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Le Baiser de Judas

Le Baiser de Judas

Titel: Le Baiser de Judas Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Hubert Prolongeau
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aurait
volé des vivres… Il renonça à comprendre et suivit son camarade.
    À peine avaient-ils fait quelques pas à l’intérieur
du bourg que la lueur d’une torche se dessina dans l’entrebâillement d’une
porte.
    « Les autres se sont endormis, mais je
savais que vous viendriez. Venez. »
    Sophonie se dirigea vers une autre maison, plus
grande. Le grincement de la porte réveilla immédiatement les hommes présents, et
un brouhaha emplit la pièce.
    « C’est toi ? Vous êtes là ? Venez,
venez. »
    Aaron, chef du village, semblait encore
empêtré dans son sommeil. Il bafouilla, manqua trébucher. Un de ses hommes le
conduisit vers Judas et Nathanaël.
    « Tu me jures que tu n’étais pas au
courant ? attaqua-t-il soudain.
    — D’autant moins que je ne sais toujours
pas de quoi il s’agit. Que s’est-il passé exactement ?
    — C’était il y a trois jours, en début de
soirée… »
    Ce soir-là, les notables du village avaient vu
une dizaine d’hommes s’avancer. À leur tête se trouvait Barabbas, que personne
ne connaissait. Il se présenta comme le chef des rebelles. Le temps qu’il parle,
ses comparses s’étaient glissés à toutes les entrées du village.
    Aaron s’était montré. Le ton de Barabbas avait
d’entrée été dur. Il s’était plaint que le village refusât de les aider
vraiment et qu’il cachât en son sein quelques collaborateurs.
    « Il faut que vous compreniez une chose. Il
n’est pas possible de rester neutre. Si vous n’êtes pas avec nous, vous êtes
contre nous.
    — Mais nous sommes avec vous. Nous vous
avons reçus. Jamais personne ne vous a dénoncés.
    — Plusieurs d’entre vous continuent de
faire du commerce avec les Romains. D’autres vont le faire à Jéricho.
    — Que voudrais-tu ? Que nous
cessions absolument toute vie en dehors de vous ? C’est impossible. Nous
sommes prêts à tout faire pour vous aider, mais…
    — Tout ? Tu as bien dit tout ?
    — Oui. Tout ce qui est en notre pouvoir.
    — Nous sommes de plus en plus nombreux
là-haut. Il faut que nous nourrissions tous ces hommes. Vous pouvez nous aider.
    — Comment ? »
    Aaron s’était fait plus méfiant.
    « Si nous ne pouvons pas vous interdire
tout commerce avec l’ennemi, nous devons en profiter nous aussi. Toutes les
semaines, nous passerons prendre des vivres. »
    Un murmure de protestation s’éleva. Un homme
se dressa :
    « Et au nom de quoi fixerais-tu un nouvel
impôt ? Ce que les Romains nous prennent ne suffit-il pas ? N’es-tu
pas venu pour lutter contre cela ?
    — Cela n’a rien à voir, répondit Barabbas.
Nous prenons pour survivre, pas pour nous enrichir. Et cela ne durera que le
temps que nous ayons triomphé. Plus vite la victoire sera là, plus vite nous
pourrons en finir avec ces pressions. »
    Les hommes qui étaient venus avec Barabbas se
rapprochèrent des mécontents. Ils avaient ostensiblement la main sur leur
gourdin. Et les protestations s’éteignirent. Le soir même, Barabbas repartait
avec un premier prélèvement.
    Judas et Nathanaël ne voulurent tout d’abord
pas croire ce récit. Mais il leur fallut se rendre à l’évidence.
    « Dans le fond, il a obtenu ce qu’ils
nous ont refusé la dernière fois, dit Judas en rentrant.
    — En l’obtenant par la peur, nous
détruisons tout ce que nous avons fait. C’est une erreur énorme, et elle sera
payée très cher. Nous allons entrer dans un concours de terreur avec les
Romains. C’est une catastrophe. »
    Ils se rendirent dès le lendemain auprès de
Barabbas.
    « Ce que tu as fait est une infamie. Ces
gens nous faisaient confiance. Que crois-tu qu’il va en rester si cela continue ? »
    Nathanaël était plus en colère que Judas ne l’avait
jamais vu.
    « Ils vont nous craindre autant que les
Romains. Nous nous sommes échinés depuis des semaines à tenter de les rallier à
notre cause, et cela a marché pour beaucoup, tu le sais bien. Aujourd’hui, tu
viens briser nos efforts. Je ne comprends pas. »
    Le ton était monté. D’un coup Barabbas cria.
    « Je ne t’autorise nullement à me parler
ainsi. Je suis le chef de cette troupe : je ne te le rappellerai pas deux
fois. »
    Il se tourna vers Judas.
    « Faire la révolution, c’est aussi se
battre en permanence contre ceux qui luttent avec vous, soupira-t-il.
    — C’est aussi admettre la critique et l’opposition,
reprit Nathanaël. Sans cela, la révolution n’est plus qu’un

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