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L'année du volcan

L'année du volcan

Titel: L'année du volcan Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Jean-François Parot
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comme s’il s’était trouvé à quelque essayage dans sa boutique de la rue Vieille-du-Temple. Il tira une épingle de son propre col et la piqua sous un revers pour corriger un faux pli.
    — Voilà ! C’est beaucoup mieux comme cela. Vous bougez beaucoup, cela tire sur les coutures.
    — Et donc vous aviez quelques commandes pour les religieux ?
    — Point, monsieur le marquis. Et en effet j’aurais préféré leur coudre gratis vingt frocs plutôt que d’avoir à traiter avec eux !
    — Contez-moi cela, mon bon monsieur Vachon.
    — Imaginez que j’ai perdu un mien cousin germain, mort intestat sans hoir direct puisque sans enfant. Je suis donc son héritier et, outre une petite somme, il me revient une maison et son jardin contigu sur l’arrière, sise rue des Courettes, tout près. Je n’en avais que faire. Aussi l’ai-je mise en vente. J’eus alors la surprise de constater que l’un après l’autre les acheteurs intéressés se désistaient pour de mystérieuses raisons que je ne parvenais pas à démêler.
    — Je suppose que vous avez tenté d’élucider le problème.
    — Vous me connaissez et Sa Majesté aussi, ce bon monsieur Vachon , quand je tire l’aiguille je ne m’arrête point que l’ourlet ne soit achevé ! J’ai enquêté. Des voix amies m’ont averti. Ces Prémontrés, avec leur grande robe et leur visage de bois flotté, ne sont que des syndics d’escrocs. Apprenez, monsieur le marquis, qu’ils ont agrandi depuis longtemps leurs emprises et domaines, et qu’ils donnent en location et autour les maisons qu’ils font bâtir dans les rues adjacentes. C’est une véritable société qui s’emploie par de spécieux artifices à écarter ceux qui veulent acquérir. Ainsi finissent-ils par demeurer à petit prix les seuls sur le marché et l’on doit passer sous leurs fourches caudines. Mais ils ne connaissent pas Vachon. Je leur ai dit mon fait. Que jamais ils ne posséderaient ma maison, que je préférerais la détruire, que je la louerai et que même mort, je veillerai à ce qu’elle ne leur revienne pas. Voilà ce que j’ai dit à ces chattemites voraces. Sont-ilslà pour prier Dieu ou pour accroître leur richesse, hein ?
    Nicolas remarqua une grosse veine bleue qui se gonflait à la tempe du maître tailleur.
    — Calmez-vous, mon ami, il n’est point bon à votre âge de s’irriter autant. Oubliez ces avanies et revenez, serein, à vos splendeurs couturières.
    — Vous avez raison. Passez donc rue Vieille-du-Temple, j’ai reçu de magnifiques tissus que je voudrais vous présenter. Et des modèles anglais… Hélas ! je suis bien obligé d’y céder, la paix revenue en rajoute à la mode, des redingotes légères et pratiques. Et si vous voyez Sa Majesté…
    — Je ne manquerai de lui rappeler que ce bon M. Vachon est son serviteur.
    Aux anges et rasséréné, le tailleur rejoignit sa voiture entre ses deux aides. Le commissaire soupira, il pressentait que l’entretien avec les Prémontrés ne s’annonçait pas sous les meilleurs auspices.
    Nicolas admira le portail du siècle dernier flanqué de deux gigantesques statues. Deux autres plus petites les surplombaient et entouraient un médaillon orné de guirlandes. L’entrée du monastère se faisait par la rue du Cherche-Midi. Il fut lanterné un long moment avant qu’un religieux morose lui indiquât qu’il était hors de question d’être reçu par le père abbé qui donnait audience. Cependant le chanoine père économe l’attendait au parloir.
    C’était un homme grand au visage empâté. Il portait la tenue de son ordre, surplis de lin et écharpe de laine noire, qui donnait de la majesté à son embonpoint. Sa main droite torturait le scapulaire qui pendait sur sa poitrine.
    — Monsieur, dit-il d’une voix suave, vous avez demandé à être reçu pour une affaire concernant,je crois, une maison. S’agit-il d’une location ou d’une vente, auquel cas je vous adresserai dans un premier temps à notre notaire, maître Lavicelle, rue Saint-Louis au Marais.
    Il s’avançait déjà pour reconduire le visiteur.
    — Je pense que vous vous méprenez, mon père. Je suis commissaire de police au Châtelet, chargé d’une enquête criminelle dans laquelle il apparaît que l’ordre des Prémontrés peut apporter d’utiles, et j’ajouterai nécessaires, informations.
    — Monsieur, je ne comprends pas… En tout état de cause, il est indispensable d’en passer par

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