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L’assassinat de Jesse James par le lâche Robert Ford

L’assassinat de Jesse James par le lâche Robert Ford

Titel: L’assassinat de Jesse James par le lâche Robert Ford Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Ron Hansen
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Dick était cependant un homme qui ne laissait rien au hasard ;
non content d’obliquer vers un gros frêne tandis qu’ils prenaient leurs
distances, il se retourna à neuf au lieu de dix et visa l’oreille gauche de
Wood.
    En réaction à la détonation et au
vrombissement du projectile qui rata son crâne dans les grandes largeurs, Wood
se baissa, puis pivota et entrevit les traces vertes sur la pelouse qui
déviaient vers le frêne, ainsi qu’un panache de cheveux blonds qui
disparaissait derrière le tronc gris. Il pressa la détente, le violent recul du
revolver lui foula le poignet et un morceau d’écorce de frêne explosa. Dick se
pencha et tira une seconde fois sur Wood – son bras se cabra, un son semblable
à celui d’une fenêtre à guillotine qui s’abat retentit, un nuage de fumée bleue
s’épanouit puis se dissipa et un autre son, pareil à celui d’une scie qui ripe,
fendit l’air près du cou de Wood.
    Les coups de feu éveillèrent en sursaut la
famille de Wood ainsi que les domestiques et tous se précipitèrent dans le
couloir vers la porte treillissée en endossant des robes de chambre par-dessus
leurs chemises de nuit comme Dick brûlait sa dernière cartouche et fracassait
quelques branches d’une haie au bord de la route. Le chien de son pistolet
mordit trois douilles vides, il remarqua les Hite derrière la porte treillissée
et s’élança dans leur direction de la foulée lourde et maladroite d’un vacher
peu habitué à se mouvoir sur ses jambes, tandis que Wood faisait feu sur son
dos à deux reprises, omettant à chaque fois de viser en avant de la cible.
    Dick trébucha sur la dernière marche de l’escalier
et s’étala en glissant sur la véranda au moment où, le nez aplati contre le
treillis de la porte, le major Hite criait : « Hé là ! Arrêtez !
Wood ? Wood ! Je ne tolérerai pas qu’on se tire dessus chez moi !
Je te l’ai déjà dit mille fois ! »
    Dick rampa vers les pieds du vieil homme et
Wood tira encore une fois. Il brisa le barreau d’une chaise et la balle perça
un trou sombre dans le rebord d’une fenêtre. Le major Hite tapa du pied sur la
carpette et glapit de nouveau : « Wood, tu m’écoutes ? Assez ! »
    Wood considéra le canon de son revolver et fit
cliqueter le barillet.
    « De toute façon, c’était ma dernière
balle. » Il suspendit le pistolet par le pontet au perchoir d’une
mangeoire à oiseau. « Il y a quelque chose qui cloche avec la visée de ce
flingue. »
    George Hite Jr se tordit vers son père.
    « Tu constateras que je n’y suis pour
rien, papa. Je ne possède même pas d’arme. »
    Le major Hite avisa l’homme recroquevillé près
de ses mollets pâlichons.
    « Quelle est la raison de ce remue-ménage ?
Hein ? »
    Dick vit Sarah, chaussée de pantoufles roses
et drapée dans une couverture en patchwork, se blottir innocemment contre son
époux. Il se remit debout.
    « Moi et Wood, on s’est levés du mauvais
pied ce matin, c’est tout. »
    Le major Hite n’entendit manifestement rien
des paroles de Dick ; il se contenta d’attendre que la bouche de son
interlocuteur cessât de bouger, puis déclara : « Je vais vous dire, jeune
homme : l’hospitalité a ses limites et vous avez passé les bornes. »
    Dick partit sans
tarder pour Russellville, plus au nord, où il loua une chambre accessible par
un escalier dérobé, au-dessus de l’atelier d’un forgeron, travaillant par
intermittence pour dix cents de l’heure et chiquant du tabac sur un banc, devant
un magasin, en compagnie de vétérans de la guerre américano-mexicaine. L’après-midi,
il s’ébattait avec Mrs Sarah Hite, quand elle pouvait se rendre en ville, ou
bien qu’elle lui donnait rendez-vous dans des endroits étranges – pour le lever
du soleil au-dessus de Mud River, à minuit près du chapiteau d’un prédicateur
itinérant ou à midi sous un pont de chemin de fer, où ils maculèrent de vert le
drap qu’ils avaient étalé sur l’herbe.
    Mrs Hite organisait ces rencontres par l’entremise
de John Tabor, l’ancien esclave, qui se chargeait de patienter dans l’allée
pendant que le forgeron tapait au plafond avec une perche et que Dick
descendait au pas de course en chaussettes ; ou de jeter des brindilles
contre la fenêtre du galant, puis quand celle-ci s’ouvrait, d’indiquer une
heure et un lieu avant de disparaître dans l’obscurité.
    Un jeudi, à la tombée de la nuit, le

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