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Le Capitaine Micah Clarke

Le Capitaine Micah Clarke

Titel: Le Capitaine Micah Clarke Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Arthur Conan Doyle
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que si je paie l'entretien d'un dragon pour toute la durée
de la guerre, on me rendra mon cheval pie.
    J'étais resté assis pendant tout ce temps-là,
me demandant quelle idée le ciel m'inspirerait pour mener mon
affaire au milieu de ce fourmillement de solliciteurs, parmi cette
cohue d'officiers qui entouraient le Duc.
    S'il y avait eu la moindre chance d'obtenir
une audience de lui par un autre moyen, je l'aurais saisie avec
empressement, mais tout ce que j'avais tenté dans ce but avait
échoué.
    Si je ne saisissais pas cette occasion, il se
pourrait que jamais je ne me retrouvasse en face de lui.
    Mais lui était-il possible de réfléchir à une
telle affaire, ou de la discuter en présence d'autres
personnes ?
    Quelle chance avait-elle d'être examinée ainsi
que cela convenait ?
    Alors même que ses dispositions le porteraient
de ce côté, il n'oserait laisser entrevoir son indécision quand
tant d'yeux étaient fixés sur lui.
    Je fus tenté de prendre un autre motif pour
expliquer ma venue, et de compter sur la fortune pour obtenir
d'elle une chance plus favorable pour la remise de mes papiers.
    Mais enfin cette chance pouvait ne point se
présenter, et le temps pressait.
    On disait qu'il retournerait à Bristol le
lendemain.
    Tout bien considéré, il me parut que je devais
tirer le meilleur parti possible de ma situation actuelle et
espérer que la discrétion et le sang-froid du Duc le décideraient à
m'accorder une entrevue plus particulière, quand il aurait vu
l'adresse inscrite sur mes dépêches.
    J'avais à peine formé cette résolution que mon
nom fut appelé.
    Aussitôt je me levai et entrai dans la chambre
du fond.
    Elle était petite, mais fort haute, tendue de
soie bleue, avec une large corniche dorée.
    Au milieu se voyait une table carrée encombrée
de piles de papiers.
    De l'autre côté était Sa Grâce, en grande
perruque retombant jusque sur ses épaules, la mine majestueuse,
imposante.
    Il avait ce même air insaisissable de la Cour,
que j'avais remarqué tant chez Monmouth que chez Sir Gervas, et
cela joint à ses traits bien marqués, énergiques, à ses grands yeux
perçants, le désignait comme un meneur d'hommes.
    Son secrétaire particulier était auprès de
lui, notant ses ordres.
    Les autres personnes étaient rangées derrière
lui en demi-cercle, ou échangeaient des prises de tabac dans la
profonde embrasure de la fenêtre.
    – Marquez la commande faite à Smithson,
disait-il lorsque j'entrai, cent casques, et autant de pièces de
cuirasse, devants et dos, à tenir prêts pour mardi, en outre cent
vingt fusils hollandais pour les mousquetaires, avec deux cents
bêches en plus pour les ouvriers, marquez que cette commande sera
tenue pour nulle et non avenue si elle n'est point exécutée au jour
dit.
    – C'est marqué, Votre Grâce.
    – Capitaine Micah Clarke, dit le Duc, en
lisant la liste qu'il avait devant lui. Que désirez-vous,
capitaine ?
    – Il serait préférable que je puisse en
entretenir Votre Grâce en particulier, répondis-je.
    – Ah ! c'est vous qui demandiez
l'audience particulière ? Eh bien, capitaine, voici mon
conseil, et mon conseil est un autre moi-même. Ainsi donc vous
pouvez vous regarder comme en tête-à-tête. Ce que je peux entendre,
ils peuvent l'entendre. Pardieu, mon homme, au lieu de bégayer et
de rouler de gros yeux, dites votre affaire.
    Ma demande avait attiré l'attention de
l'assistance.
    Ceux qui étaient à la fenêtre se rapprochèrent
de la table.
    Rien ne pouvait être plus défavorable au
succès de ma mission, et pourtant il n'y avait pas d'autre parti à
prendre que de remettre mes dépêches.
    Je puis le dire en toute conscience, et sans
aucune vantardise, je ne redoutais rien pour moi-même.
    Accomplir mon devoir était la seule pensée
présente à mon esprit.
    Et ici, je puis le dire une fois pour toutes,
mes chers enfants, je parle de moi-même dans tout le cours de ce
récit, avec la même liberté que s'il s'agissait d'un autre
homme.
    À dire vrai, le vigoureux et actif jeune homme
de vingt et un ans était bien, en effet, un autre homme que le
vieux bonhomme à tête grise assis au coin de la cheminée, et
incapable de faire autre chose que de raconter des vieilles
histoires aux petits.
    Moins l'eau est profonde, plus elle
éclabousse.
    Aussi un faiseur d'embarras m'a toujours paru
un objet méprisable.
    J'espère donc que vous ne vous figurerez
jamais que votre grand papa chante ses propres louanges, ou

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