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L’assassinat de Jesse James par le lâche Robert Ford

L’assassinat de Jesse James par le lâche Robert Ford

Titel: L’assassinat de Jesse James par le lâche Robert Ford Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Ron Hansen
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n’excitaient cependant guère l’intérêt
de son compagnon, sauf quand il pouvait faire le lien avec un souvenir
équivalent.
    Jesse lui dévoila qu’un été, sous le
pseudonyme de John Franklin, il avait donné des cours de chant pour l’église
baptiste de l’Unité, dans le comté de Calloway. Il raconta qu’il avait un jour
voulu faire main basse sur la petite monnaie qu’un ministre du culte luthérien
conservait dans une boîte à cigares, mais lorsqu’il avait découvert que le
salaire de l’Allemand ne se montait qu’à deux cents dollars par an, il avait
restitué son butin en déclarant : « Je ne suis pas aussi affreux qu’on
le croit. »
    Il relata un séjour chez un copain du nom de
Scott Moore aux sources chaudes de Las Vegas, au Nouveau-Mexique. Moore et son
épouse Minnie y tenaient le Old Adobe Hotel, où le dimanche ils servaient de
gargantuesques déjeuners comportant pas moins de huit plats, pour lesquels il y
avait de quoi sacrifier ses dents en or. C’était là-bas que, en juillet 1879, Jesse
avait été présenté à Billy le Kid en personne. Billy avait la mâchoire pendante,
la croupe large, et la salive avait tendance à s’accumuler au coin de ses
lèvres quand il parlait, mais hormis cela, c’était un garçon aimable et
généreux qui tirait grand plaisir de la coïncidence selon laquelle les deux
hommes les plus redoutés d’Amérique portaient tous deux leur pistolet à gauche.
On l’avait enterré les fers aux pieds, certifia Jesse. Son anglais était
approximatif, son espagnol impeccable et ses derniers mots avaient été :
« Quién es ? » – Qui c’est ?
    « On lui a fait plus de tort qu’il n’en a
causé, conclut Jesse.
    — Comme à toi », fit Charley.
    Jesse parla à Charley de Jesse Cole, l’oncle à
qui il devait son prénom, qui, affligé d’innombrables affections, avait résolu
de les résoudre de manière définitive. Par une journée d’été, il était sorti
sur la pelouse, avait ôté son manteau et son gilet, sur lesquels il avait
déposé sa montre en argent, puis s’était majestueusement allongé, avait
déboutonné sa chemise et s’était tiré une balle dans le cœur.
    Jesse se tourna un peu sur sa selle et
considéra Charley à sa droite, qui avançait au pas sur sa jument.
    « Tu as déjà songé au suicide ?
    — Pas vraiment. Il y a toujours eu d’autres
choses que je voulais faire avant, quand ce n’était pas ma situation qui s’améliorait
ou mes ennuis qui m’apparaissaient sous un angle différent – tu sais, tout ce
qui peut se produire. Ça ne m’a jamais paru une solution respectable.
    — Je vais te dire un truc certain : tu
ne lutteras pas contre la mort une fois que tu auras entrevu l’autre monde. Tu
n’auras pas plus envie de réintégrer ton corps que de ravaler ton propre vomi. »
    On était en mars, le temps était odieux et la
route n’était qu’un mélange de boue, de glace et d’ornières entrecroisées. Les
selles de Jesse et Charley grinçaient à chaque mouvement et leurs chevaux
étaient moroses – ils avaient les naseaux givrés, leurs crinières étaient
hérissées de glaçons et, quand leurs cavaliers les laissaient se reposer, de la
vapeur s’élevait d’eux à cause du froid. Mais le cerveau de Charley turbinait à
plein régime dans le profond silence qui régnait entre les deux hommes.
    « Vu qu’on cherche à voler une banque, je
me demandais si je pourrais aller jusqu’à suggérer qu’on enrôle un autre
bonhomme en renfort, histoire qu’on se sorte du prochain coup vivants ? »
lâcha Charley.
    Jesse parut brusquement fasciné par le
quartier et l’étrier gauches de sa selle et se refusa à lever les yeux.
    « À Noël, Bob voulait savoir s’il pouvait
nous accompagner la prochaine fois qu’on se ferait une banque ou un train »,
poursuivit Charley.
    Jesse éternua une fois, puis deux et se frotta
le nez avec son gant, puis examina la traînée sombre sur le cuir jaune.
    « Bob n’en a pas l’air, mais sous ses
dehors de gosse, il est solide comme un roc et il saura tenir son poste le
flingue à la main quand il le faudra. Et il est malin, en plus – y a pas plus
finaud que lui.
    — Tu oublies que je l’ai déjà rencontré.
    — Il a une haute opinion de toi.
    — Toute l’Amérique a une haute opinion de
moi.
    — Même. Ce n’est pas comme si tu pouvais
tirer deux millions de noms d’un chapeau, quand tu as besoin d’un

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