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Le Baptême de Judas

Le Baptême de Judas

Titel: Le Baptême de Judas Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Hervé Gagnon
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de mon être. Des asticots se promenaient sur ce qu’il restait de ses lèvres.
    —    Ai-je formé un pleutre qui abandonne à la première embûche ? tonna-t-il. N’as-tu ni cervelle, ni couilles ?
    Je sentis ses doigts à la chair pourrie s’enfoncer dans ma nuque et la serrer fermement, comme lorsqu’il me réprimandait quand j’étais enfant.
    —    Protège la Vérité, bougre d’excès de semence ! s’écria-t-il d’une voix forte. Je n’ai pas sacrifié le meilleur de ma vie pour qu’elle soit perdue par celui que j’ai fait ! Tu entends ?
    —    O... oui, maître, bredouillai-je. Je. je ferai de mon mieux pour vous faire honneur.
    Il me tira la tête vers lui jusqu’à ce que nos nez se touchent.
    —Jure-le ! Jure que tu ne laisseras pas la Vérité être perdue. Ou préfères-tu la damnation éternelle ?
    Jurer ? De quel droit ? J’étais damné. Rejeté par le Dieu que j’avais renié. Et comment pouvais-je faire le serment d’accomplir ce qui me semblait impossible ?
    —    Je ferai tout en mon pouvoir, maître, me contentai-je de dire.
    Une moue méprisante déforma les lèvres putréfiées de Montbard.
    —    C’est donc tout l’honneur qui reste en toi... dit-il avec une déception qui me transperça le cœur.
    Il m’attira encore plus près et couvrit mes lèvres des siennes en un immonde baiser qui scellait notre entente. Puis il me lâcha et redevint l’inconnu. Le cadavre reposa sereinement les mains sur le livre, referma les yeux et fut à nouveau mort. Je ne sais pas pourquoi, mais je pris le temps de le recouvrir correctement avant de m’enfuir à toutes jambes.
    Je m’éveillai en sueur, étouffant un cri de terreur. Pernelle me posa une main sur l’épaule pour me rassurer.
    —    Ce n’est rien, dis-je. Un mauvais cauchemar. Ne t’inquiète pas.
    Dans le noir, ma voix tremblait.
    1
    Forts dans la foi.
    2
    Du faux découle ce qu’on veut.

Chapitre 6 Dépravation
    L’attaque surprise du mystérieux templier - s’il était vraiment membre des Pauperes commilitones Christi Templique Solomonici 1 - laissa sa marque sur le convoi. Dès lors, les soldats furent plus que jamais sur le qui-vive. Guillaume était assez intelligent pour savoir que, pour les croisés, les terres du Sud demeuraient un territoire ennemi, cela même si leurs victoires s’y accumulaient depuis trois ans et qu’ils en dominaient une partie toujours plus vaste. L’attentat dont j’avais fait l’objet lui confirmait qu’il devait redoubler de prudence.
    C’était certainement pour cette raison que Pernelle, Ugolin et moi-même ne fûmes plus séparés et placés à quelques toises derrière Guillaume des Barres. Il était plus facile de nous surveiller et de nous protéger si nous demeurions groupés. Le jour, lorsque la largeur du chemin le permettait, nous chevauchions côte à côte, enchaînés les uns aux autres, un de mes fers passé au poignet de mon amie et un des siens à celui du Minervois. Sinon, nous devions le faire à la file en nous étirant les bras pendant des lieues. Ainsi, toute tentative de fuite ne pouvait être effectuée que par les trois, ce qui compliquerait considérablement la tâche. La nuit, on nous attachait de la même manière près d’un feu. Nous étions perpétuellement sous bonne garde. Pernelle profitait des arrêts pour soigner ma main infirme, dont la plus récente plaie guérissait assez bien.
    Au cours des jours suivants, l’étranger ne se manifesta plus et il ne se produisit rien qui pût nous éclairer sur son identité ou ses intentions. Pour ma part, j’avais beau ressasser sans cesse nos deux rencontres, je n’y voyais pas plus clair. Par une autorité qui m’était inconnue, pour peu qu’elle existât, cet homme avait cru être en droit de m’ordonner de me soumettre à la volonté de Montfort et de le laisser s’emparer de la seconde part de la Vérité. Quand Ugolin et Pernelle avaient tenté de s’échapper, il s’était manifesté à nouveau. Sa réaction avait été sans équivoque : voyant que j’avais tenté de protéger la première part, il avait cherché à me tuer. Le fait qu’il soit au courant de l’épisode m’indiquait qu’il avait suivi le convoi depuis notre première rencontre, soit d’assez près pour en être témoin, soit de plus loin, ce qui impliquait qu’il avait un informateur parmi les soldats. Dans un cas comme dans l’autre, son intérêt pour toute cette histoire était

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