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L'arc de triomphe

L'arc de triomphe

Titel: L'arc de triomphe Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: E.M. Remarque
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quand. Tout le monde attend un miracle. » Ravic sourit. « Je n’ai jamais vu autant de politiciens croire aux miracles qu’actuelle ment en France et en Angleterre. Et je n’en ai jamais vu aussi peu qu’en Allemagne. »
    Elle demeura silencieuse un moment.
    « Dire qu’il est possible que ça arrive !…
    –  Oui, on voudrait tant ne pas le croire, qu’on ne fait rien pour l’empêcher. Vous souffrez beaucoup, Kate ?
    –  Pas au point de ne pouvoir le supporter. J’aimerais m’évader de tout cela, Ravic.
    –  Je comprends, dit-il. Qui ne le voudrait pas ?
    –  En partant d’ici, je veux aller en Italie. À Fiesole. J’y possède une petite maison très calme, avec un jardin. Je veux y rester quelque temps. Il fera beau. Le soleil un peu voilé, mais toujours présent. Les lézards qui dorment sur les murs, à midi. Le soir, les cloches de Florence. Et la nuit, la lune et les étoiles, derrière les cyprès. Il y a des livres dans la maison, et un vieux foyer avec des sièges de bois. Les chenets sont faits de telle sorte qu’on peut y poser un verre de vin pour le chauffer. Il n’y a personne. Seulement un vieux couple pour l’entretien.
    –  C’est merveilleux, fit Ravic. Le calme, le foyer, les livres, la paix, quoi. On jugeait tout cela bourgeois autrefois. Aujourd’hui, c’est le rêve du paradis perdu.
    –  Je voudrais y passer quelque temps. Quelques semaines. Davantage peut-être, je ne sais pas. Le temps de me calmer. Puis je veux revenir ici avant de partir pour l’Amérique. »
    Ravic entendit le bruit qu’on faisait dans le corridor en transportant les plateaux du dîner.
    « Vous avez raison, Kate.
    –  Croyez-vous que je pourrai encore avoir un enfant, Ravic, demanda-t-elle après un court silence.
    –  Pas maintenant. Il faut d’abord prendre beaucoup de forces.
    –  Je ne veux pas dire maintenant. Je veux dire un jour. C’est l’opération… vous n’avez pas ?…
    –  Non, nous n’avons rien enlevé. Rien ! »
    Elle soupira.
    « C’est-ce que je voulais savoir.
    –  Mais il faudra beaucoup de temps, Kate. Il faut d’abord refaire complètement tout votre organisme.
    –  Peu m’importe le temps que cela prendra. »
    Elle lissa ses cheveux, faisant étinceler un instant le solitaire qu’elle portait au doigt, puis reprit :
    « Je suis ridicule de vous demander cela maintenant, n’est-ce pas ?
    –  Mais non… c’est tout naturel…
    –  C’est que, voyez-vous, j’en ai subitement assez de cette vie. Je veux retourner dans mon pays et me marier. Un mariage sérieux, solide, avoir des enfants, être calme, louer Dieu et aimer la vie. »
    Par la fenêtre, Ravic regarda les reflets du soleil couchant sur les maisons. Même dans ces rayons mourants, les enseignes électriques n’apparaissent plus que comme des ombres sans vie et sans couleur.
    « Je dois vous paraître absurde, après tout ce que vous savez de moi.
    –  Pas le moins du monde.
    –  J’y pense depuis deux jours. Il y a longtemps que je ne me suis sentie aussi jeune et aussi gaie. Lorsque je serai là-bas, toutes les années passées ici ne m’apparaîtront plus que comme un rêve insensé. »
     
    Jeanne Madou arriva à quatre heures du matin. Ravic s’éveilla en entendant quelqu’un ouvrir la porte. Il s’était endormi croyant qu’elle ne viendrait pas. Il la vit dans l’encadrement de la porte. Elle essayait d’entrer avec une énorme brassée de chrysanthèmes. Les fleurs lui cachaient le visage. Il ne voyait que son corps et les corolles brillantes.
    « Une forêt de chrysanthèmes, dit-il. Pourquoi tout cela, mon Dieu ? »
    Elle pénétra dans la pièce, et les jeta sur le lit. Les pétales humides sentaient l’automne et la terre.
    « Des cadeaux, dit-elle. Depuis que je te connais, je commence à recevoir des cadeaux.
    –  Enlève-les ! Je ne suis pas encore mort ! Étendu sous des fleurs, des chrysanthèmes surtout ! Mon lit ressemble à un cercueil. »
    Avec un mouvement violent, elle les arracha et les jeta par terre.
    « Ne dis jamais des choses pareilles ! Jamais ! »
    Ravic la regarda. Il avait oublié comme ils s’étaient rencontrés.
    « Mais voyons, je plaisantais…
    –  Ne le dis plus jamais ! Même pour plaisanter ! C’est promis ? »
    Il vit que ses lèvres étaient agitées d’un tremblement.
    « Ça te fait vraiment si peur ? Alors, dit-il en se levant, je ne le dirai plus jamais. Là, tu es

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