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L’assassinat de Jesse James par le lâche Robert Ford

L’assassinat de Jesse James par le lâche Robert Ford

Titel: L’assassinat de Jesse James par le lâche Robert Ford Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Ron Hansen
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celles d’un
clown à cause du froid et une goutte d’humidité pareille à une larme lui
pendait au bout du nez.
    « Prêt ? » fit-il simplement.
    Ils soulevèrent Wood et l’étendirent sur la
couverture marron pour chevaux, qu’ils tirèrent ensuite sur le plancher. Ils
descendirent l’escalier en la faisant glisser, de sorte que la tête de Wood
rebondit sur les marches et qu’il fut ballotté de droite à gauche. Comme Bob et
Elias sortaient avec le corps, Charley et Wilbur se levèrent avec solennité des
chaises sur lesquelles ils étaient assis dans la cuisine ; Ida enfouit son
visage entre ses mains et Martha se retourna vers son fourneau.
    Le froid de décembre transperçait les manches
du manteau de Bob et lui lacérait les oreilles. Les articulations de ses mains
le faisaient souffrir en raison du poids de leur fardeau et de temps à autres
les deux frères déposaient le cadavre à terre afin de se détendre le dos et les
doigts.
    « Fait frisquet », grelotta Bob à l’occasion
d’une de ces pauses, mais Elias ne dut pas l’entendre.
    Une fois qu’ils eurent dépassé la deuxième
rangée d’arbres de la forêt, Elias estima la distance suffisante pour que la
puanteur ne parvînt pas jusqu’aux parcs à bétail et ils firent rouler le
cadavre nu dans une ravine enneigée qui avait autrefois été le lit d’une
rivière d’eau claire. Elias s’accroupit afin d’étaler sur Wood la couverture
pour chevaux. Les deux frères déblayèrent la neige, donnèrent des coups de pied
dans les parois de terre de la ravine pour les faire s’ébouler, puis ils
amoncelèrent des rochers et des blocs de pierre ramassés non loin sur le
cadavre. Elias rassembla des feuilles de pommier et les éparpilla au-dessus de
la sépulture, tandis que Bob arrachait des branches mortes sur les arbres et
les balançait sur le tumulus.
    Puis Elias se campa à côté, lugubre, bras
croisés, pressant son chapeau contre sa poitrine, et Bob enfonça ses mains dans
les poches de son manteau.
    « “Heureux les pauvres en esprit, car le
royaume des cieux leur appartient, récita Elias. Heureux ceux qui pleurent, car
ils seront consolés.” »
    Il s’interrompit et interrogea Bob du regard.
« Les doux, lui souffla son frère. – “Heureux ceux qui sont doux…” »
Il consulta de nouveau son frère. « “Car ils hériteront la terre” », acheva
Bob.

4
Décembre 1881-février 1882
    Personne n’en sait
autant que moi sur Jesse James, car nos hommes l’ont traqué d’un bout du pays à
l’autre. Lui et sa bande ont abattu deux de nos détectives qui avaient retrouvé
leur piste et, à mon sens, Jesse James est l’homme le plus vil de toute l’Amérique,
sans exception aucune. Il ne connaît pas la peur et tuer de sang-froid ne lui
pose pas davantage de cas de conscience que de prendre son petit-déjeuner.
    ROBERT A. PINKERTON
    Dans le Richmond Democrat, 20 novembre 1879
    Depuis l’attaque de
Blue Cut, un homme monté sur un cheval châtain parcourait une fois par semaine
au moins la route qui longeait la ferme des frères Ford dans le comté de Ray. Il
portait un bonnet de marin bleu sous un chapeau gris et élisait domicile des
heures durant au milieu des futaies, depuis lesquelles, immobile comme un
clocher, il scrutait par-delà les champs de maïs dévastés par les vaches, l’écurie
et la cuisine animée.
    Il s’agissait du shérif James R. Timberlake, du
comté de Clay ; dès qu’un visiteur se présentait, le shérif consignait
dans un cahier la couleur de la monture et son sexe, ainsi que les caractères
physiques du cavalier et son comportement. Sa surveillance était cependant
intermittente et peu systématique de sorte que ses découvertes étaient
aléatoires ; en outre, ses observations étaient si imprécises que le lundi
5 décembre, il assista à l’arrivée de Jesse James, mais le prit pour un pasteur
méthodiste itinérant avec qui Jesse partageait une certaine ressemblance.
    L’homme parut à la nuit tombante et, après
avoir attaché son cheval bai à un perchoir à hirondelles, jeta un coup d’œil
par deux fenêtres, puis entra dans la maison sans s’annoncer ; il salua
les Ford à la campagnarde et laissa la porte battre au vent derrière lui, jusqu’à
ce que, pour finir, une femme la refermât. Le shérif entrevit l’inconnu qui
chahutait amicalement, décochait des claques bourrues dans des épaules et des
biceps, serrait des mains, puis la nuit se fit trop

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