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L'arc de triomphe

L'arc de triomphe

Titel: L'arc de triomphe Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: E.M. Remarque
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demanda Ravic.
    –  Sur la table. Je vais l’apporter. Ne bouge pas. »
    Elle prit la bouteille et un verre et revint les déposer sur le parquet.
    « Je sais que tu ne m’aimes pas, dit-elle.
    –  Alors, tu en sais plus long que moi…
    –  Mais tu m’aimeras.
    –  Alors, buvons à l’avenir.
    –  Attends. »
    Elle emplit le verre et en but le contenu. Puis, elle l’emplit de nouveau et le lui tendit. Il le contempla un moment avant de boire. « Tout ceci est irréel, songea-t-il. C’est une espèce de demi-rêve. Des mots qu’on prononce dans la pénombre. Comment seraient-ils vrais ? Les paroles sincères, éternelles ont besoin de lumière. »
    « Et comment sais-tu cela ? questionna-t-il.
    –  Parce que je t’aime. »
    « Comme elle emploie ce mot ! pensa Ravic. Sans y réfléchir. Comme si elle utilisait un vase vide. Elle y met n’importe quoi, et elle appelle cela de l’amour. Que de choses y a-t-elle mises déjà ! La peur d’être seule… le besoin d’être stimulée par la présence de quelqu’un… le manque de confiance en elle-même… les fantaisies de son imagination… qui sait ? Ce que j’ai dit au sujet de vieillir ensemble n’était-il pas le plus stupide de tout ? N’a-t-elle pas infiniment plus raison avec sa spontanéité ? Et pourquoi suis-je assis ici une nuit d’hiver, entre deux guerres, en train de parler comme un maître d’école ? Pourquoi ne pas me jeter à corps perdu dans cet amour, même si je n’y crois pas ! »
    « Pourquoi résistes-tu ? demanda Jeanne.
    –  Je ne résiste pas… que veux-tu dire !
    –  Je ne sais pas. On dirait que tu te refermes. Comme si tu avais peur de laisser entrer quelqu’un ou quelque chose.
    –  Redonne-moi du calvados.
    –  Je suis heureuse et je voudrais que tu le sois aussi. Je suis si complètement heureuse. Je m’éveille avec toi et je m’endors avec toi. Je ne sais rien d’autre. Quand je pense à nous deux, je vis comme dans un rêve, tout entouré de musique, toute notre vie est pleine de musique et ce rêve de temps en temps est interrompu par des silhouettes qui apparaissent, parlent et disparaissent comme des images de cinéma, mais la musique reste. Elle reste toujours. »
    « Il y a quelques semaines à peine, tu étais très malheureuse, songea Ravic, et tu ne me connaissais pas. Tu as le bonheur facile. »
    Il vida son verre et dit :
    « As-tu souvent été heureuse ?
    –  Non, pas souvent.
    –  Mais quelquefois tout de même. Quand était-ce, la dernière fois que tu as vécu un rêve ?
    –  Pourquoi me le demandes-tu ?
    –  Pour rien. Tout simplement comme ça.
    –  Je l’ai oublié. Et je ne veux plus me le rappeler. C’était autre chose.
    –  C’est toujours autre chose. »
    Elle lui sourit. Son visage ouvert ne lui cachait rien.
    « C’était il y a deux ans, dit-elle. Ça n’a pas duré. À Milan.
    –  Tu étais seule ?
    –  Non. Avec quelqu’un. Il était malheureux et jaloux. Il ne me comprenait pas.
    –  Naturellement.
    –  Mais toi, tu comprendrais. Il faisait des scènes terribles. Il me traitait de garce, d’infidèle, d’ingrate. Il se trompait. J’ai été fidèle tant que je l’ai aimé. Il ne pouvait admettre que j’aie cessé de l’aimer.
    –  On ne l’admet jamais.
    –  Non, toi tu comprendrais. Mais je ne cesserai jamais de t’aimer. Tu es différent, et entre nous deux, ce n’est pas la même chose. Il voulait me tuer. » Elle se mit à rire. « Ils veulent tou jours tuer. Quelques mois plus tard, un autre voulait me tuer aussi. Ils ne le font jamais. Toi, tu ne voudrais jamais me tuer.
    –  Avec du calvados seulement. Redonne-m’en. Dieu merci, notre conversation devient plus humaine. Il y a une minute, je commençais à avoir peur.
    –  Pourquoi ? Parce que je t’aime ?
    –  À quoi bon discuter de cela ? Nous sommes ensemble… pour peu de temps ou pour toujours… qui sait ? Nous sommes ensemble… et c’est tout ce qui compte.
    –  Je n’aime pas que tu dises : pour peu de temps ou pour toujours… Ce ne sont que des mots, et tu le sais.
    –  Évidemment. Quelqu’un que tu aimais t’a-t-il déjà quittée ?
    –  Oui. » Elle le regarda. « On dit toujours qu’on a quitté l’autre, mais souvent c’est l’autre qui a été plus prompt à vous quitter.
    –  Et qu’as-tu fait ?
    –  Tout ! »
    Elle lui prit le verre des mains et but ce qui restait.
    « J’ai

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