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L'année du volcan

L'année du volcan

Titel: L'année du volcan Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Jean-François Parot
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l’officialité de Paris.
    — Je vous arrête. Je connais l’argument. Mais vous n’êtes, enfin votre ordre, ni sous le coup d’une procédure, ni suspect. Ma visite est un mouvement courtois qui vise seulement à approfondir ma connaissance d’un cas particulier que tout laisse à penser ne pas vous être inconnu.
    — Dans ces conditions, j’imagine que la sagesse serait de vous entendre. Cependant ce que je vais vous dire ne saurait en aucun cas impliquer la position de l’ordre. Cette conversation n’aura pas d’existence. Considérez, monsieur le commissaire, ma bonne volonté.
    Je te vois venir, maître Vachon les avait bien jugés, songea Nicolas. Il va seulement me tirer les vers du nez pour ensuite prendre les mesures nécessaires afin de faire opposition aux menaces qui pourraient se dresser contre son ordre. Il convient donc d’avancer avec prudence, pas à pas, de demeurer à la marge de la vérité, de marcher vers le centre par resserrement de cercles successifs. Feignons tout d’abord de jouer les candides et de m’intéresser au détail pour mieux aborder le principal.
    — Quelle règle suit votre ordre, monsieur le chanoine ?
    Il perçut une sorte d’apaisement dans le regard que porta sur lui l’économe.
    — Vous savez que nous sommes un ordre de chanoines réguliers suivant la règle de saint Augustin. Notre fondateur prêchait la pauvreté, une vie fraternelle et l’obéissance.
    Nicolas jetait un coup d’œil appréciateur sur la splendeur de la vêture du chanoine économe. Sa longue fréquentation de l’atelier de maître Vachon l’avait peu à peu accoutumé à juger d’un tissu et de sa qualité. Il paraissait que l’enseignement premier de l’ordre avait été quelque peu oublié au fil des temps et en dépit des réformes.
    — Je vois, dit-il, cependant vos bâtiments sont splendides et le portail admirable.
    L’économe se signa et désigna un portrait encadré d’un lourd assemblage de bois doré qui trônait sur le mur principal du parloir au milieu des basanes claires de la collection des pères de l’Église.
    — Nous devons beaucoup à la dévotion et aux généreuses libéralités de la reine Anne d’Autriche. Ce fut l’origine de notre aisance.
    — N’y a-t-il pas contradiction, mon père, entre l’apparente opulence de l’ordre et ses devoirs d’assistance et d’aide aux plus pauvres ? Les échos que recueille la police et les doléances présentées au magistrat laissent parfois supposer une aridité de cœur et un manque de compassion évident. «  Celui qui a de la dilection pour l’iniquité hait sa propre âme . » Il me souvient que saint Augustin cite ce psaume.
    Le chanoine eut un sourire pincé. Il respira profondément, croisa ses mains, qu’il considéra.
    — Auriez-vous par hasard été promis à la prêtrise ?
    — Non point. Mais j’ai été élevé par un chanoine, grand lecteur de saint Augustin.
    — Je comprends. Je reçois votre inquiétude. Peut-être pour vous répondre, devrais-je vous inciter à prendre en compte certaines circonstances qui vous feront envisager ces critiques d’un autre point de vue.
    — Je suis prêt à vous entendre. Je n’évoquais que la rumeur qui n’est jamais l’écho absolu de la vérité.
    — Sachez donc que l’assistance que nous procurons à beaucoup n’est pas sans entamer la fortune et les biens qu’on nous prête. Et il n’y a pas que cela.
    — Cependant l’Église est riche.
    — Que dites-vous là ! Oubliez-vous que depuis le roi Henri le quatrième nous participons au financement des guerres que nos souverains n’ont cessé de mener. Savez-vous que, seulement l’an dernier et en raison de la guerre d’Amérique, l’Église a dû consentir un don gratuit de seize millions, qui suivait celui de 1780 de trente millions. Imaginez du peu, et le poids qui pèse sur nos finances. M. de Périgord, l’agent général du clergé de France, vous en dirait long sur le sujet. Cela oblige l’Église pour assurer la levée des décimes extraordinaires à créer toute une série d’offices coûteux et, à l’instar de l’État, ce qui est plus grave, de recourir à l’emprunt.
    — J’entends bien, mais il va de soi que toute l’administration qu’impose cette recherche de fonds s’exécute dans le respect des lois du royaume ?
    Le visage presque alors impassible du chanoine économe se plissa dans une sorte de grimace scandalisée.
    — Que

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