Cagliostro !
    — Tous s’en targuent ! C’est la pomme tentatrice de leur manœuvre ! C’est le vil moyen d’appâter le curieux avide et de le ferrer. Il assurait en faire avec du vif-argent et de l’esprit de sel auxquels il mêlait un peu d’un élixir de sa

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