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Le Chant des sorcières tome 2

Le Chant des sorcières tome 2

Titel: Le Chant des sorcières tome 2 Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Mireille Calmel
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oblique sur ses pommettes hautes et illuminait plus encore l'azur de son regard. Jamais elle n'en avait vu de cette couleur, de cette profondeur précieuse, de cette intensité. Elle laissa en suspens cette ébauche de complicité.
    — Marchons un peu, voulez-vous ?
    Elle hocha la tête. Marcher, oui. À ses côtés. Loin de Philibert de Montoison, de Louis. Loin de tout et de tous. Il régla son pas sur le sien. Un coup d'œil vers la source avant de s'éloigner avec lui dans la forêt. Assise sur un rocher, à l'ombre, près de Nassouh, Algonde devisait. Sa voix parfois émaillée d'un rire chantait sa plénitude d'avoir retrouvé Mathieu au travers des banalités qu'ils échangeaient. Le tchélébi lui parlait de son pays, Philippine en était sûre. Ils avaient fait connaissance si vite. Lui avait-elle dit qu'elle était fiancée ?
    — Vous voici songeuse, douce amie… Douteriez-vous de la discrétion de cette damoiselle qui, autant que je puisse en juger, fait ici le bonheur de mon compagnon ?
    — Non point, prince. Algonde m'est autant fidèle que Nassouh vous est dévoué. Et c'est la seule sans doute à qui je confierais ma vie si je le devais.
    Il s'immobilisa, soudain grave, lui fit face.
    — J'avais chargé mon frère de lait de vous suivre hier. Il serait intervenu si Philibert de Montoison avait tenté de vous déshonorer. Il m'a rapporté son propos. Abject. Le nom d'Algonde a été prononcé. N'est-ce point elle que le chevalier prétendait peu à peu empoisonner ?
    — Si fait.
    — Par quel miracle… s'étrangla-t-il.
    — Un élixir, prince. Qu'une sorcière de nos terres de Sassenage a confié à sa mère pour la sauver.
    Le souffle de Djem se fit court. La chaleur intense et bourdonnante à ses oreilles.
    — Qu'avez-vous ? s'effraya Philippine devant l'évidence de son trouble.
    — Le flacon qui contenait cet élixir, l'avez-vous vu ?
    Il roulait des yeux comme une bête traquée et Philippine ne put moins que l'apaiser d'une main sur son poignet.
    — Je l'ai vu, oui. En quoi est-ce important, prince ? Vous m'effrayez.
    — Décrivez-le, je vous prie. Il en va de ma vie peut-être.
    — Pyramidal. En verre bleu…
    — … serti d'une dentelle d'argent sur trois de ses faces, termina-t-il en emprisonnant sa main de la sienne.
    — Serti d'une dentelle d'argent en effet. Mais comment savez-vous ?
    Philippine était perplexe, déroutée. Troublée. Et rassurée enfin de voir un peu de vie regagner les traits altérés de Djem. C'est encore d'une voix hachée pourtant qu'il expliqua :
    — Ce flacon… cet élixir… m'a été donné en Anatolie par une sorcière… alors que je m'apprêtais à combattre mon frère à la tête de mon armée. Pour me guérir du poison avec lequel il espérait m'assassiner.
    — Voyons, prince, ce ne peut être le même.
    Il porta à ses lèvres cette main qui s'était, dans la sienne, mise à trembler. Tant d'espoir revenu soudain.
    — Si, ma douce, ma chère Hélène. Il m'a été volé il y a quelques mois par une de mes épouses avant qu'elle me trahisse et soit chassée.
    Un petit cri de surprise échappa à Philippine.
    — La première fois que nous nous sommes vus, ici… Lorsque vous vous êtes battu et plus tard, lorsque votre compagnon vous a quitté. C'était à cause de cela, n'est-ce pas ?
    Il s'étonna.
    — Oui. Je ne pensais pas que vous aviez assisté à notre échauffourée.
    — Je vous en demande pardon, prince. J'allais abreuver mon cheval à la source lorsque je vous ai vu sauter du vôtre. L'instant d'après vous vous battiez et…
    Elle baissa les yeux pour se garder du trouble que ce souvenir avait éveillé. Autour d'eux la forêt avait resserré son écrin. Sa voix se fit murmure.
    — J'aurais dû tourner bride. J'étais fascinée. Il me fallait savoir lequel des deux l'emporterait. Et ensuite…
    Il se rapprocha, portant sur son cœur cette main fine qu'il avait gardée.
    — Ensuite, damoiselle Hélène ?
    Les images lui venaient et elle ne cherchait plus à les refouler. Pas plus que l'émotion qui lui nouait la gorge au contact de ces battements désordonnés sous sa paume ouverte. Un aveu pour tout expliquer. Un aveu pour les lier à jamais.
    — … Le craquement de votre épaule. La douleur sur vos traits. Votre courage. La réaction de Houchang lorsque vous l'avez bravé. Votre inconscience. J'étais bouleversée.
    Elle osa enfin relever les yeux. Les siens la balayèrent d'autant d'amour

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