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Le Bal Des Maudits - T 1

Le Bal Des Maudits - T 1

Titel: Le Bal Des Maudits - T 1 Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Irwin Shaw
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Il se peut que nous soyons divorcés, continua rapidement Laura , m ais il n’y a personne au monde que j’aime plus que toi. Et tu le sais parfaitement.
    Je le sais, dit Michael, convaincu de la sincérité de Laura.
    –  Et je ne veux pas que tu te fasses tuer.
    Elle se mit à pleurer.
    –  Et ne me ferai pas tuer, dit doucement Michael.
    –  Et je ne veux pas que n’importe qui puisse t e commander. C’est idiot…
    Michael secoua la tête, mesurant, une fois de plus, l ’abime qui séparait le monde réel de la version féminine du mond e.
    –  Ne te tourmente pas à mon sujet, Laura chérie, dit-il. C’est très gentil à toi de m’avoir téléphoné.
    –  J’ai décidé quelque chose, dit fermement Laura , je ne veux plus que tu me verses de l’argent.
    Michael soupira.
    –  Tu as un contrat, en ce moment ?
    –  Non. Mais je vois Mac Donald, cet après-midi, à la Métro, et…
    –  O. K. ! Quand tu travailleras, je ne te verserai plus rien .
    Il enchaîna rapidement, sans lui laisser le temps de protester :
    –  J’ai lu dans un journal que tu allais te marier. Est-ce vrai ?
    –  Non. Après la guerre, peut-être. Il s’est engagé dans la Marine. Il va travailler à Washington.
    –  Bonne chance, murmura Michael.
    –  Je connais un assistant-metteur en scène de Républic. Ils l’ont directement versé dans l’aviation, avec le grade de premier lieutenant. Il ne quittera pas Santa Anita pendant toute la durée de la guerre. Et tu t’engages comme simple soldat !
    –  Je t’en prie, Laura chérie, dit Michael. Cette communication va te coûter cinq cents dollars.
    –  Tu es un type bizarre, entêté et stupide, et tu l’as toujours été !
    –  Oui, chérie.
    –  Tu m’écriras pour me dire où ils t’auront expédié ?
    –  Oui.
    –  Je viendrai te voir.
    –  Ce sera merveilleux.
    Michael eut une vision de sa belle ex-femme, dans son manteau de fourrure, avec son visage et sa silhouette presque célèbres, attendant devant la porte du camp de Fort Sill, Oklahoma, tandis que les soldats sifflaient en regardant ses jambes et que lui même sortait des rangs pour courir à sa rencontre.
    –  Je ne sais pas trop ce que je ressens à ton sujet.
    Laura pleurait à l’autre bout du fil, doucement , h onnêtemen t.
    –  Je ne l’ai jamais bien su et je crois que je ne le saurai jamais.
    –  Je sais ce que tu veux dire.
    Michael se souvenait d’images de Laura dansant et se coiffant devant un miroir et des vacances qu’ils avaient connues. Un instant, ces larmes lointaines l’émurent, et il regretta les années perdues, les années sans guerre et sans séparations…
    –  Bah ! dit-il tendrement. Ils me foutront sans doute dans un bureau quelconque.
    –  Tu ne les laisseras pas faire, sanglota-t-elle. Je te connais : tu ne les laisseras pas faire.
    –  On ne laisse pas l’Armée faire quoi que ce soit. Elle fait ce qu’elle veut et on fait ce qu’elle veut. L’Armée n’est pas Varner Brothers, chéri e.
    –  Promets-moi… promets-moi .
    La voix lui manqua. Puis il y eut un déclic, et la communication fut coupée. Michael regarda le téléphone, d’un air interrogateur et le raccrocha.
    Puis il retourna dans la cuisine, acheva de préparer son petit déjeuner, transporta les œufs et le bacon, les toasts et le café, dans le salon ensoleillé, où il déposa le tout sur une petite table, devant la fenêtre grande ouverte.
    Il alluma la radio. Ils jouaient du Brahms ; un concerto pour piano. La musique se déversa de la boîte luisante, ample, discutable et mélancolique.
    Il mangea lentement, fier de sa cuisine, écoutant avec plaisir le tonnerre funèbre de la radio. Puis il ouvrit le Times à la rubrique théâtrale. Elle était pleine de pièces éternelles, jouées par d’éternels acteurs. Chaque matin, il lisait la page théâtrale du Times avec un découragement croissant. Chaque malin, la lecture des espoirs déçus, et de l’argent perdu et des critiques bilieuses de sa profession le rendait un peu plus agité et blasé. Il repoussa le journal, alluma la première cigarette de la journée, but la dernière gorgée de café. La radio jouait du Respighi, maintenant. Il tourna le bouton. Dans un brutal decrescendo Respighi cessa de hanter l’air matinal, l’abandonna au soleil, et au silence parfumé, tandis que Michael sombrait lentement dans une douce rêverie.
    Un long instant, il contempla les jardins et le bout

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