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Le bûcher de Montségur

Le bûcher de Montségur

Titel: Le bûcher de Montségur Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Zoé Oldenbourg
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Christ.
    Bien plus, les cathares se réclamaient d’une tradition plus ancienne, donc plus pure et plus proche de l’enseignement des Apôtres que ne l’était celle de l’Église de Rome, et prétendaient être les seuls à avoir gardé l’Esprit Saint envoyé par le Christ à son Église ; il semble bien qu’en partie, du moins, ils aient été dans le vrai : le rituel cathare, dont nous possédons actuellement deux textes datant du XIII e  siècle, montre (ainsi que le prouve Jean Guiraud dans son ouvrage sur l’Inquisition) que cette Église possédait sans doute des documents fort anciens, directement inspirés des traditions de l’Église primitive.
    En effet, ainsi que le prouve Jean Guiraud en comparant les cérémonies de l’initiation et du baptême des catéchumènes de l’Église primitive et celles de l’initiation des cathares, il y a entre les deux traditions un parallélisme si constant qu’il ne saurait être fortuit. Le néophyte cathare, comme le catéchumène chrétien, devait être reçu par l’Église, après un temps de probation et après le suffrage des chefs de la communauté ; tout comme l’admission dans l’Église cathare, le baptême, dans l’Église primitive, n’était accordé qu’aux adultes en pleine possession de leurs facultés et n’était souvent demandé par les croyants qu’à leur lit de mort. Le ministre qui reçoit le néophyte dans l’Église est appelé l’Ancien ( senhor ), traduction évidente de presbyter . L’acte de renonciation des catéchumènes à Satan est parallèle à celui de la renonciation des cathares à l’Église de Rome. À part l’onction par l’huile symbolisant le Saint-Esprit et l’immersion dans la piscine baptismale (sacrement trop liés à la matière et rejetés par les cathares qui ne gardent que l’imposition des mains), l’admission du catéchumène dans l’Église primitive est, en tous points, semblable à celle du postulant cathare dans sa nouvelle Église. Il en est de même pour la cérémonie de la confession du fidèle à l’Église et de la rémission des péchés par l’assemblée des cathares.
    Certains inquisiteurs, en particulier Bernard Gui, au XIV e  siècle, ont été frappés par ce qu’il y avait de chrétien dans les rites de l’Église hérétique et ont cru qu’il s’agissait en quelque sorte d’une « singerie » du baptême catholique ; mieux renseignés qu’eux sur les coutumes de l’Église primitive, nous devons admettre que les cathares n’avaient fait que suivre une tradition plus ancienne que celle même de l’Église et qu’ils pouvaient prétendre avec quelque raison que c’était Rome qui était tombée dans l’« hérésie » en s’écartant de la pureté originelle de l’Église des Apôtres.
    Le texte même du rituel, tel qu’il existe aujourd’hui, remonte certainement à une époque très ancienne (bien que les deux versions que l’on en possède, l’une en occitan, l’autre en latin, datent du XIII e  siècle). Ce texte a-t-il été apporté d’Orient et traduit par des missionnaires bulgares ? Où, et dans quelles conditions s’est-il conservé et quelle en est l’origine exacte ? Il est composé en grande partie de citations des Évangiles et des Épîtres, assez brièvement commentées, se référant sans cesse au Père, au Fils et au Saint-Esprit et à des épisodes de l’Évangile ; il eût pu être approuvé par n’importe quel bon catholique et, en le lisant, on a l’impression de reconnaître la saveur et la vigueur du christianisme primitif, plutôt que les spéculations théologiques d’une secte à laquelle on attribue les doctrines les plus hétérodoxes.
    Or, ce rituel, ce livre de prière et d’initiation, n’était pas destiné au vulgaire ; il était l’expression la plus formelle, la plus sacrée de l’Église cathare, la traduction en paroles du sacrement suprême de cette Église. N’y trouvant rien qui impliqua, fût-ce de loin, le dualisme manichéen, la négation de l’Incarnation et de l’Eucharistie, la théorie de la métempsychose ; y rencontrant même des affirmations contraires à la doctrine cathare sur le baptême de l’eau, nous devons conclure que ces textes sont très antérieurs au catharisme proprement dit. Mais le fait même que les cathares (qui ne manquaient ni de hardiesse ni de goût pour la spéculation théologique) n’aient rien voulu y modifier, montre que ce rituel exprimait bien

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