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L’assassinat de Jesse James par le lâche Robert Ford

L’assassinat de Jesse James par le lâche Robert Ford

Titel: L’assassinat de Jesse James par le lâche Robert Ford Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Ron Hansen
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sous mes ordres. » Louanges auxquelles
Jesse répondait par une adoration mêlée d’un vif désir d’émulation.
    Frissonnant dans sa chambre à coucher sous
deux manteaux, Jesse romança pour Zee les jours et les nuits de pillages, de
brigandage et d’incendies. Il lui raconta qu’il était aux côtés d’Arch Clement
quand celui-ci avait exécuté vingt-cinq soldats de l’Union en permission
rencontrés dans un train en provenance de St Charles, puis qu’avec Frank
et deux cents autres partisans, il avait chargé la compagnie du major A. V. E.
Johnson à Centralia, où en moins de vingt minutes ils avaient exterminé plus d’une
centaine d’hommes, dont le major lui-même. (Frank arborait toujours autour de
la taille la cartouchière de l’armée de l’Union prélevée sur un cadavre ce
jour-là.)
    Jesse confia à Zee qu’un jour, il avait tiré
la courte paille et avait été choisi pour effectuer la reconnaissance d’un
bivouac nordiste ; il s’y était infiltré de nuit, en rampant, avec un
couteau de tanneur, et en était ressorti poisseux de sang après avoir égorgé d’une
oreille à l’autre chacun des six hommes. Il lui narra comment une balle yankee
lui avait pulvérisé la phalangette du majeur et avait détruit le fut de son
fusil. Son frère l’avait alors gorgé de whisky, puis, une fois Jesse incapable
de finir ses phrases, Frank avait élagué la peau et l’os avec des ciseaux de
coiffeur jusqu’à ce qu’il eût paré le doigt à son goût. Deux mois plus tard, à
Fiat Rock Ford, alors qu’il n’avait que dix-sept ans, une balle Minié avait
perforé le poumon droit de Jesse et on avait cru qu’il allait mourir, mais
quatre semaines après, il était sur pied et au bout de six, avait déjà entrepris
de se venger.
    Et puis, expliqua-t-il à Zee, en août 1865, cinq
mois après que Robert E. Lee eut déposé les armes à Appomattox, Jesse était
revenu du Texas où il s’était exilé et avait gagné Lexington avec un détachement
d’irréguliers sudistes pour y recevoir l’amnistie qui leur avait été promise. Mais
les membres du second régiment de cavalerie du Wisconsin avaient ignoré le
drapeau blanc qu’ils brandissaient et ouvert le feu à tout va sur les
Confédérés. Jesse avait été frappé en plein torse, à quelques centimètres de la
cicatrice précédente, et avait failli être écrasé par sa monture blessée ;
mais il avait réussi à s’extraire de dessous son cheval et à tituber jusqu’aux
bois voisins, où deux cavaliers l’avaient traqué à travers les fourrés
enchevêtrés, jusqu’à ce qu’il abattît la monture cabrée et prise au piège de l’un
d’eux, leur ôtant l’envie de le poursuivre. Jesse avait ensuite passé la nuit
allongé au milieu d’une rivière afin de tempérer sa fièvre et contemplé les
circonvolutions de son sang qui se faisaient et se défaisaient dans l’eau. D’après
lui, c’était au délire et à l’obstination seuls qu’il devait d’être parvenu à
se traîner, en s’agrippant aux herbes et aux racines, jusque dans un pré où un
laboureur l’avait recueilli, puis soigné avec des liniments et nourri de tripes
de porc avant de le livrer au major J. B. Rogers, qui commandait la place
de Lexington pour le compte de l’Union. Un chirurgien avait, non sans quelque
ambivalence, farfouillé dans la blessure de Jesse avant de renoncer à extraire
la balle et de déclarer Jesse perdu ; le gouvernement avait payé son
rapatriement en train à Rulo, où se trouvaient toujours sa mère et sa famille. Au
bout de huit semaines, voyant que la santé de Jesse ne s’améliorait guère, sa
mère était rentrée en bateau avec lui dans le Missouri afin qu’il ne mourût pas
dans un État nordiste.
    « Et tu étais là, avait conclu Jesse, un
rien mélodramatique. Et tu m’as enduit d’onguents, telles les sœurs de Lazare, et
je suis revenu d’entre les morts. »
    Pendant que Jesse parlait jusqu’à ce que le
soleil se couchât et que l’heure se fît tardive, Zerelda souriait et rêvait de
lui tel qu’il avait été, tel qu’il était et tel qu’il serait. À ses yeux, Jesse
n’était que dynamisme, virilité, romantisme ; même malade, il était encore
plus énergique que n’importe quel autre homme qu’elle connût. Et, à sa manière,
il lui faisait la cour. Il était fasciné par des attitudes, des talents que les
sœurs de Zee eussent considérés communs ; il était sensible à sa

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