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Le bûcher de Montségur

Le bûcher de Montségur

Titel: Le bûcher de Montségur Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Zoé Oldenbourg
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du Languedoc, les chevaliers qui conspiraient en secret montaient à Montségur pour y rencontrer leurs amis, se concerter, recevoir des instructions ; beaucoup de ces pèlerinages devaient avoir un caractère plus politique que religieux et – bien que l’on ne sache rien de leur activité – les parfaits, de petite noblesse eux-mêmes pour la plupart, ne devaient pas rester étrangers à ce mouvement patriotique ; et peut-être entretenaient-ils autant leurs fidèles de la libération de leur pays que de la vanité d’un monde créé par un dieu mauvais.
    En fait, ce qui est étrange, nous n’en savons rien. Nous savons que Guilhabert de Castres, Jean Cambiaire, Raymond Aiguilher, Bertrand Marty et d’autres recevaient un grand nombre de chevaliers qui ont joué un rôle prépondérant dans la lutte pour l’indépendance. Guilhabert de Castres, qui devait être fort âgé, descendait de Montségur et se rendait sous bonne escorte dans des châteaux de la région pour y faire de brefs séjours ; tous ces déplacements étaient organisés d’avance avec beaucoup de soin et dans le plus grand mystère ; l’infatigable évêque ne voulait évidemment pas renoncer, par crainte du danger, à visiter ses ouailles ; mais il est légitime de supposer qu’il prenait une part active et personnelle au soulèvement qui se préparait, et qu’il encourageait ses fidèles à la lutte plutôt qu’à la non-résistance.
    Les témoignages qui nous sont parvenus constatent seulement que tel parfait est venu dans tel endroit, qu’il a rompu le pain et que telles personnes l’ont « adoré » ; et en suivant l’activité de dizaines et de dizaines de chevaliers, de femmes nobles, de sergents d’armes qui allaient, venaient, repartaient, revenaient, séjournaient à Montségur, etc., on n’apprend absolument rien, sauf le fait qu’ils écoutaient des sermons. Ainsi verra-t-on, au début du siège de Montségur (13 mai 1243), deux sergents d’armes, le diacre Clamens et trois parfaits descendre du château, traverser les lignes ennemies pour aller jusqu’à Causson, et cette expédition n’aura été entreprise que dans le but d’aller manger du pain bénit avec deux hérétiques de Causson. Il est d’ailleurs possible que l’activité des parfaits et des croyants autour de Montségur ait été dictée par des impératifs strictement religieux et rituels, dont nous ne pouvons mesurer l’importance faute de renseignements précis. Mais le contraire n’est pas impossible.
    Il est peut-être difficile d’imaginer les parfaits organisant une activité terroriste ; mais après tout, nous avons vu des évêques et même des saints catholiques se lancer à corps perdu dans la bagarre, le péril que courait l’Église justifiant tous les moyens d’action ; et les ministres cathares, en agissant de même, eussent été plus excusables, puisque leur foi était plus violemment persécutée. Ce sont des hommes de Montségur qui ont participé à l’acte de terrorisme le plus retentissant de toute l’histoire de l’Inquisition. Les parfaits ne l’ont pas inspiré, ils l’ont peut-être approuvé. En un moment où la défense de leur Église coïncidait avec celle de leur patrie terrestre, les saints hommes de Montségur, qui étaient après tout faits de chair et de sang, pouvaient être aussi patriotes que des chevaliers faidits .
    Raymond de Perella et son gendre Pierre-Roger de Mirepoix étaient parmi les chefs les plus décidés de la noblesse résistante ; il est à peu près sûr qu’ils entretenaient des rapports secrets avec le comte de Toulouse ; sans doute aussi avec Raymond Trencavel et avec le comte de Foix, et la plus grande partie de la noblesse cathare.
    De grands seigneurs comme les sires de Niort avaient fourni une aide matérielle importante aux bons hommes de Montségur après l’hiver 1234, où toutes les récoltes gelèrent sur pied : Bernard-Othon de Niort s’occupa lui-même à rassembler les soixante muids de blé qui furent envoyés à Montségur ; la chevalerie de Laurac donna vingt muids, Bernard-Othon de Niort à lui seul dix muids, le reste avait été fourni par les dons des seigneurs et des bourgeois des environs de Carcassonne et de Toulouse. Il y eut d’autres collectes, fort nombreuses, en argent et en nature, destinées aux fonds du château et à son approvisionnement.
    Montségur devenait un arsenal ; un dépôt d’armes s’y constituait dont l’importance

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