Le bûcher de Montségur
devait encore achever de se consumer, lentement ; éparpillés sur la montagne les soldats, assis autour des feux devant leurs tentes, devaient encore voir, de loin, frémir les braises rouges sous la fumée. Cette nuit-là, les quatre hommes dépositaires du trésor descendaient sur des cordes le long de la paroi rocheuse, presque en face du champ où se mourait l’immense feu nourri de chair humaine.
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182 Doat, t. XXIV, 44, déposition de R. de Perella ; Ibid., f° 58,
183 Doat, t. XXIV, pp. 170-171, 181.
184 Doat, t. XXIV, p. 180.
185 Id., p. 174.
186 Guillaume de Puylaurens, ch. XXXXVI.
187 Doat, t. XXIV, p. 172, déposition d’Imbert de Salas.
188 Guillaume de Puylaurens, ch. XXXXVI.
189 Doat, t. XXII, p. 263, t. XXIV, pp. 202-203, 207.
190 Doat, t. XXIV, p. 80; t. XXII, p. 255; t. XXII, p. 247; t. XXIV, p. 207.
191 Au sujet de ces dons, voir Doat, t. XXIV, p. 173.
192 Au sujet de ces dons, voir Doat, t. XXIV, pp. 180, 200.
193 On croit que Corba, à cette date, était peut-être malade, et déjà mourante. Parmi les hommes d’armes, il y avait sans doute aussi des blessés graves.
194 Témoignage d’A.-R. de Mirepoix, sur les dires d’Alzeu de Massabrac, Doat, t. XXII, p. 129.
195 Guillaume de Puylaurens, ch. XLVI.
196 Déposition d’Arpaïs de Ravat. Doat, t. XXII, p. 259.
197 Guillaume de Puylaurens, ch. XLVI.
CONCLUSION
Cinq ans après la chute de Montségur, Raymond VII mourait, sans fils légitime, à l’âge de cinquante-deux ans. Le comté de Toulouse passait aux mains d’Alphonse de Poitiers, mari de la comtesse Jeanne, fille unique du comte. Le couple mourut en 1271, sans laisser de postérité. Ces deux morts rattachaient définitivement à la couronne de France un pays qui depuis vingt ans était déjà en fait une province française, dans le sens ancien et traditionnel du mot province : un pays d’importance secondaire, colonisé, exploité, administrativement et intellectuellement dominé par une métropole puissante et soucieuse de ses propres intérêts.
Alphonse de Poitiers, en vingt-deux ans, ne se rendit à Toulouse que deux fois : en 1251, le jour où il vint recevoir l’hommage de ses nouveaux vassaux, et en 1270, un an avant sa mort. Ce bon administrateur s’occupa surtout d’organiser un système fiscal serré et efficace qui lui permit de prélever sur ses domaines les sommes dont il avait besoin pour la réalisation de ses desseins politiques, ou plutôt de ceux de son frère : pour saint Louis, la reconquête de la Terre Sainte restait le premier objectif de la politique française. Il faut croire qu’Alphonse ne prit jamais vraiment au sérieux son titre de comte de Toulouse et ne fut qu’un exécuteur fidèle des volontés de son frère. Le peuple qui, en 1249, suivait en pleurant le cercueil de Raymond VII, de Millau à Fontevrault, savait qu’il pleurait la fin de son existence nationale.
Quelques mois avant sa mort, le comte avait fait brûler à Agen quatre-vingts hérétiques, ou personnes suspectes d’hérésie, après un jugement sommaire que les inquisiteurs eux-mêmes ne se fussent pas permis. Sans doute par cet acte de violence pensait-il gagner les bonnes grâces de l’Église ; mais peut-être aussi voulait-il faire expier aux hérétiques le malheur qu’ils avaient attiré sur son pays. La mesure était comble ; lassé par les persécutions, les humiliations, démoralisé par l’étouffement progressif des forces vives du pays, le peuple occitan – du moins ses classes privilégiées, celles qui avaient le plus à perdre – abandonnait la religion cathare et se rangeait, amer et résigné, du côté des vainqueurs.
Le Languedoc était réuni à la France ; il est assez vain de se demander si cette réunion, commandée somme toute par la situation géographique et politique du pays, n’eût pas pu se faire d’une manière moins brutale. Existait-il réellement, entre les hommes du Nord et ceux du Midi, une telle incompatibilité d’intérêts et de pensée que seule la plus cruelle des guerres de conquête était capable d’amener cette union entre Français ? Avant 1209, il y avait peut-être une incompréhension réciproque, mais pas de haine. Après la mort de Raymond VII, un peuple las de haïr et de souffrir se résigna peu à peu – quoique non sans mal, ni sans révoltes – à voir son langage devenir un patois.
Qui a jamais calculé ce que perd un peuple en
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