Bücher online kostenlos Kostenlos Online Lesen
Le Bal Des Maudits - T 1

Le Bal Des Maudits - T 1

Titel: Le Bal Des Maudits - T 1 Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Irwin Shaw
Vom Netzwerk:
allemand. La théorie des caractéristiques raciales. La position des Polonais et des Russes et des Hongrois dans l’histoire européenne. Les plus difficiles à manier sont les Français. Des femmes ont un faible pour les Français.
    –  Que faites-vous à leur sujet ?
    –  Maladies vénériennes. Nous citons des statistiques montrant les conséquences de la syphilis à Paris, etc.
    –  Et ça fait de l’effet ?
    –  Très peu.
    Gretchen sourit.
    –  Qu’est-ce que tu fais, aujourd’hui ?
    –  J’ai une interview, à la radio, avec une femme qui vient de mettre au monde son dixième enfant. C’est un major général qui va lui remettre sa prime, devant le micro.
    Elle consulta sa montre.
    –  Il est temps que je parte.
    Elle se leva.
    –  Je te vois, ce soir ? demanda Christian.
    –  Je regrette, chéri.
    Debout devant un miroir, elle apportait de subtiles retouches à sa coiffure.
    –  Je suis occupée, ce soir.
    –  Annule tes autres rendez-vous.
    Il n’aurait pas voulu se l’avouer ouvertement, mais sa voix était suppliante.
    –  Désolée, chéri. C’est un vieil ami. Un colonel qui vient d’Afrique. Ça lui briserait le cœur.
    –  Alors, après. Quand tu auras fini avec lui…
    –  Impossible, coupa-t-elle avec décision. Je rentrerai très tard. C’est une grosse réception.
    –  Alors, demain ?
    Gretchen le considéra un instant, et sourit.
    –  Tu es terriblement impatient, pas vrai ?
    –  Oui, admit Christian.
    –  Tu t’es bien amusé cette nuit ?
    Elle se retourna vers le miroir, recommença à tripoter ses cheveux.
    –  Oui.
    Tu es un type épatant. Tu m’as acheté une jolie broche.
    Elle revint à lui et se pencha vers lui et l’embrassa légèrement.
    –  Une très jolie petite broche. Il y a une jolie petite paire de boucles d’oreilles assorties, à la même boutique…
    J ’irai te les chercher, dit froidement Christian dégoûté de lui-même. À demain soir.
    Gretchen toucha, du bout de ses doigts, les lèvres de Christian, en un geste caractéristique.
    –  Je t’adore.
    Christian eut envie de lever les bras et de l’attirer à lui, mais il savait qu’il était inutile d’essayer.
    –  Tu veux que j’amène Éloïse ? demanda-t-elle, sou riante.
    Christian ferma les yeux, une seconde, se remémorant les événements violents et alcoolisés de la nuit. C’était pervers et écœurant et, en temps ordinaire, il aurait eu honte de lui-même, mais à présent…
    –  Oui, dit-il. Pourquoi pas ?
    Gretchen émit un petit rire de gorge.
    –  Il faut que je me dépêche.
    Elle se dirigea vers la porte, s’y arrêta.
    – Tu as besoin de te raser, dit-elle. Tu trouveras un rasoir dans l’armoire à pharmacie, et il y a du savon à barbe américain.
    Elle sourit.
    –  Le rasoir appartient au lieutenant, mais je sais que ça te sera égal de t’en servir.
    Elle lui envoya un baiser et disparut, en route vers le major général et la femme qui venait de mettre au monde son dixième enfant.
    La semaine se déroula, pour Christian, dans une sorte de brouillard. La grande cité allemande, les millions d’êtres humains qui y évoluaient, les signaux avertisseurs des tramways et des autobus, les placards, à l’extérieur des bureaux de tous les grands journaux, les uniformes étincelants des généraux et des politiciens qui passaient près de lui, sur les boulevards, dans leurs longues voitures blindées, les hordes de soldats en permission et en service commandé, les bulletins d’information et les kilomètres conquis, et les hommes exterminés en Russie, tout cela lui paraissait lointain et irréel. Seuls, existaient l’appartement de la Tiergarten Strasse et le corp s exigeant et pâle de la femme du lieutenant Hardenburg. Il lui acheta les boucles d’oreilles, se fit envoyer de l’argent et lui acheta une gourmette d’or massif et un joli sweater qu’un soldat avait rapporté d’Amsterdam.
    Elle avait pris l’habitude de lui téléphoner, à n’importe quelle heure du jour ou de la nuit, à l’hôtel meublé où il habitait, et il renonça aux avenues et aux théâtres et se contenta de rester allongé sur son lit, à attendre que le téléphone sonne, au rez-de-chaussée, dans le hall obscur.
    Sa maison était devenue, pour lui, le seul point fixe dans un monde croulant et ténébreux. Parfois, lorsqu’il restait seul à l’attendre dans son appartement, il errait à travers les pièces, ouvrait les

Weitere Kostenlose Bücher