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Le cadavre Anglais

Le cadavre Anglais

Titel: Le cadavre Anglais Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Jean-François Parot
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serais reconnaissant de me les rappeler.
    — Soit. Mais je souhaiterais comprendre les raisons qui justifient pareille inquisition ?
    — Le mot est fort.
    — Je le retire s'il vous blesse. Je croyais le chapitre clos et l'intéressé de retour en Angleterre ?
    Nicolas crut comprendre à cet instant que M. Le Roy ne connaissait sans doute qu'une partie du drame. Ou alors il avait affaire à un redoutable jouteur.
    — Allez toujours, monsieur.
    Le Roy, agacé, poursuivit sur un ton piqué.
    — Sachez, si vous n'êtes pas informé déjà de cela, qu'il y a un an monseigneur de Sartine, dont j'ai l'honneur d'être le fournisseur…
    — Le mien également, dit Nicolas soucieux de gagner la confiance de l'horloger, considérez, monsieur, cet exemplaire qui m'est précieux.
    Il lui tendit sa montre. Le Roy l'examina avec soin.
    — Fort beau modèle à répétition. Je m'en souviens. Un officier des plus distingués. Il convoyait à Paris des étendards pris à l'ennemi. Il se nommait… Ranreuil, je crois… C'est cela, le marquis de Ranreuil ! Mais comment se fait-il… ?
    — Qu'elle soit en ma possession ? La chose est simple, je suis son fils et marquis de Ranreuil.
    L'intermède fit une heureuse diversion. Le Roy considéra le commissaire avec un étonnement respectueux, dès lors convaincu de se pouvoir confier sans détours.
    — Ainsi, le ministre de la marine m'a entretenu d'un projet qui devait, selon ses propres mots, demeurer environné de ténèbres.
    Nicolas sourit, Sartine n'était décidément pas ménager de ses expressions préférées.
    — Je devais en conserver jalousement le secret. Un jeune homme arriverait dans mon atelier pour y perfectionner un art dont on m'assurait qu'il connaissait déjà les rudiments. Quelle surprise ! En fait, j'avais rarement rencontré apprenti aussi doué et aussi élevé dans la connaissance du métier. Il faut vous dire que l'horlogerie, science du mouvement, exige que ceux qui la professent connaissent les lois du mouvement des corps, qu'ils soient bons géomètres, mécaniciens, physiciens ; qu'ils possèdent le calcul et soient nés non seulement avec le génie propre à saisir l'esprit des principes, mais encore avec les talents de les appliquer. Au reste, comme on ne parvient que par gradation à acquérir les lumières pour la théorie, de même la main ne se forme que par l'usage ; mais cela se fait d'autant plus vite que l'on a mieux dans la tête ce que l'on veut exécuter. Je conseille toujours de commencer par l'étude de la science avant d'en venir à la main-d'œuvre ou, tout au moins, de les faire marcher en même temps. On voit d'après ce tableau que pour bien posséder l'horlogerie, il faut avoir la théorie, l'art d'exécuter et le talent de composer, trois choses qui ne sont pas faciles à réunir dans la même personne, et cela d'autant moins que, jusqu'ici, on a regardé l'exécution des pièces d'horlogerie comme la partie principale, tandis qu'elle n'est que la dernière. Cela est si vrai que la montre ou la pendule la mieux exécutée fera de très grands écarts si elle ne l'est pas sur de bons principes, tandis qu'étant médiocrement exécutée, elle ira fort bien si les principes sont bons.
    — Et ce jeune homme était-il particulièrement porté sur l'une ou l'autre des facettes de votre art ? Ce monsieur, monsieur ? Son nom m'échappe.
    — François Saül Peilly. De fait il appartient à l'une de ces familles de la RPR 144 émigrées en Angleterre après la révocation de l'Édit de Nantes. Des horlogers eux aussi et, sans doute, des maîtres dans leur art si j'en juge par mon élève. Vous avez raison, il maîtrisait en effet les données d'une recherche qui, depuis des siècles, tient en haleine tous ceux qui s'y consacrent.
    — La recherche de la longitude ou comment la calculer.
    — Vous savez donc ! Je n'ai plus rien à vous expliquer. J'y ai consacré ma vie. En 1754, j'ai remis à l'Académie des sciences un billet cacheté contenant la description d'une montre marine que je me proposais d'exécuter. En 1767, le marquis de Courtanvaux à bord de L'Aurore en fit l'expérimentation durant quarante jours de navigation. Ma montre n'avait que sept minutes de retard. L'année suivante, Cassini 145 , sur une durée similaire, relevait une erreur d'à peine un huitième de degré. En 1768 et 1773, l'Académie me couronna pour la découverte de l'isochronisme et du ressort spiral.
    — Ainsi donc Peilly

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