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Le Chant de l'épée

Le Chant de l'épée

Titel: Le Chant de l'épée Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Bernard Cornwell
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penché sur
son écritoire, l’œil fixé sur sa page.
    — Si je ne me trompe, finit-il par dire
sans s’interrompre dans sa tâche, les Danes viennent d’anéantir la flotte la
plus vaste jamais déployée par le Wessex. À mon avis, ils ne seraient guère
effrayés si tu agitais l’eau avec tes quelques rames.
    — Nous devons donc laisser les flots se
reposer ? m’indignai-je.
    — Je pense que le roi ne veut pas que
nous fassions quoi que ce soit qui aggrave une regrettable situation.
    — La regrettable situation étant que sa
fille est violée chaque jour par les Danes ? Et tu nous demandes de ne
rien faire ?
    — Précisément. Tu as saisi l’essence de
mes ordres. Tu ne feras rien qui l’empire. (Sans me regarder, il trempa sa
plume et l’égoutta méticuleusement.) Comment empêches-tu une guêpe de te piquer ?
    — En la tuant avant.
    — En restant immobile, et c’est ainsi que
nous ferons désormais. As-tu la moindre preuve que la dame est violée ?
    — Non.
    — Elle leur est précieuse, et je pense qu’ils
ne feront rien qui diminue sa valeur. Sans doute es-tu plus informé que moi des
coutumes païennes, mais si notre ennemi possède ne serait-ce qu’une once de bon
sens il la traitera avec le respect dû à son rang. Nous aurons besoin de
soldats quand le moment sera venu de lever la rançon.
    En d’autres termes, mes hommes devaient
menacer quiconque possédait la moindre pièce.
    — Et de combien sera-t-elle ? m’enquis-je
aigrement.
    — Il y a trente ans, en Franquie, l’abbé
Louis du monastère de Saint-Denis fut capturé. Un homme bon et pieux. La rançon
pour lui et son frère se monta à six cent quatre-vingt-six livres d’or et trois
mille deux cent cinquante d’argent. La dame Æthelflæd n’est peut-être qu’une
simple femme, mais je ne pense pas que l’ennemi envisage une somme moindre.
    Je ne répondis rien. La somme avancée était
inimaginable, mais il avait sûrement raison de penser que Sigefrid voudrait la
même, sinon davantage.
    — Tu vois donc, continua-t-il froidement,
que la valeur de la dame est considérable pour ces païens et qu’ils ne voudront
point la diminuer. J’ai assuré le seigneur Æthelred de ce fait et je te serais
reconnaissant de ne pas lui ôter cet espoir.
    — Sigefrid t’a-t-il envoyé un message ?
demandai-je, trouvant qu’Erkenwald était bien sûr de son fait.
    — Non, et à toi ?
    Il me défiait en sous-entendant que j’étais
peut-être en train de négocier secrètement avec l’ennemi. Je ne répondis pas.
    — Je prévois que le roi désirera mener
lui-même les négociations, dit-il. Aussi, tant qu’il ne sera point arrivé ou n’aura
pas formulé d’ordres contraires, tu dois rester à Lundene. Tes navires
demeureront à quai.
    Il en fut ainsi. Mais les navires des Norses
naviguaient, eux. Le commerce, qui avait prospéré durant l’été, fut réduit à
néant devant les essaims de Vikings qui surgissaient de Beamfleot pour battre l’estuaire.
Mes meilleures sources d’information disparurent avec les marchands, même si
quelques-uns parvenaient à remonter jusqu’à Lundene. C’étaient généralement des
pêcheurs qui venaient vendre leurs prises au marché et disaient que plus de
cinquante navires étaient désormais échoués dans la crique sous le fort de
Beamfleot. Les Vikings se bousculaient dans l’estuaire.
    — Ils savent que Sigefrid et son frère
seront riches, dis-je à Gisela le soir de mon audience avec l’évêque.
    — Très riches, ironisa-t-elle.
    — Assez pour rassembler une armée, continuai-je,
amer.
    Car la rançon versée, les frères Thurgilson
seraient prodigues et des navires viendraient de toutes les mers pour former
une horde capable d’envahir le Wessex. Le rêve de conquête de tous les pays
saxons, qui dépendait naguère de l’aide de Ragnar, semblait en passe de se
réaliser sans l’intervention de ceux du Nord. Et tout cela grâce à la capture d’Æthelflæd.
    — Attaqueront-ils Lundene ? demanda
Gisela.
    — Si j’étais Sigefrid, je traverserais la
Temse et j’entrerais dans le Wessex par le Cent. Il aura assez de navires pour
faire passer toute une armée et nous n’avons rien qui puisse l’arrêter.
    Stiorra jouait avec une poupée de bois que j’avais
taillée dans du hêtre et que Gisela avait habillée de bouts de linge. Ma fille
semblait absorbée et heureuse, et je tentai d’imaginer que je la perdais. J’essayai
de me

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