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L’assassinat de Jesse James par le lâche Robert Ford

L’assassinat de Jesse James par le lâche Robert Ford

Titel: L’assassinat de Jesse James par le lâche Robert Ford Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Ron Hansen
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que le mal-être et la
frustration.
    « Toute ma vie, je n’ai été qu’un moins
que rien. C’était moi le bébé, celui qu’on tarabustait, celui à qui on faisait
des promesses jamais tenues. Et aussi loin que je me rappelle, toujours – Jesse
James, gros comme un arbre. Je suis préparé, Jim. Et je réussirai. Je sais que
c’est ma seule chance et tu peux compter sur moi, je ne vais pas la gâcher. »
    Le shérif Timberlake plissa les yeux en raison
de la fumée de sa cigarette et se détourna.
    « Si possible, capture-le dès qu’il se
pointera. Sinon, guette le bon moment. Évite de te retrouver seul avec lui si
tu peux. Et ne lui tourne pas le dos. »
    Timberlake écrasa sa cigarette et sortit par
la porte de livraisons. Bob demeura planté là, puis roua un carton de coups de
pied avant de tomber à genoux.
    Pendant ce temps-là, Jesse et Charley
vadrouillaient, couvrant, de semaine en semaine, près de cent trente kilomètres
par jour. Le 8 mars, un journal rapporta que Jesse James avait été « criblé
de balles » lors d’une escarmouche aux abords d’une cabane dans le Kansas.
D’après l’article, il était en compagnie d’Ed Miller. Sept adjoints avaient
trouvé la mort, affirmait le journaliste, « en essayant de capturer le
desperado ». La nouvelle fut rétractée dans la même journée, ce qui n’empêcha
pas George Sheperd le borgne de s’en formaliser. Il écrivit sur-le-champ au
quotidien une lettre dans laquelle il raillait toutes les déclarations
officielles au sujet de la bande et tous les détachements d’incapables qui s’étaient
lancés aux trousses des hors-la-loi, avant de conclure : « À mon avis,
il y a en ce moment même des centaines de policiers et de détectives à la
poursuite des frères James qui prient pour ne jamais tomber sur eux. »
    Un retraité de la compagnie ferroviaire
Hannibal and St Joseph soutint qu’il avait vu Jesse James avec un autre
homme à Lincoln, dans le Nebraska à cette période, tandis qu’un meunier de
Memphis était pour sa part convaincu qu’ils lui avaient acheté de la farine ;
des témoignages sporadiques signalaient aussi la présence de Jesse au Texas, dans
le Colorado et dans le Sud ; mais en réalité, Jesse passa la majeure
partie de son temps à St Joseph : Zee était de nouveau enceinte et il
souhaitait la décharger des corvées ménagères.
    Le 17 mai, Jesse étrilla un étalon du nom de
Stonewall, lui tressa des rubans verts dans sa crinière et sa queue et prit
solennellement part à la parade de la Saint-Patrick aux côtés de nombreux
vachers de St Joseph. Il leva son chapeau blanc à larges bords à l’attention
des dames, jeta des bonbons aux enfants et se conduisit en tout point comme un
général ou un candidat à une élection, sans que le moindre shérif ou agent de
Pinkerton le reconnût pour autant, ce qui fut peut-être pour lui une déception.
    Ce fut aussi en mars que Jesse et Charley se
rendirent à Maryville, où ils commandèrent deux bières pression dans le saloon
de Mike Hilgert. Un gaillard brutal et irascible surnommé Omaha Charlie – qui
fut plus tard pendu avec grand enthousiasme à un pont de chemin de fer pour
meurtre – déambulait dans le saloon en invitant bruyamment divers clients à
jouer au billard. Quand pour finir il s’approcha des deux nouveaux venus, Jesse
accepta son offre et Omaha Charlie commença aussitôt à l’insulter à propos de
ses vêtements chics, de ses allures de gentleman, de sa voix haut perchée, de
la méticulosité avec laquelle Jesse appliquait du bleu sur le procédé de sa
queue tordue.
    Jesse l’ignora et se pencha au-dessus de la
table avec bonne humeur et blousa cinq billes rayées en deux coups, ce qui
amena Omaha Charlie à froncer les sourcils et à le traiter (comme prévu) de
tricheur, puis à s’avancer vers l’étranger en brandissant sa queue de billard.
    Les témoins de la scène relatèrent par la
suite que l’inconnu était resté calme, presque pacifique, et s’était borné à
concentrer son regard bleu glacé sur Omaha Charlie, avant de l’avertir avec
gravité : « Pas un pas de plus. Tu t’en prends à la mauvaise personne. »
    Omaha Charlie avait atermoyé un instant, puis
s’était ravisé avec appréhension et, après avoir aplati la queue sur la table, avait
battu en retraite jusqu’à une chaise pour y inspecter ses chaussettes. Jesse et
Charley n’avaient pas langui devant leurs bières ; ils

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