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Le Bal Des Maudits - T 2

Le Bal Des Maudits - T 2

Titel: Le Bal Des Maudits - T 2 Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Irwin Shaw
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Stellevato avec révérence, c’est celui qui s’est enfui d’Italie. C’était un grand héros italien d’y a des années et des années, et y-z-ont donné son nom à un cigare.
    –  J’ai entendu parler de lui, dit Michael. Il s’est fait tuer en Afrique.
    –  Ah oui ? Y faudra que je l’écrive à mon vieux. Y sait pas lire, mais y a mon Angelina qui vient lui lire mes lettres, à ma mère et à lui. Qu’est-ce que je disais ? Ah oui ! il fumait un Italo Balbo…
    La voix de Stellevato sombra à nouveau dans le doux été bostonien de son rêve.
    –  On allait pas vite, parce qu’il fallait qu’on s’arrête à peu près une maison sur deux, et voilà qu’y se réveille et qu’y me dit : « Nikki, monte un pain de vingt-cinq cents à M me  Schwartz aujourd’hui, mais dis-lui qu’y faut qu’elle te paye comptant. » Je l’ai entendu comme si j’étais vraiment derrière mon volant, murmura Stellevato. Je suis descendu du camion et j’ai pris la glace et je suis parti pour monter chez M me  Schwartz, et mon père m’a crié après : « Nikki, redescends tout de suite. Reste pas là-haut avec cette M me  Schwartz. » Y me criait toujours des choses comme ça, mais y se rendormait aussitôt et y savait jamais si j’étais resté là-haut cinq minutes ou une heure. M me  Schwartz m’a ouvert la porte. On avait toutes sortes de clients, dans ce coin-là. Italiens, Irlandais, Juifs, Polonais, et j’étais bien vu partout, et tu serais surpris si je te disais tout le whisky et les gâteaux et les nouilles que j’absorbais chaque jour, dans cette tournée M me  Schwartz m’a ouvert la porte, une belle femme blonde bien balancée ; elle m’a caressé la joue et elle m’a dit : « Nikki, il fait chaud aujourd’hui. Entre un moment, je vais te donner un verre de bière », mais je lui ai dit : « Je peux pas mon père est en bas, et il est bien éveillé. » Alors, elle m’a dit : « Reviens à quatre heures », et elle m’a donné les vingt-cinq cents et je suis redescendu. Mon père avait l’air fâché, et il m’a dit : « Nikki, faut te décider. T’es un homme d’affaires ou le taureau du fermier ? » Et puis il a rigolé, et il m’a dit. « Du moment que t’as ramené les vingt-cinq cents, O. K. » Et puis, tout d’un coup, on s’est retrouvés tous dans le camion, toute la famille ; ça devait être un dimanche, et je tenais la main d’Angelina. Elle me laisse jamais faire autre chose parce qu’on va se marier et que sa vieille est pas commode. Et puis, on s’est retrouvés à table, et tout le monde était là, mes deux frères, celui qu’est à Guadalcanal et celui qu’est en Islande, et mon vieux nous versait du vin, et ma vieille s’amenait avec un grand plat de spaghetti… Et c’est juste à ce moment-là que ce salaud de Keane m’a réveillé à coups de botte dans les tibias…
    Stellevato demeura un instant silencieux.
    –  J’aurais bien voulu finir mon rêve, dit-il doucement.
    Et Michael comprit qu’il pleurait. Délicatement, il s ’abstint de tout commentaire.
    –  On avait deux camions de la General Motors. Peints en jaune, dit Stellevato, la voix pleine de la nostalgie des camions jaunes, de son père, des rues de Boston, du printemps en Massachusetts, du corps de M me  Schwartz, de la main de sa fiancée, du vin paternel et des clameurs de ses deux frères à l’arrivée du plat de spaghetti dominical. On commençait à s’agrandir. Mon père avait commencé avec un cheval de dix-huit ans et une carriole d’occasion, en arrivant d’Italie, et, quand la guerre a commencé, on avait deux camions et on allait en acheter un autre et engager un homme pour le conduire. Et puis, mes frères et moi, on a été mobilisés, et il a fallu qu’on vende les camions, et mon vieux a repris un cheval, parce qu’y sait pas lire ni écrire et qu’y sait pas conduire un camion. M0n Angelina m’écrit qu’il aime beaucoup le cheval. C’est un pommelé. Tout jeune. Sept ans. Mais y vaut pas un bon camion de la General Motors. On se défendait drôlement, tous ensemble. Rien que dans ma tournée, j’avais quatorze femmes chez lesquelles je pouvais monter à n’importe quelle heure, entre neuf heures du matin et quatre heures de l’après-midi. Je te parie, Mike, dit Stellevato avec une fierté juvénile, que t’as jamais eu ça, même à Hollywood.
    –  Jamais, Nikki, dit gravement Michael. Je n’ai jamais eu ça à

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