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L’assassinat de Jesse James par le lâche Robert Ford

L’assassinat de Jesse James par le lâche Robert Ford

Titel: L’assassinat de Jesse James par le lâche Robert Ford Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Ron Hansen
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ne m’étonne pas. »
    Jesse dévisagea Bob comme à travers une loupe
de diamantaire.
    « Il y a un trou laissé par une balle
dans la porte de ta chambre.
    — Ah oui ?
    — Ça remonte peut-être à quand le vieux
Harbison vivait ici.
    — On ne peut jamais savoir. En cherchant
bien, tu trouverais aussi des trous dans la cuisine. Des accidents en nettoyant
des armes à feu, peut-être. »
    Jesse décocha une chiquenaude dans les
décorations de Noël qui ornaient un épicéa rabougri emprisonné dans un seau en
fer-blanc. Wilbur revint des cabinets en se frictionnant rigoureusement les
manches.
    « Dick Liddil n’est toujours pas repassé ?
reprit Jesse.
    — Toujours pas.
    — Tu as une idée de la raison ?
    — Peut-être que Mattie lui tient la bride
haute ces temps-ci.
    — J’ai une autre théorie. À mon avis, Wood
et lui ont eu une autre échauffourée, comme dans le Kentucky. Et d’après moi, il
a descendu mon cousin et il a peur de tomber sur moi ici. »
    Bob se cramponna aux bras du rocking-chair et
tâcha de ne pas laisser transparaître davantage que de la simple curiosité.
    « J’aimerais que tu fasses circuler l’information
que j’offre une récompense de mille dollars pour Dick. Mort ou vif. Mais de
préférence mort.
    — Tu dis ça sous le coup de l’émotion… »
    Wilbur reparut avec un pot de miel à la main
et un doigt dans la bouche.
    « Joyeux Noël, Jess !
    — Mille dollars », répéta Jesse.
    Bob désigna le drap qui entourait la base de l’arbre
de Noël.
    « Tu as remarqué qu’il y avait un cadeau
pour toi, là-dessous ? »
    Le visage de Jesse s’illumina.
    « Tu me fais marcher. »
    Il se pencha au-dessous d’une guirlande de
grains de pop-corn enfilés sur un fil et attrapa une boîte en carton de la
taille d’une brique, emballée dans du papier de soie bleu. Il la secoua et le
contenu ballotta à l’intérieur.
    « C’est lourd !
    — Je vois déjà tes yeux pétiller. »
    Wilbur fit un grand sourire à son frère.
    « C’est un flingue, pas vrai, Bob ?
    — Tu ne vas pas tarder à le savoir. »
    Jesse déchira le papier et le couvercle de la
boîte et, avec un ravissement enfantin, en sortit une statuette salace noire, en
ferronnerie, qui représentait une femme nue, les bras croisés derrière la tête,
les jambes levées et écartées de manière obscène.
    « C’est un tire-botte cochon.
    — Combien de fois n’ai-je pas rêvé d’en avoir
un !
    — Eh ben, maintenant, tu l’as. »
    Jesse effleura du pouce les seins de la
figurine et sourit en rougissant.
    « J’adore Noël.
    — C’est ce que je vois. »
    Il feignit d’être confus.
    « Mais je n’ai rien pour toi ! Je ne
me doutais pas…
    — Ton amitié me suffit amplement. »
    Charley apparut sur le seuil de la cuisine et
s’approcha de Jesse avec méfiance pour étudier les articulations de la
statuette.
    « Qu’est-ce que c’est ? se
renseigna-t-il.
    — Un tire-botte cochon.
    — Il aura toujours une place à part dans
mon cœur, jura Jesse.
    — Comme toi dans le mien », renchérit
Bob.
    Jesse dormit à la
ferme ce soir-là, mais Bob eut, lui, du mal à s’endormir. La lune brillait
derrière la fenêtre dont le double lunaire se dessinait sur le plancher et
éclairait Jesse sous un jour différent, l’arrachait à l’obscurité de la chambre,
le révélait allongé sur le lit de camp, tel un homme dans un cercueil, un homme
serein et soigné. Bob était assis sur son lit dans ses sous-vêtements gris, les
bras autour de ses chevilles, incapable de bouger. Il distinguait un pistolet
sur la table de chevet à sa gauche, il pouvait imaginer le nickel froid entre
ses doigts, le poids de un kilo au bout de son bras tandis qu’il visait, mais
il n’était pas en mesure d’esquisser le moindre geste dans sa direction – l’arme
était pareille à un nom qu’il ne parvenait pas à se rappeler. Il n’était de
nouveau plus qu’un enfant, un plouc, des choses lui échappaient ; et à l’autre
bout de la pièce était étendu Jesse, placide et souverain, certain de l’enfer
comme du paradis. Dans la nuit, son teint était du même bleu pâle que des
veines dans du marbre et sa tête agréable reposant sur l’oreiller dénotait l’appétit
de vivre, la fierté, la satisfaction.
    Et même ainsi, alors que Jesse était endormi, ses
sens aiguisés en sommeil, ses réflexes affûtés engourdis et ralentis, l’emplacement
exact de ses

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