Le Bal Des Maudits - T 2
devrait pas sz’en aller de szette ferme. On pourrait tenir juszqu’à Noël. Szette vieille tante de Green a pas plus de cran qu’un nouveau-né.
Il lâcha une nouvelle rafale.
– Arrière, murmura-t-il. Laisszez mon tank tranquille.
Le lieutenant Green pénétra dans la pièce.
– Descendez, dit-il. Il commence à faire noir. Nous allons partir dans quelques minutes.
– Je vais rester un peu iszi, dit dédaigneusement Rickett, juzste pour veiller à sze que les Fritz gardent leurs disztanszes. Il fit signe à Noah et Burnecker de se retirer.
– Allez-y et, szi y vous repèrent, filez comme des fièvres.
Noah et Burnecker se regardèrent. Ils auraient voulu dire quelque chose au sergent méprisant debout à la fenêtre, le B. A. R. prêt à tirer dans ses grosses pattes, mais ils ne savaient pas que dire. Rickett ne les regarda même pas lorsqu’ils franchirent la porte et suivirent le lieutenant Green dans l’escalier.
Le salon sentait la sueur et la poudre. Le plancher était jonché d’innombrables douilles écrasées par les pieds des défenseurs. Cette pièce rappelait davantage leur état de siège que la pièce de l’étage supérieur. Les meubles étaient empilés contre les fenêtres, toutes les chaises étaient brisées, tous les hommes agenouillés le long des murs. Dans la demi-obscurité du crépuscule, Noah distingua Colclough, sur le plancher. Il était allongé sur le dos, les bras étendus contre ses flancs, les yeux fixés sur le plafond. Son nez coulait. Il reniflait de temps en temps, mais n’émettait pas d’autre son. Ses reniflements rappelèrent à Noah que lui aussi était enrhumé. Il sortit de sa poche un mouchoir kaki trempé de sueur et se moucha énergiquement.
Un calme reposant régnait dans ce salon. Une seule mouche bourdonnait furieusement à travers la pièce et, par deux fois, Riker tenta de l ’abattre avec son casque, mais il la manqua.
Noah s’assit sur le plancher, ôta son soulier et son legging droit. Très soigneusement, il lissa sa chaussette sur sa jambe. Rien ne pouvait être plus agréable que de masser doucement son propre pied et de faire disparaître les plis de sa propre chaussette. Les autres soldats l’observaient attentivement, comme s’il avait été en train d’exécuter un tour immensément intéressant et compliqué. Puis il remit son legging et le laça, en prenant bien soin de faire bouffer la jambe de son pantalon. Il éternua deux fois, très fort, et vit Riker sursauter légèrement.
– À tes souhaits, dit Burnecker.
Il sourit à Noah, et Noah lui sourit. « Quel type épatant », pensa Noah.
– Je ne peux pas vous dire exactement ce que vous devez faire, commença le lieutenant Green.
Il était accroupi près de l’entrée de la salle à manger et parlait comme s’il avait profité du silence pour préparer un long discours, puis y avait renoncé, après coup, surpris d’entendre sa propre voix.
– Je ne peux pas vous dire quelle est la meilleure façon de rejoindre nos lignes. À vous de vous débrouiller. La nuit, vous verrez les déflagrations des canons ; le jour, vous les entendrez, et vous aurez une bonne idée générale de la direction à prendre pour rejoindre les nôtres. Mais les cartes ne vous serviront à rien, et je vous conseille d’éviter les routes. Moins les groupes seront nombreux, et plus vous aurez de chances de vous en tirer. Je regrette que ça ait tourné de cette façon, mais, si nous restons ici, nous finirons tous dans le même sac. De cette manière, certains d’entre nous vont s’en tirer.
Il soupira.
– Beaucoup d’entre nous, sans doute, continua-t-il avec une gaieté transparente, nous tous, peut-être. Les blessés sont aussi bien installés que possible, et les Français font ce qu’ils peuvent, en bas, pour les soigner. Si quelqu’un en doute, conclut-il d’un ton défensif, il peut y aller voir.
Personne ne broncha. D’en haut parvint le son déchirant, précipité, du B. A. R. « Rickett, pensa Noah, toujours debout derrière sa fenêtre. »
– Néanmoins…, murmura le lieutenant Green… Néanmoins… C’est déplorable. Mais il est fatal que des choses comme ça se produisent de temps en temps. Je vais essayer d’emmener le ca pitaine avec moi… Si quelqu’un veut dire quelque chose, qu’il le fasse maintenant…
Personne ne voulait rien dire. Noah se sentit soudain très triste.
– Il fait noir, dit le lieutenant Green.
Il se
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